Chapitre VIII : Häagen-dazs et Nutella - Partie 1

255 44 24
                                    


Mark

D'un signe de tête, Jack, qui me suivait de près, m'informe qu'il part à la recherche de son fils. Bon sang, mais pourquoi Kaleb a-t-il eu ce comportement ? Je ne pensais pas qu'il était intéressé par Léa. Et j'étais à mille lieues de me dire que c'était réciproque ! Kaleb et moi avons souvent été en concurrence en ce qui concerne la gent féminine. Oui nous sommes comme des frères, mais sur ce point-là, je dois reconnaître que j'aurais dû mettre les points sur les « i » bien avant. J'ai toujours eu l'impression qu'il était un peu envieux de mes fréquentations, je l'avais bien remarqué. Pourtant, j'ai laissé pourrir la situation, sans jamais recadrer les choses. Je me disais que ce n'était qu'un petit jeu sans importance entre amis qui se calmerait avec le temps. Je me suis trompé. Je vais devoir régler ça au plus vite avec lui, mais je dois d'abord laisser ma colère retomber.

Des images de la scène que nous avons partagée avec Léa une demi-heure avant plus tôt me reviennent par flashs. J'essaie tant bien que mal de les chasser de mon esprit, en vain. Cette femme est incroyable. Incroyablement belle et désirable. Mon esprit divague un peu trop, je dois me reprendre. Je sais très bien que ce que j'ai vu n'est pas le reflet de la réalité. Je sais que Léa n'est pas du tout attirée par Kaleb et qu'il y a certainement une explication à ce qu'il vient de se passer entre eux. Pourtant, un plan diabolique se dessine dans ma tête. Je décide de la suivre et de faire en sorte de régler le problème une bonne fois pour toutes.

— Hey, où tu vas comme ça ? lui demandé-je en l'attrapant doucement par le bras.

Je ne veux pas aller trop loin, ni lui faire peur. Elle se retourne vivement, le visage fermé. Je ne m'y attendais pas. Elle me dévisage, elle est d'une beauté époustouflante. Elle me coupe le souffle. Je me reprends pourtant, souhaitant au plus vite exécuter ma difficile mission.

— Oublions ce qu'il s'est passé entre nous, c'est mieux ainsi, parviens-je à articuler en la regardant droit dans les yeux.

Elle ne paraît pas surprise de ma demande. Cependant, une profonde tristesse voile ses magnifiques yeux au moment même où je prononce cette phrase.

— Très bien, répond-elle seulement en baissant la tête, mais sache que...

— Écoute Léa..., la coupé-je.

Je m'approche d'elle pour que mes prochains mots aient plus d'impact et pour la forcer à me regarder dans les yeux. Elle recule machinalement.

— NON ! crie-t-elle, résolument. Toi écoute, c'est moi qui parle ! Il ne s'est rien passé avec Kaleb, quoique tu puisses en penser, d'accord ? Rien du tout et il ne se passera jamais rien ! Maintenant, je sais que tu ne me crois pas, mais tant pis, au moins c'est dit et tout est clair. De toute façon entre toi et moi, ça n'aurait jamais pu marcher. Tu te serais empressé d'aller voir ailleurs à la moindre mini-jupe trop courte qui passerait devant ton nez et...

— Hé, pas si vite, on se calme là, interviens-je brusquement. Remettons les choses dans leur contexte et cesse de m'accuser de ce que toi tu viens de faire sous mes yeux, Ok ?

Voilà. J'ai laissé parler mes sentiments. Je n'aurais jamais dû lui dire cette dernière phrase, en tout cas pas de cette façon. Elle me dévisage, outrée par mes propos.

— Apparemment, tu ne m'as pas écoutée, prononce-t-elle tout bas.

Elle semble lasse, épuisée. Je suis à deux doigts de profiter de sa tristesse et la déception qu'elle ressent dorénavant à mon encontre pour lui asséner le coup de grâce. Elle m'en veut de ne pas essayer de comprendre ce qu'il s'est réellement passé. De mon côté, je suis certain de sa sincérité, mais je vais utiliser tout ce malentendu pour accomplir ce que m'a demandé Jack : à tout prix m'éloigner de cette femme. Léa prend déjà beaucoup trop de place dans ma vie, malgré la distance que je veux absolument instaurer entre elle et moi. Moi qui suis un homme pragmatique, sur ce coup-là, Jack m'a fait prendre conscience que certains sentiments commencent à s'insinuer dans cette relation que je ne voulais que professionnelle. Je joue avec le feu en continuant sur cette lignée.

Mon long silence parle pour moi. Et je m'efforce de ne pas le briser. C'est à elle de stopper la conversation. Il faut qu'elle pense que je suis un de ces petits cons qui ne comprend rien à rien. Ma décision est prise, c'est désormais exactement l'image que je veux lui donner de moi. Je rentre dans mon rôle tant bien que mal. Je me fais violence pour ne pas la regarder dans les yeux. Dans ma tête, je me répète qu'au vu du job qui m'attend, c'est la seule façon de la protéger. Qu'elle se détache complètement de moi, qu'elle me déteste, qu'elle s'éloigne. Définitivement.

Elle cherche mon regard fiévreusement, en ouvrant sa bouche en un « Ô » d'étonnement et de douleur. Je reste muré dans mon mutisme, visage fermé. Elle va réagir dans trois..., deux..., un...

— Espèce de connard !

Zéro ! Elle continue :

— Ah, ça y est je vois clair dans ton jeu ! Vous vous êtes bien éclaté, Monsieur le Directeur ? En fait, tu t'es tapé la petite vendeuse et maintenant qu'elle ne te sert plus à rien et qu'elle a mis la zizanie dans ta si « sincère » amitié avec le fils du patron, tu prends le moindre prétexte pour t'en débarrasser c'est ça, n'est-ce pas ?

Elle s'arrête ici, à bout de souffle. Elle n'arrive même plus à pleurer. Je sais qu'en la laissant déblatérer et dans l'ignorance, ou plutôt dans la conviction qu'elle a tout compris, je gagne la partie. Je vide mon regard de toute émotion. Je me blinde. Je ne la contredis pas.

— Tu ne dis rien ? MARK ? Réponds au moins, non ? !

Voilà, elle est dans la phase d'énervement. Dans la dernière phase de la rupture psychologique. C'est bientôt la fin de cette conversation à sens unique.

— C'est bon, stop, c'en est trop pour moi, je n'en peux plus ! Encore heureux que l'on n'ait pas consommé toi et moi, parce que ce soir, quand je serai au fond de mon lit en train manger un pot de Häagen-dazs et que je me remémorerai tout ça, je n'irai que jusqu'à me traiter de petite conne et pas plus ! Par contre, si on avait été plus loin, j'aurais dévoré en plus de tout ça, un pot de Nutella entier et je me serais insultée de tous les noms ! Mes poignées d'amour sont saines et sauves, Dieu merci !

Elle rentre dans une sorte d'autodérision forcée. Cette fille est délicieusement folle, elle me surprend de jour en jour. Je me force à ne pas rire, je sais qu'elle utilise l'humour pour se protéger. Je la laisse continuer :

— À partir de maintenant, monsieur Le Directeur, nous n'aurons que des rapports professionnels, rien de plus. Je ne veux plus avoir affaire à vous, hormis pour des choses qui concernent la boutique. Et je vais faire en sorte de partir d'ici le plus rapidement possible et de trouver un autre job !

En disant cela, elle m'assène le coup de grâce. Je m'attendais à ce qu'elle veuille s'en aller, mais pas aussi rapidement. Je m'efforce de ne toujours rien répondre. Je la laisse entrer dans sa chambre, il faut que je sorte de son champ de vision. Je l'entends respirer fort, elle ne tient plus quand je me trouve près d'elle. J'ai réussi mon coup, elle me déteste, elle ne veut plus me voir, elle ne supporte même plus ma présence.

................................................................................................................................................

Alors qu'avez vous pensé de ce début de chapitre 8 mes p'tits sucres ?

LITTLE RUSK (Petite Biscotte)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant