[PARTIE II ] Chapitre 13.

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Sur une pointe de colère, j’ai fermé la porte du chalet, avec aigreur. J’enlevai mon écharpe et mon manteau pour les balancer sur la banquette en cuir du canapé en angle avant de me diriger vers la cuisine me prendre un verre. 

―Je n’ai jamais vu une femme aussi véhémente ! a déclaré une voix.

Pour moi, elle était lointaine. Je n’étais absorbée que par le fait de boire un verre. Cette grande cuisine n’était constituée que de placards et celui des bouteilles d’alcool était introuvable.

―Vous trouverez facilement un pichet de jus fait maison dans le frigo du milieu, sur le troisième étage de la porte.

Mais je voulais pas du jus ! Je voulais un verre d’alcool pour me cuiter tranquille dans ma chambre !

Je me retournai vers cette pénible voix, on aurait dit mon ange gardien, assis sur mon épaule droite.

―Mais vous allez vous taire ! tempêtai-je. Nom d’un chien…

Un garçon roux, au sourire Colgate, à l’allure irlandaise. Les reflets de son torse se discernaient assez (trop) bien dans son polo noir. Les yeux en amande. 

Il était assis à table ovale en marbre, en train de parcourir les pages d’un livre de cuisine.

―Vous êtes le cousin mannequin irlandais de Kati ? ai-je lancé.

Il avait l’âme d’un dieu. 

―Non, a-t-il rigolé, flatté. Juste le chef cuisinier, Daniel. C’est vrai que mon père est irlandais, mais ma mère est française.

J’étais étonnée. Un cuisinier français, eh ben ! 

―Alors là, vous m’embouchez un coin. 

Je me suis assise à l’une des quatre chaises de bar en velours. 

―Et qui est la femme véhémente ? a-t-il souri en reprenant son activité.

J’ai baissé des yeux.

―Quelqu’un qui n’aime pas ne pas avoir ce qu’elle désire dans le plus profond de son âme.

Daniel a relevé des yeux. C’est vrai que j’avais parlé à en faire pitié, mais j’étais désespérée. A chaque jour suffit sa peine et bien dans ce cas-là : A chaque jour, suffit mes peines. 

Et je l’étais profondément ! J’étais profondément peinée. J’avais mal au cœur de rester privée de l’amour d’Austin.

Daniel s’est retiré de sa chaise pour prendre place devant la table. Il sortit tous ses ustensiles et posa sa toque de cuisinier sur sa tête.

―Le meilleur moyen d’oublier quelqu’un est de cuisiner.

J’ai cligné des yeux avant d’émettre un bref rire.

―Tout à fait, a-t-il souri. Cuisiner.

―Cuisiner, ai-je radoté, sans certitude. Je pensais qu’il fallait manger de la glace pour couvrir une peine de cœur.

Il a fait « pff » et s’est activé à prendre divers ingrédients : plaquette d’œufs, lait, farine, arômes et pommes.

―Ecoute, ma jolie, manger de la glace pour enfouir le plus bel amour de sa vie : gros bobards ! Ce n’est pas un très bon remède, je connais quelqu’un qui s’est goinfré de six pots de glace au choco avant d’essayer de se couper les veines parce que son copain avait fait la malle avec sa meilleure amie au Japon. Alors excuse-moi, mais non. Manger de la glace, ça fonctionne pas trop. Mais pour alléger son cœur, on peut s’occuper. En faisant quelque chose qu’on aime, genre, en cuisinant. Avec un certain, Daniel.

BREF, j'ai une touche !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant