Chapitre 9 - Grany - Lyon

7 1 0
                                    

Je marchais d'un pas effréné mais néanmoins silencieux dans la rue encore endormie. L'œil aux aguets, les sens en alerte, je veillai sur chaque mouvement, sur le bruissement d'ailes d'un oiseau, sur le souffle du vent à travers les bâtisses. Tout cela en glissant consciencieusement les tracts dans l'interstice des boîtes aux lettres lyonnaises. Je passais par les petites rues pour éviter les grandes. Malgré ma concentration, mon esprit vagabondait ici et là, ce qui me coûta très cher car j'entendis soudain crier :

- Hier ! Eine Resistant ! Hetzen sie !

Peu importe que je ne connaisse pas l'allemand. En cette époque là, cette langue était synonyme de malheur et d'un ticket gratuit pour le camp de Dachau ou de... Non, pas question de se laisser abbatre, je me battrai pour ma liberté, pour la liberté de tous !

Je me mis à courir. Avant la guerre, je faisais très peu de sport, rechignant à l'effort, je préférais me plonger dans les livres pour m'instruire et me cultiver. Maintenant, mes conditions physiques s'étaient nettement développées mais je ne pouvais espérer semer des gardes Allemands, aryens qui plus est, surentraînés et armés jusqu'au dents. Je réfléchis comme une machine et la solution la plus évidente fut de les perdre dans les traboules... Je courrus plus vite, accélérant mon rythme cardiaque jusqu'au bord de l'explosion tandis que les soldats se manifestaient :

- Schnell ! Schnell ! Ich will diese Mädchen ! Lebend !

Je courrai, toujours plus vite, toujours plus fort, je bifurquai enfin dans la ruelle menant à mon seul secours, je grimpai, je glissai dans les étroits recoins et trouvai ce que je cherchais, un enfoncement... Les soldats retardés par leur lourd attirail peinaient à me rattraper et passèrent comme je l'espérais devant le noir passage sans remarquer quoi que ce soit.

"L'esprit aryen est fabuleux, me dis-je. Obstiné et borné, beaucoup trop. Je ne m'en plaindrai pas".

J'attendis de longues minutes pour être sûre qu'il ne reviendraient pas puis pris le chemin du retour, cette fois-ci, les nerfs à vif.

Une fois la maison atteinte, ce qui me pris un certain temps, je pris la clé, la mis dans la serrure et trouva Lucian assis sur une chaise au milieu de la pièce. Il tenait sa tête entre ses mains, il n'avait même pas enlevé son manteau. Mais j'aurais voulu être sourde quand j'ai entendu cette phrase sortir de sa bouche :

- Ils ont pris Louis... Ils l'ont pris...

Jamais une chose pareille ne m'était arrivé. Imaginez vous sur des rails de chemin de fer, vous savez que vous risquez quelque chose mais le train ne passe pas très souvent. Malheureusement, vous êtes au mauvais endroit, au mauvais moment et le train vous percute sans que vous puissiez faire quoi que ce soit, c'est ce que j'ai ressenti...

- Je vais le chercher !

The Night Of HopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant