Chapitre 8 - Aaron - Belfort

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Je me hâtai avec le plus grand silence dans ma cachette habituelle, l'angoisse fondant dans mes entrailles, la peur s'immisciant dans mon cerveau. Je soulevai le vieux tapis africain et ouvris la trappe de bois.

Je me faufilai dans l'espace exigu qui sentait le vieux parquet et m'accroupis avant de faire un total silence, allant même jusqu'à contrôler le bruit de ma respiration. Les pas se rapprochaient, les lourdes bottes militaires frappaient le sol, faisant ainsi grincer le bois usé par les âges. Ils vérifièrent le premier étage pendant un temps qui me parut une éternité puis se décidèrent à monter le fragile escalier du grenier, je me surpris à prier qu'il craque, qu'ils ne puissent jamais parvenir ici mais la porte s'ouvrit et ils pénètrèrent dans la pièce.

- Kommen, Soldaten, Suchen und Finden !!! SCHNELL !!! Für unseren Führer !!! Heil Hitler !!!

- Heil Hitler !!! repétèrent les soldats.

Je les imaginai, levant leur main bien haut, le bras entouré du brassard nazi, le regard cruel et brillant, assoiffés de sang, juif particulièrement. Je faillis m'étrangler à cette idée et déglutis difficilement. Ils fouillèrent longtemps, longtemps. Si l'angoisse, l'inquiétude, la peur et l'incertitude ne m'habitaient pas, j'aurais pu m'endormir. L'un des soldats souleva le tapis, du moins, je le supposa car j'entendis le bruit du tissu qui frottait contre le sol. À cet instant, j'ai cru que tout était terminé, ça y est, j'allais mourir pour la seconde fois de la journée... Mais la longueur du tapis me sauva la vie, il n'avait pas du tirer jusqu'au bout et n'avait sûrement pas pu apercevoir la trappe, il déposa donc le coin de tissu, mettant ainsi fin à mon calvaire.

- Kein Jude !!!

- Gut, Soldaten !

Ils descendîrent et discutèrent ou plutôt menacèrent Paul dans un français très approximatif puis partîrent enfin.

J'attendis dans le plus grand silence, ce qui dura, selon moi, près d'un quart d'heure pour m'extirper de ma cachette.

Pendant plusieurs minutes, je restai assis, là, les yeux dans le vague, à me remettre de cette... expérience... Longtemps, j'ai regardé à travers la lucarne sans voir quoi que ce soit. Longtemps, j'ai laissé vagabonder mon esprit là où il voulait, laissant ainsi sur place la marionnette assise en tailleur dans le grenier. Longtemps, j'ai rêvé d'une autre vie que celle-ci, un autre corps, un autre esprit... De pouvoir m'évader comme un bagnard d'une prison sauf que la mienne était inviolable car j'était ma propre cellule...

The Night Of HopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant