burger & happiness

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Écoutant sagement la voix de Mali-Koa, j'ouvre la première enveloppe la seconde après l'avoir en main.

Elles sont tellement légères, comme vide, c'est perturbant.

Et effectivement, elles sont presque vides. La première ne contient qu'un bout de papier, sur lequel est inscrit une série de chiffres.

Un numéro de téléphone.

Le sien ? Peut être, je le saurais assez vite car la seconde qui suit, je le rentre dans mon téléphone. Spontanément, j'appelle, mais lorsque j'entends les detonations, je me dis que je devais peut être envoyé un message... Je tourne le papier dans tout les sens, mais ne trouve aucune indication. Je laisse sonner. Au bout de la septième sonnerie, la messagerie se met en route.

- Salut c'est Cameron ! Je suis pas là alors, vous savez ce que vous avez à faire, ahah... Oh, et si c'est Calron, laisse un message et ouvre le 2 !

    Sa voix... La dernière fois que je l'ai entendu, c'était à la télé, un peu avant mon départ pour Boston. Dans la soirée, j'ai fouillé YouTube et Dailymotion de fond en comble pour voir si elle avait fait d'autres reportages, mais non, c'était le seul.

    Mais la vérité était que, même si ce n'était qu'un message pré-enregistré, et que je n'étais pas le premier à l'entendre - d'ailleurs, les personnes l'ayant entendu avant moi ne devait pas comprendre grand chose - cette courte phrase m'avait apporté une immense joie. Là aussi, on peut se rendre compte d'à quel point cette fille peut changer mon humeur en une fraction de seconde.

- Salut Cam... C'est moi, Calum... Ou plutôt Calron ? Enfin... Tu m'as demandé de laisser un message, alors voilà. Ehm... Je vais ouvrir le numéro deux. À tout de suite.

    J'ai hésité à refaire le message, avec ne serait-ce qu'un peu plus d'assurance, mais j'ai raccroché très vite. Je ne dois plus me laisser le temps de réfléchir. Je le répète beaucoup mais je ne dois surtout pas l'oublier. Je ne dois pas échouer.

    J'ouvre alors le numéro deux, et en sors une photo et ce qui semble être une carte de visite bleue.

Andy's burger
Les meilleurs burgers de Boston à prix mini !

    Au dos, l'adresse du restaurant. En plein cœur de la ville. Sur la photo, on voit le restaurant. Une table est entourée.

    Mon sang ne fait qu'un tour, en moins de deux, j'ai mon blouson sur le dos et je suis hors de ma chambre.

    Pendant que je parcourais les rues de Boston, demandant à chaque passant où se situait l'endroit, je pouvais sentir mon coeur palpiter à chaque pas que je faisais, mon impatience grandissant encore et encore. J'étais à deux doigts de la revoir après trois ans. Avoir patienté ces trois années est surement la chose la plus débile mais aussi la plus belle que j'ai faite de ma vie. J'avais attendu, et elle aussi de son côté, et enfin, cette attente arrivait à sa fin. 

    Enfin, une enseigne bleue à quelques dizaines de mètres me saute aux yeux. Andy's burger. L'adrénaline monte et je me mets à courir jusqu'au restaurant. 

    Mali serait fier de moi si elle avait vu la suite ! Je suis entré, et j'ai ressorti la photo. J'ai mis un certain temps à trouver l'endroit d'où elle a été prise, et la bonne table - elles se ressemblaient toutes ! Je me suis assis après avoir remarqué le mot laissé sur la table. 

Elle arrive. Bien joué Calum ;) - Luke

    C'était juste un mot, écrit sur une serviette, mais bon Dieu, vous ne pouvez même pas imaginer ce que ça représentait. Elle allait arrivé d'une minute à l'autre. Elle passerait la porte, dans un tic nerveux, sa main irait se balader dans ses cheveux, et ses yeux parcourraient le restaurant à la recherche d'un visage. Mon visage. Enfin, son regard se posera sur moi, et après... 

    Je ne sais pas trop après. Ce sera la fin, mais en même temps le début. La fin de mon aventure à Boston, la fin du carnet, mais le début d'une nouvelle vie avec Cameron, le début d'une vie d'adultes. Comment appelle-t-on ces moments, quand une chose s'arrête mais qu'une autre encore plus merveilleuse commence ? Je ne sais pas, et c'était le plus petit de mes soucis actuellement. Cameron et moi nous apprêtions à tourner une page de notre histoire, à la tourner ensemble. 

    Je l'ai attendu pendant un certain temps, laissant mon esprit aller à des questions sans importance pour le moment : Comment Luke a mis le papier ? Est-ce qu'un jour je pardonnerai à Michael ? Dois-je mettre Cameron au courant du sale coup de sa meilleure amie ? Et Noa, est-ce qu'il sera un obstacle entre nous deux, comme depuis mon arrivée à Boston ? 

- Calum ? 

    Je me pétrifie. C'est elle, sans aucun doute. L'entendre prononcer mon prénom, c'est comme sentir déjà ses bras autour de moi. 

    Avec de très lents mouvements, je me lève, et finis par la regarder dans les yeux. 

    Et là, c'est comme si une décharge électrique me parcourait de la tête au pieds. 

    Ses yeux, son nez, sa bouche, ses joues,... Elle était là. C'était la même fille que j'ai quitté il y a trois ans, à l'aéroport. C'était Cameron. Petit à petit, le restaurant se vidait, les tables et les clients disparaissaient, il ne restait plus que nous. La terre pourrait trembler en ce moment, je ne sentirai rien. 

- Cameron... 

    Alors c'est ça ? Tout ce que j'arrive à lui dire après trois ans, c'est son prénom ? Il me faut quelques secondes pour me reprendre en main et ré-attérir sur Terre. Un malaise s'installe, ce qui est compréhensible après avoir passé tant de temps sans nouvelle. 

- Oh ! Euh... Assis-toi ! Je finis par dire, me rendant compte qu'elle commençait à devenir gênée par mon regard fixé sur elle.

- Merci... 

    Très vite, je trouve le sujet de conversation le plus minable pour meubler le vide. 

- C'est chouette comme endroit. 

- Je trouve aussi. Luke travaille de temps en temps ici. 

- C'est sympa... Tu veux quelque chose ? 

- Un coca, s'il te plait. 

    Pitoyable, je me sentais pitoyable. Quand je me suis levé pour aller chercher deux coca, j'ai eu l'impression que mes jambes allaient lâcher. 

    Le Calum d'il y a trois ans aurait complètement géré la situation, aujourd'hui je me rends compte que j'ai bien changé. 

    Et c'est cette constatation qui me frappe. Je retourne voir Cameron, enfile ma veste sous son regard incompréhensif et lui dit : 

- On va la refaire, s'il te plait. J'étais vraiment pas dedans. 

- Qu- 

    Je sors du restaurant, disparait de son champs de vision et me secoue les puces. Aller Calum ! Merde quoi. La fille de tes rêves est assise, seule, avec un coca dans un restaurant et tu donnes l'impression que vous vous êtes rencontrés sur un site de rencontre pourri ?! Non, surement pas. 

    J'arrive en courant dans le magasin, croise le regard de Cameron, complètement perdue,... Et maintenant ? 

    Maintenant, je ne réfléchis plus et je laisse pour une fois mon corps agir pour moi. 

    J'avance vers Cameron, lui prends la main et d'un geste doux mais déterminé, l'aide à se relever. Elle se lève, toujours en se demandant ce qui me prenait, et je l'embrasse. Parce que c'est comme ça qu'on montre à une fille à quel point on l'aime. Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour répondre à mon baiser, et je la serre fort dans mes bras, pour ne plus jamais lui laisser l'occasion de filer et jamais dans ma vie, j'ai le souvenir d'avoir été aussi heureux un jour.

    Je me recule en premier et pose mon front sur le sien. 

- Je sais pas toi, mais je trouve ça mieux comme ça. 

    Cameron a les yeux et la bouche grands ouverts, mais finit par rire avant de me serre contre elle à son tour. 

    Quand je raconterai ça à Mali !

reconnected - c.h.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant