Chapitre XII : Contrepartie et tutti quanti - Partie 1

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Léa

Il sait tout de moi aujourd'hui. Lorsque nous sommes embrasés (parce que oui, c'est le mot, nous étions en feu), il a devancé mes désirs les plus intenses. Il a fait de moi une véritable femme. Une femme qui assume son corps, une femme fatale parfois. J'ose tout avec lui, je n'ai aucun complexe. Ces quelques heures m'ont permis de découvrir un homme droit et honnête derrière cette carapace de quelqu'un qui paraît au prime abord si « je-m'en-foutiste ». C'est un genre qu'il se donne pour ne pas qu'on l'amène à se dévoiler. Pourtant c'est ce qu'il vient de se produire. Il m'a avoué des choses qu'on ne m'avait jamais dites jusqu'alors.

Je me doutais bien qu'il avait un cœur, mais je ne pensais pas qu'une partie m'était attribuée. Lorsque ces mots sont sortis de sa bouche, j'ai failli me retourner pour voir si c'était bien à moi qu'ils étaient destinés. Et pour le reste... Autant dire que je ne savais pas qu'il était possible de faire aussi bien l'amour. Sans prétention ni calcul, il a juste écouté mes émotions. Il a été attentif aux frissons qui traversaient mon corps au moment où il me caressait, à mes gémissements lorsqu'il m'embrassait. Il a parfaitement su maîtriser ses propres envies pour me donner du plaisir en premier lieu.

Je le soupçonne de savoir lire dans mes pensées. Il paraît que faire l'amour avec l'autre permet de provoquer l'explosion des sentiments. Mon problème, c'est que je sais maintenant que je suis complètement folle de cet homme. Même s'il y a une zone d'ombre sur notre relation, je sais que ce que je ressens pour lui est évident. Le fait de me laisser aller à ce que j'éprouve n'est sûrement pas une bonne idée. Toutes mes bonnes résolutions pour lui soutirer des informations concernant mon adoption sont parties en fumée. Je ne m'attendais pas à être confrontée à lui de cette manière. Son visage blessé m'a fait prendre conscience que j'ai peur qu'il lui arrive quelque chose. Bien que je ne sois pas certaine de qui il est, je me doute qu'il ne veut que mon bien. Sinon il ne prendrait pas soin de moi comme il le fait. Enfin, je ne sais pas. Peut-être que je suis en train de me faire avoir. En tous les cas, ce qui est sûr, c'est que mon plan, au final, s'est retourné contre moi. Tant pis. Si c'était à refaire, ce serait sans la moindre hésitation.

Il est plus de dix heures lorsqu'une voiture vient nous chercher. Mark ferme la paillote et cache les clés sous une pierre, près de la porte. Même si un silence règne tout le long du trajet, ça ne m'inquiète pas. Sa main dans la mienne prouve que la magie opère toujours.

— Pourquoi as-tu pris un chauffeur, au fait ? me surprends-je à lui demander.

Il me fixe intensément. Il est déstabilisant.

— Pour brouiller les pistes. Souviens-toi qu'on a essayé à plusieurs reprises de t'agresser Léa.

Oui, bien évidemment. Question bête.

— D'ailleurs, reprend-il en caressant mes doigts distraitement, je ne t'ai jamais interrogée, mais, y a-t-il un élément que j'ignore qui pourrait nous aider à savoir qui t'en veut au point de te poursuivre depuis des jours ?

Je n'y ai pas réfléchi, mais c'est une bonne question. Je ne sais pas si je dois lui dire que j'ai surpris sa conversation avec Jack tout à l'heure. Après ce que nous venons de vivre tous les deux, ce serait peut-être mieux. Je n'arrive pas à savoir qui pourrait en vouloir à une fille comme moi ? Je ne suis ni célèbre ni fortunée. Je n'ai pas de famille et...

— Oh, crié-je à en faire sursauter Mark et le chauffeur.

— Quoi ? Tu te souviens de quelque chose, un détail important peut-être ?

— Ma broche, continué-je, je l'ai perdue depuis l'agression.

— Et ? Tu y vois un rapport ? m'interroge Mark.

— Non... Enfin, je ne sais pas, hésité-je, mais c'est un détail dont je ne me souvenais plus et qui m'a paru, sur le coup, possiblement important. Je suis désolée si...

Heu... Je ne sais pas pour vous, mais moi je viens de réaliser à l'instant que mon agression est probablement liée à mon adoption. Entre la conversation que j'ai entendue et le fait que mon assaillant m'a certainement dérobé ma broche, ça concorde plutôt bien. Ou en tout cas en partie.

— Ne soit désolée de rien, Léa, me coupe-t-il en me saisissant les mains. Je ne sais pas si ton information peut nous aider, mais tout est important.

— Mais qui êtes-vous Mark Vaughn ? Un agent secret ? lui demandé-je en riant, sans pour autant oublier que ça pourrait être plausible finalement.

Si c'est le cas, tout s'explique. Il pique un fard, semblant gêné par ma remarque. Je ne suis pas si loin de la réalité que ça apparemment.

— Mark ? Ça va ?

— Heu... Oui, oui. Dis-moi, change-t-il de sujet, ta broche, elle vient d'où ?

— De ma mère. C'est tout ce qu'il me reste d'elle.

— Je suis désolé, je ne savais pas...

— Oh non, non, ne le soit pas je ne la connais même pas ! lui réponds-je du tac au tac pour le rassurer et pour étudier sa réaction.

Il ne cille pas.

— Comment ça ?

— Et bien..., commencé-je à vouloir lui expliquer.

— Vous êtes arrivés, intervient le chauffeur.

Dommage, j'étais prête à lui tendre une perche. Nous sortons de la voiture en essayant d'éviter les gouttes pour rejoindre l'hôtel. La pluie est de nouveau parmi nous. Dans le Hall, Jack nous saute dessus.

— Où étiez-vous donc passés vous deux ? Nyna et moi étions inquiets !

Mark me fait face et me chuchote :

— J'ai à parler à Jack. Seul à seul.

Je commence à faire une moue de mécontentement, mais il me rassure.

— J'ai confiance en toi Léa, mais je ne peux vraiment rien te dire de plus pour le moment. Je te promets que...

— Tss, tss, tss pas de promesses en l'air, lui chuchoté-je compréhensive. Aller, file régler tes... Trucs avec Jack. Je suis dans ma chambre avec Nyna, si tu me cherches.

Je l'embrasse au vu et au su de tout le monde. Je me fiche du qu'en-dira-t-on maintenant. Jack nous observe du coin de l'œil avec son air paternel de désapprobation. J'ai envie de lui tirer la langue telle une gamine en guerre contre son père, mais je m'abstiens. Je m'apprête à me diriger vers l'ascenseur en regrettant déjà mon mouvement sentimental. C'est sans compter sur Mark qui, à grandes enjambées, s'approche de moi.

Je reste muette face à sa détermination et je fais bien puisqu'il décide de m'embrasser à son tour fougueusement, comme dans les films, pour signifier à tout notre petit monde que dorénavant nous sommes deux.

Son baiser attise la braise en moi qui ne s'est pas éteinte depuis ce matin. Chaque fois que cet homme s'empare de mes lèvres, mon cœur explose. Je n'étais jamais tombée amoureuse. En fait, je crois que je ne savais pas ce que c'était avant qu'il ne me fasse l'amour sur la plage il y a quelques heures. Ou peut-être même avant de le rencontrer. Et je pense que je ne le serais jamais plus de cette façon. Je ne saurais dire à quel moment notre relation a changé.

Comment sommes-nous passés de simples collaborateurs à amants ? Comment nos sentiments, dans ce laps de temps si réduit, ont pris une ampleur aussi folle ? Oui, ce matin a été un saut dans le vide pour nous deux, sans filet. Avant ça nous étions seuls, chacun de notre côté. Forts certes, mais pas inatteignables. Maintenant, je suis certaine que ce que nous éprouvons l'un pour l'autre est réel et n'est pas qu'attirance. Quelque chose d'unique, de plus beau, de plus sain, nous lie. Quel sens lui donner ? Pour l'instant, je préfère rester silencieuse. Parfois, les mots sont insuffisants.

LITTLE RUSK (Petite Biscotte)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant