A vos marques. Prêts ? Tuez

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PDV Alicante

Désespoir, tristesse ou colère ? Je ne saurais dire laquelle de ces émotions prime sur les autres. Un tiers désespéré à l'idée de ne pas arriver au bout de ma quête, un tiers attristé par la perte de la Déesse de la Haine et un tiers colérique en raison des émotions qui mitraillent mon torse. Leurs attaques pernicieuses s'infiltrent dans mon cœur, depuis l'instant où j'ai quitté le cabanon. Et je dois bien avouer que ceci est douloureux.

Je me fustigerai bien des heures durant, si mon cerveau ne tentait pas désespérément de trouver une solution.

Mon pied bute dans une racine, manquant de me faire chuter. Pathétique, tout comme l'attirance que j'éprouve pour la version Lumineuse d'Ecclésia. Malgré tout. Diable ! Une telle emprise ne devrait pas exister ! Rien ne devrait se moquer de l'ancestrale répulsion qui oppose Obscur et Lumineux !

Un raz-de-marée de Haine jaillit de mes paumes sous forme d'étincelles. D'étincelles, et non de flammes. L'attaque insignifiante peine à consumer les hautes herbes qui enlacent mes chevilles.

Je m'arrête net. Déjà physiquement diminué par les fragments d'Épée, me voilà psychiquement affaibli par une Lumineuse.
J'enfouis mon visage dans mes mains, honteux au possible.

Le rire qui retentit soudain évince le gros de mes pensées. Mon attention se concentre derechef sur le mâle amusé.

— Un problème ?

La contraction de mes poings entraîne celle de mes bras, si bien que deux poteaux de chair, d'os et de sang prolongent mes épaules. J'ignore quelle est sa plus grande peur, mais lorsque je m'approche de son corps tétanisé, je jurerai qu'elle porte désormais mon nom.

— Aucun.

— Pourquoi as-tu ri en lorgnant mes mains ?

Ses yeux s'abaissent sur lesdits membres rouges et nervurés.

— Je me remémorais la plaisanterie d'un proche.

— Qui était ?

Il déglutit.

— Vous n'êtes pas d'humeur à plaisanter.

— Fais-moi part de ta boutade.

Je m'efforce de lui communiquer ma hargne à travers mon regard.

— C'est... mon frère. Il a dit que... un jour, enfin, un après-midi... il est allé voir sa seconde maîtresse, et la première a... elle a... figurez-vous qu'elle a dit que...

Mon sourire le fait taire.

— Tu as malgré tout l'audace de te payer ma tête, commenté-je en m'approchant encore. Pourquoi as-tu ri ?

Agacé, je l'empoigne par le col de sa chemise pour le plaquer contre un mur. Les fissures du bâtiment rudimentaire s'exacerbent, les pieds de la divinité pédalent dans le vide. Ses yeux d'Obscur sali, cependant, expriment une fureur qui contrebalance avec la terreur véhiculée par son corps.

— Pourquoi as-tu ri ? insisté-je en détachant chaque syllabe.

— Ce n'est pas très drôle, raconté de cette façon...

— Réponds-moi !

Mon hurlement impose le silence sur une vingtaine de mètres à la ronde, si bien que les bruits de fond cessent et que des oiseaux quittent leurs nids.

— Vos mains ! Vos mains crachaient des étincelles !

— Nous y voilà, conclus-je, satisfait. N'as-tu pas honte de railler ton Prince ?

Cœur de flamme (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant