LITTLE RUSK (Petite Biscotte)

Chapitre 1 : Oup's

Léa

Je suis encore à la limite du retard lorsque j'arrive devant la boutique de prêt-à-porter dont j'ai la gérance depuis tout juste deux mois, mon café dans une main et mon téléphone dans l'autre. Je ne sais pas ce qu'il se passe avec le système de sécurité qui permet de déverrouiller la porte d'entrée, rien à faire elle reste coincée. Je pose mon gobelet, puis mon mobile pour fouiller dans mon sac à la recherche d'une feuille et d'un feutre noir que je garde toujours sur moi. Ça y est, je les tiens ! Je griffonne quelque chose sur le papier, puis je me plante devant la caméra de surveillance. J'agite les bras, et quand je la vois bouger dans ma direction, je me munis de mon plus grand sourire et je lève les mains pour lui montrer mon message.

Après trente secondes, je reprends une position normale et j'attends. Je savoure la vue sur la magnifique piscine intérieure de l'hôtel. Elle donne sur un restaurant et un coin cocooning où nos clients peuvent prendre un verre ou bien dîner à la lueur des bougies et des lanternes disposées çà et là. La température de l'eau de mer qui remplit le bassin est toujours de trente-sept degrés, pour ne pas faire de différence avec celle du corps. Les clients sont nombreux à venir profiter à n'importe quelle heure de la journée de cette ambiance exotique et zen.

— Bonjour, mademoiselle Mallaud, vous avez un problème avec la porte du magasin encore ce matin ?

— Salut, Jim ! Depuis quand tu me vouvoies, toi ? Je ne suis plus ta princesse maintenant ? lui demandé-je en fronçant les sourcils.

Jim est l'un des nombreux agents de sécurité du Cétaï, il fait partie des murs. Il doit avoir dans les cinquante-cinq ans, et dès mon arrivée, je me suis prise d'affection pour lui. Les cheveux grisonnants, il en impose avec sa carrure impressionnante. Son visage est marqué par le temps et les soucis certainement, mais il garde en permanence un regard malicieux qui lui donne une bonhomie évidente. Il fait partie des personnes sur qui je peux compter ici, j'aurais adoré avoir un grand-père comme lui. Il me surnomme « princesse ». Je trouve ça plutôt attendrissant, je le laisse faire. Nous avons notre petit rituel à l'embauche, je lui apporte son café et nous prenons un moment pour discuter ensemble.

Mais ce matin, je le trouve bizarre. En plus de ça, il essaie de me faire un petit signe avec ses yeux que j'ai du mal à décrypter.

— Mademoiselle Mallaud, vous vous rappelez que c'est aujourd'hui que nous accueillons le nouveau directeur, vous savez, le remplaçant de Kaleb ?

En finissant sa phrase, Jim grimace discrètement. Merde, je n'y pensais plus ! Un homme vêtu d'un costume trois-pièces apparaît dans mon sillage, derrière mon collègue. Je relève la tête au même moment et nos yeux se croisent puis se verrouillent à l'instant T. Mon cœur loupe un battement. Alors c'est lui le nouveau directeur de l'hôtel ? Il est super jeune ! Et super... Charismatique ! OK, de prime abord, il ressemble à un homme tout à fait normal : brun, grand, élégant, musclé, barbu, teint hâlé... En plus, il a tout l'attirail de ceux qui suivent les tendances du moment. Cependant, lui, il a l'air... Différent. En quoi me demanderez-vous ? En tout. C'est-à-dire qu'il dégage quelque chose de spécial : la confiance en lui. En fait, il représente tout à fait le genre de personne qui me déstabilise complètement. La preuve, mon café m'échappe des mains, maladroitement. Jim me regarde étrangement en s'approchant de moi pour m'aider à ramasser, tandis que mon futur patron me tend la main en se présentant.