Chapitre 7

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  Je suivis Sacha jusqu'à une grande salle au rez de chaussée. Elle était spacieuse et lumineuse et surtout, elle était pleine d'enfants qui courraient, jouaient, criaient, riaient. Je ne connaissais encore aucun de ses enfants et je fus vite perdue lorsque la plupart s'élancèrent vers Sacha pour avoir un câlin. Mon amie rigolait, apparemment aux anges et serrait les enfants contre elle avec joie. Encore sous le choc à cause de suicide de la jeune femme, je préférai me mettre tranquillement dans un coin pour le moment. En m'éloignant, je repérai une petite fille qui attira mon regard. Elle était dans un coin de la salle, si recroquevillée qu'elle paraissait minuscule. Lorsqu'elle releva la tête pour regarder Sacha et les autres enfants, tous plus joyeux les uns que les autres, je la reconnu. C'était la petite fille qui avait découvert le corps. Elle avait les yeux rouges mais sévères, les poings serrés et des larmes pleins le visage. Personne ne faisait attention à elle, alors qu'elle devait être traumatisée, terrifiée par ce qu'elle venait de vivre. J'hésitai un instant à aller la voir. Après tout, j'avais été aussi choquée et terrifiée qu'elle sur le moment et je ne l'avais pas du tout aidé. Au contraire, je l'avais lâchement abandonner ...

- James, ça va ? » Me demanda Sacha de loin. Je hochai la tête puis soupirai. Elle n'avait pas vu la petite et je ne pouvais pas la laisser tomber une seconde fois.

Je pris une grande inspiration et m'approchai lentement de la petite fille. Elle me vit et planta son regard dans le mien. Ses yeux brillaient à présent d'espoir et je compris que je n'avais plus aucune chance de faire demi-tour. Elle m'attendait.
- Bonjour. » Murmurais-je simplement en arrivant à sa hauteur. Elle baissa la tête sans me répondre mais s'écarta légèrement pour me laisser de la place à côté d'elle.
- Dis moi comment tu te sens. » Continuais-je d'une voix douce tout en m'asseyant à côté d'elle sur le sol.
- Je sais pas ... » Répondit elle d'une voix faible, les yeux rivés sur le sol.
- Tu connaissais la dame ?
- C'était ma sœur ... » Sa voix était si faible et si brisée que je crus mal comprendre. Pourtant, au fond de moi, je savais que j'avais bien entendu. La femme qui était morte était sa grande sœur.
- Est-ce que tu as quelqu'un d'autre de ta famille ici ? » Questionnais-je. Pour toute réponse, elle secoua la tête. Soudain, je me sentis terriblement mal. Cette enfant avait perdu sa grande sœur. Cette dernière avait mis fin à sa vie et elle avait abandonné sa petite sœur. C'était si égoïste, si cruelle que je me sentis révoltée !
- Je n'ai plus personne ... » Bégaya t-elle entre deux sanglots. Elle se remit à pleurer et ses sanglots étaient d'une telle puissance qu'elle ne put pleurer silencieusement. Très vite, tous les enfants de la salle se tournèrent vers nous alors que je prenais la petite fille dans mes bras dans un pur réflexe maternelle. Elle me laissa la bercer tendrement, tout en pleurant. Mon regard croisa celui de Sacha, qui semblait mi-triste et mi-fière. Puis ensuite, il croisa celui de Erwan, qui se trouvait à l'entrée de la salle et me regardait. Derrière son masque froid, je pus voir ses yeux briller d'une lueur étrange mais bienveillante. Quand il vit que je l'avais repéré, il partit.
- Tu as encore quelqu'un, tu m'as moi. » Murmurais-je à l'enfant tout en caressant ses cheveux bruns.

Sacha s'approcha de nous et me chuchota qu'elle allait raccompagner la petite fille jusqu'à sa chambre pour qu'elle se repose. Pendant ce temps, elle me confiait la garde des autres enfants présents dans la salle. Je hochai la tête à contre cœur. Je n'avais pas envie de laisser partir cette petite. Mais je savais qu'elle avait besoin de se reposer, comme l'avait dit Sacha. Elles quittèrent toutes les deux la salle et juste derrière elle, Lucas entra.

- Lucas ? Qu'est-ce que tu fais là ? » Demandais-je, soulagée de ne pas être la seule adulte de la pièce.
- Je venais te dire que, avec Erwan, on a rejoint un groupe d'hommes d'ici qui s'occupent d'aller chercher de la nourriture, des médicaments, des vêtements, tout ça pour les survivants. » M'expliqua t-il d'une voix tendre. Mes yeux s'agrandirent d'étonnement.
- Vous allez sortir de l'hôpital ?! » Cette idée me terrifiait. J'avais peur de me retrouver toute seule ici. Même si j'avais Sacha avec moi, rien n'était plus rassurant à mes yeux que la présence des garçons.
- Oui, mais seulement pour quelques heures ne t'inquiète pas James. » Me rassura t-il en voyant que je paniquais.
- Mais il y a des fous dehors ! Des hommes dangereux qui feraient n'importe quoi pour avoir à manger ! » Rappelais-je même si je savais pertinemment que Lucas savais déjà pour ça.
- On est tout un groupe, il ne nous arrivera rien. Je protégerai Erwan et il fera pareil avec moi, on veillera l'un sur l'autre d'accord, je te le promet. » Jura t-il en posant ses deux mains sur mes épaules et en plongeant son regard dans le mien. Ses beaux yeux bleus eurent raison de moi et je murmurais :
- D'accord ...
- Ce qui m'inquiète c'est plutôt toi. » Ajouta alors Lucas en caressant tendrement ma joue.
- Moi ? » M'étonnais-je, sans comprendre.
- Tu tiendras sans nous ? » Je ne sus quoi répondre. Pendant un instant, j'avais oublié à quel point Lucas était attentif aux autres et sensible.
- Je suis avec Sacha, ça va. Je vais bien Lucas. » Mentis-je difficilement. Je n'avais pas pour habitude de mentir, je ne le faisais jamais. En fait, je détestais cela. Je n'aimais pas qu'on me mente et je n'aimais pas mentir. Mais cette fois-ci, c'était différent. Si j'avais dis la vérité à Lucas, il se serait inquiété, je ne pouvais pas le tourmenter avec mes problèmes.
- Bien. » Termina t-il en me souriant. Il me prit dans ses bras sans prévenir et je faillis trébucher en m'approchant de lui. Une fois dans ses bras, c'est comme si le monde autour de moi n'existait plus. Il n'y avait plus de catastrophe naturelle, de survivants, d'hôpital, de suicidaire, d'enfants, il n'y avait plus que Lucas et moi, enlacés.
- On se voit tout à l'heure James. » Me murmura Lucas à l'oreille.

Il me repoussa gentiment puis quitta la salle pendant que Sacha revenait. Cette dernière me regarda avec un grand sourire puis me fit un clin d'œil que je ne compris pas. Elle le vit et leva les yeux au ciel puis elle s'éloigna de moi pour rejoindre un groupe d'enfants qui jouait tout en s'exclamant.

- La petite est dans la chambre en face de la notre, si tu veux aller la voir ! »  

CatastropheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant