VIII - Cauchemars

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Huitième épisode
« Cauchemars »


Nous sommes sortis d'Alexandria. Aaron, toujours aussi exagérément souriant, tient les rênes de notre petite expédition. Le véhicule roule depuis une dizaine de minutes quand mon guide coupe les moteurs et descend de la voiture. Je ne mets pas longtemps à l'imiter.

« Nous y sommes presque !

Me claironne-t-il alors qu'il entreprend une marche dont j'ignore la destination. D'accord, je l'avoue. Il a piqué ma curiosité. Pourtant, ce n'est pas quelque chose de facile.

Quand je le rejoins finalement là où il s'est arrêté, je jette un œil dans la direction qu'il me désigne.

- Tadam ! chantonne-t-il.

Devant nous, une vieille baptiste grise prend toute la place. Je ne connais pas le magasin qui y loge. Le nom ne me dit rien et en plus, certaines lettres sont illisibles.

- Qu'est-ce que c'est ? demandais-je.

Il sourit sans me répondre, puis descend la colline, visiblement prêt à s'engouffrer là-dedans.

- Attends ! C'est peut-être rempli de marcheurs ce truc-là !
- Oh non, crois-moi, me dit Aaron, ce n'est pas le genre d'endroit où les gens vont lors d'une apocalypse. »

Je plisse le front, peu convaincue. Je sors mon poignard, sur mes gardes. S'il veut faire le con et mourir, ce n'est pas mon cas. Je descends à sa suite, prête à me défendre en cas de besoin.

Devant le bâtiment, Aaron tire sur les portes qui restent obstinément closes. J'attends. Finalement, après un millionième essai de sa part, je perds patience. Jetant un regard autour de moi, je remarque rapidement une vieille barre de fer jonchant le sol de ce paysage décrépit.

« Pousse-toi. »

Quand il se tourne vers moi, ses yeux s'agrandissent et il se pousse de justesse alors que je percute violemment la vitre de la porte. L'onde de choc qui se répercute dans mes bras fait un mal de chien, mais je ne dis rien et je réessaie par fierté. Après trois coups, la porte cède à l'endroit des coups. J'ai tôt fait d'agrandir l'ouverture avant de jeter un œil à l'intérieur. C'est sombre, mais j'ai vu pire. Je me laisse patienter quelques minutes pour voir si un cadavre en grève déciderait de se ramener grâce au vacarme, mais personne ne vient. Ni mort, ni vivant. J'entre.

L'endroit est enseveli de poussière, malgré tout, quand je m'habitue à l'éclairage restreint, j'écarquille les yeux. J'y crois pas. Pincez-moi, je rêve. Je regarde Aaron fébrilement. Le sourire qu'il me fait m'assure que c'est bel et bien ce que je vois.

Malgré les étagères renversées, la saleté environnante et l'aspect abandonné des lieux, je reconnais ce genre d'endroit pour y avoir passé des heures. Il s'agit d'un magasin de fournitures artistique. Je ne sais pas quoi dire.

- Pourquoi tu m'emmènes ici ?

Évidemment, ce ne pouvait pas être gentil. Aaron ne relève pas mon ton exécrable :

- C'est mon coup de main à moi pour ton atelier.

Je le regarde sceptique.

- Pourquoi tu fais ça ? J'ai rien demandé et tu as sans doute autre chose à faire de plus important.

Il me sourit.

- Parce qu'il faut bien se rendre service dans un groupe. En plus, j'ai hâte de savoir ce que tu sais faire.

Je le regarde quelques instants, ne sachant quoi répondre. Finalement, je baisse timidement les yeux. Je ne pourrai pas lui cacher plus longtemps que ça me fait plaisir, je le sais. Alors, pour m'éviter tout embarras, je me détourne, prends audacieusement un panier de courses près de la porte et m'engouffre dans les allées. Je l'entends crier derrière-moi en riant :

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