Quatre mois plus tôt, 29 Septembre, 19h 58
Je me mêlai à la foule sans jamais quitter ma cible des yeux. Je tentai du mieux que je pouvais de ne pas me faire remarquer par le jeune homme roux. Il se mit alors de côté et pénétra dans une des sombres ruelles étroites du quartier de Bronx. Je le suivis sans hésitation avec des pas aussi silencieux que la mort.
Paranoïaque, il regarda autour de lui d'un air inquiet mais il ne me remarqua pas. Il continua à s'engouffrer dans la petite ruelle tortueuse et en un instant il se retourna un couteau à la main et cria d'une voix vacillante :
"Je- je sais que quelqu'un est là. Où- où êtes vous ?" bégaya-t-il
Il eut pour seule réponse le silence de la nuit, il continua alors "S- sortez où je n'hésiterais pas à vous blesser" menaça-t-il
Je sortis alors de l'ombre en applaudissant, un sourire amusé dessiné sur le visage.
"Tes parents ne t'ont-ils jamais appris qu'il ne fallait pas parler ainsi à une fille ?" dis-je de manière sarcastique
"A- Avalon. Dis à ton père que j'aurais l'argent à la fin du- du mois" bégaya-t-il à nouveau, les yeux écarquillés
"Premièrement, c'est Calamità pour toi. Personne n'a le droit de m'appeler Avalon. Et quant à l'argent..." je marquai une courte pause puis repris "C'est trop tard."
Il n'eut le temps de prononcer un mot que je sortis mon arme et lui tirai en plein torse
"Oups" murmurai-je avec un sourire sadique avant de me diriger vers mon appartement au centre-ville
J'aimais cette sensation. J'aimais savoir que j'étais capable de mettre fin à la vie d'un être semblable à nous tous. J'aimais cette poussée d'adrénaline qui me poussait à faire des choses sombres et dangereuses. J'aimais savoir que j'étais en position de force.
Dire qu'il y a deux ans, je n'étais qu'un être désespéré qui pensait que l'amour pouvait lui donner goût à la vie. Je pensais sincèrement que l'amour pouvait faire de moi une personne plus forte et qu'il me permettrait de ramasser les pots cassés. Mais je ne fis que me blesser le bout des doigts en tentant de ramasser les éclats de verre. Son image me vint soudainement à l'esprit.
Enzo. Son prénom laissait un arrière-goût amer dans ma bouche et une acidité agonisante au ventre. Je pensais pouvoir le changer, je pensais que l'amour que je lui avais jadis offert suffirait pour étouffer sa peine mais j'avais tort. Il est parti. Et j'ai changé.
Il me manquait. Il me manquait lorsque j'allais me coucher chaque soir dans ce même lit grand et froid. Il me manquait lorsque j'étais plongée dans l'obscurité et il me manquait encore plus lorsque la fête battait son plein. Il me manquait lorsque sa chanson préférée commençait à jouer et que je pouvais presque le sentir sur mes lèvres. Il me manquait, chaque jour, chaque minute, chaque seconde. Il me manquait affreusement mais cela ne signifiait pas que je voulais de lui à nouveau dans ma vie.
Il m'avait détruite. Il avait débarqué dans ma vie et s'en est allé après avoir semé une tempête. Il m'avait anéanti. Et je pense qu'au fond, c'est ce qu'il désirait le plus. Enzo n'a jamais été le genre d'homme qui pouvait aimer, j'étais simplement bête et naïve pour y croire.
Mais cela n'avait aucune importance à présent car j'étais devenue l'une des plus grandes tueuses à gage de New York. En deux ans, beaucoup de choses ont changées. J'ai réalisé que la meilleure manière de ne pas avoir le cœur brisé était de faire semblant de ne pas en avoir. J'étais, en effet, devenue sans cœur. Et j'adorais ça.
Je n'étais plus la proie mais la chasseuse. J'avais les cartes en main et j'étais la seule maîtresse de mon destin. Mais avant tout, je comptais détruire Enzo Vescovi. Le seul problème était qu'il avait disparu sans laisser de trace. J'avais passé les deux dernières années à le chercher dans le seul but d'assouvir ma vengeance mais il s'était envolé, ne laissant rien derrière lui, comme s'il n'avait jamais existé.
"Tu penses encore à lui, n'est-ce pas ?" demanda une voix
"Qu'est-ce que tu fais là, Jonah ?" répondis-je avec un ton plein d'animosité
"La porte était ouverte. Tu devrais penser à la fermer, Calamità, tu as beaucoup d'ennemis" dit mon frère en se servant un verre d'eau
"Je sais" répondis-je brièvement
"Tu n'as toujours pas répondu à ma question" dit-il d'un air taquin
"Quelle question ?" répliquai-je ennuyée
"Tu penses encore à lui. Je le vois dans tes yeux, tu n'as pas à le nier. Tu dis vouloir le trouver pour te venger mais nous savons tous les deux que Enzo-"
"Ne prononce surtout pas son nom ! Si tu es venu pour réveiller les démons du passé alors je te conseille de t'en aller Jonah" criai-je
"Ce n'est pas mon intention, Avalon. Je veux simplement t'aider. Il a disparu, rien ne sert de le chercher, il ne reviendra pas" dit-il d'un ton doux et réconfortant
"Sors." dis-je calmement
"Ava-"
"J'ai dis SORS !" criai-je cette fois-ci
Jonah ne dit rien. Il se contenta de mettre sa veste et de se diriger vers la porte tout en passant une main dans ses cheveux couleur ébène. J'observai sa silhouette imposante quitter la porte et une fois parti, je lâchai un long soupir.
Peut-être qu'il avait raison mais je ne pouvais pas m'arrêter dans mes recherches. J'avais un sentiment qui me disait que Vescovi et moi nous nous rencontrerons à nouveau. Et que cette fois-ci, j'aurais le dernier mot. Mes doigts tremblants jouaient avec mon pendentif et retraçaient l'écriture 'Per Eternità'. Je soupirai à nouveau et décidai d'aller me doucher.
Je sortis de la salle de bain et entrai dans ma chambre en me séchant les cheveux. L'air frais d'automne m'accueillit et je frissonnai instantanément. Je me dirigeais alors vers la fenêtre afin de la fermer et ce fût à ce moment là que je remarquai que quelqu'un se tenait en bas du bâtiment. Je plissai les yeux afin de reconnaître la personne, en vain.
L'homme portait un long manteau noir et de grandes lunettes sombres qui cachaient la moitié de son visage. Sa mâchoire était carrée et je pouvais apercevoir un tatouage sur la base de son cou : des chiffres romains. Il avait un briquet à la main droite et une montre au poignet gauche. J'avais vu cette montre auparavant...
Mon esprit tenta de se remémorer où j'avais bien pu voir cette montre avant et quand je me souvins enfin, je lâchai ma serviette, écarquillai les yeux et levai le regard vers le visage aux traits délicats de l'homme. L'inconnu enleva alors ses lunettes afin de laisser apparaître deux magnifiques perles couleur ambre. Ces mêmes yeux avaient voyagé le long de mon corps plus d'une centaine de fois et avaient admiré mon âme à chaque moment possible.
C'était lui.
Enzo.
VOUS LISEZ
Eternità
Teen FictionEternità - nom (origine italienne) temps infini, durée sans début ni fin Deux ans plus tard, tout a changé. Tandis qu'Enzo refait son apparition dans les ruelles sombres de New York, Avalon, elle, est le seul véritable danger qui rôde dans la vill...