« Ca fait mal de vivre sans se souvenir de ce qui nous a rendu heureux la dernière fois. »
Après.
Niall avait trouvé par hasard le cellulaire de Harry et il n'avait pas pu résister à l'envie d'y jeter un coup d'œil. Il ne l'avait pas tout à fait trouvé par hasard d'ailleurs puisque l'irlandais l'avait consulté lorsque le brun était sous la douche, passant à nouveau quarante-cinq minutes dans la salle de bains, chose rare pour Harry. Il était du genre à se laver en vingt minutes et à rejoindre sa chambre, nu comme un vers, avant de choisir la première tenue qui se présentait à lui dans son placard. Mais maintenant, il avait une femme à impressionner. Niall le savait, et une voix lui soufflait que cette femme était Ailis. Il aurait aimé avoir tord mais en consultant les messages du bouclé, il constata qu'il avait raison. Les derniers SMS échangés avec elle étaient très brefs et amicaux mais souvent, la blonde lui proposait de passer chez elle et cela fût insupportable pour Niall. Parce qu'il venait d'apprendre que sa petite-amie était sortie de l'hôpital mais surtout, que sa petite-amie n'était peut-être plus sa petite-amie. Et la colère s'empara de lui.
Il resta près de trois heures dans sa chambre à essayer de chasser ses pensées de plus en plus oppressantes avant qu'il se décide à intervenir. Il ne pouvait pas rester une minute de plus bloqué entre ces murs en se demandant ce qu'il se passait entre Harry et Ailis. Cette situation était en train de le tuer. Après trois mois de thérapie, Ailis avait revu la lumière du jour. Elle avait sans doute eu avoir le diagnostique de sa maladie et on l'avait jugé apte à reprendre le cours de sa vie. « Foutaise ! », hurla le blondinet en prenant le volant jusqu'à chez elle. Parce que le cours de sa vie, c'était Niall et Ailis avait décidé de l'exclure. Elle avait Harry maintenant et le brun devait se réjouir d'être le premier choix. Cela n'était jamais arrivé jusqu'à présent. Si Harry était mis en avant dans sa carrière, il ne pouvait pas en dire autant de sa vie privée. Et malgré la rage qui s'était emparé de Niall, il ne put s'empêcher d'être à la fois triste et heureux pour son meilleur ami. Parce que Harry avait trouvé une femme qui pouvait le rendre heureux, sans savoir qu'elle serait celle qui provoquerait sa descente aux Enfers.*
Harry avait l'impression de redécouvrir Ailis depuis sa sortie de l'hôpital, huit jours plus tôt. Elle n'avait pas ressayé de l'embrasser depuis ce jour et une ère nouvelle débutait pour eux. Ils étaient plus proches, plus complices. Ils apprenaient à se connaître plus que depuis ces deux ans qu'ils avaient passé à se croiser. Ils partageaient leur passion commune pour les tatouages et certaines villes du monde et trouvèrent l'autre étrange lorsqu'ils abordèrent le sujet du sport ou de la musique. Si tous deux aimaient le rock, on aurait pu comparer leur relation à celle des Stone et des Beatles. Mais ils appréciaient la présence de l'autre. Ailis, parce qu'elle n'avait pas le courage d'affronter les regards lourds de sens de ses parents. Harry, parce qu'il retrouvait tout ce qu'il aimait chez la jeune femme, tout ce qu'il pensait avoir disparu avec son internement alors que l'inverse s'était produit. Ce passage à vide laisserait toujours une marque dans sa vie mais maintenant dehors, elle voyait l'effet bénéfique des thérapies de groupe et de la confiance qu'elle avait pu acquérir en parlant devant une assemblée. Elle se sentait toujours inintéressante et trouvait qu'elle n'était pas assez jolie pour être amie avec le bouclé mais elle continuait de l'être, malgré tout. Il lui apportait sa dose de bonheur pour la journée à chacune de ses visites et lui, il aimait tout simplement être avec elle. La vraie Ailis. Celle qui était complexée et détruite mais qui continuait de sourire, qui riait sincèrement et entreprenait des activités plus farfelues les unes que les autres. Elle était vraie, bien que brisée. Et cet après-midi, elle avait entreprit de ranger sa chambre en compagnie de Harry. Après avoir coupé ses longs cheveux blonds pour arborer un carré plutôt court, elle voulait s'attaquer à son espace personnel. Depuis son départ pour l'hôpital, ses parents s'étaient débarrassés de tous les objets potentiellement dangereux. Il était temps pour elle de continuer ce tri vers une nouvelle vie, plus saine et moins tumultueuse.
Harry avait vidé tout ce qui se trouvait en hauteur et avait étalé l'ensemble sur le sol, laissant à Ailis le soin de tout trier. Deux caisses transparentes étaient étiquetées. La première, pour ce qu'elle voulait garder. L'autre, pour ce qu'elle jetterait. Mais face à sa boite à souvenirs, elle hésita longuement. Assise en tailleur sur le sol de sa chambre, elle ne savait pas où est-ce que l'objet en question devait reposer : Dans sa chambre, en haut d'un placard trop grand pour elle ? Dans sa chambre, sous son lit, là où elle pourrait le retrouver en cas de baisse de moral ? Dans la cave de l'immeuble, loin de ses yeux et de son cœur ? Ailis soupira, attirant l'attention du brun. Harry regarda de loin la boite dans ses mains avant de s'avancer vers le corps fluet de la blonde. Il toucha sa nuque dégagée et prit place derrière elle, collant son corps contre le sien. Ailis se laissa faire, trop absorbée par l'avenir qu'elle imaginait à la boite à souvenirs.
- Il y a quoi dedans ? L'interrogea le musicien, espérant faire pencher la balance d'un côte ou de l'autre.
- Pas mal de choses. Des billets de concert, des tickets de train, d'avion, et des trucs dans le genre. Des photos aussi, je crois. Beaucoup de moi, surtout. L'ancienne moi.
- Celle qui avait les cheveux longs ?
Ailis hocha la tête, remerciant silencieusement Harry de toujours trouver les bons mots. Et Ailis se mit à trouver la vie sacrément injuste. Parce qu'elle avait Harry à portée de main, qu'il était tout près d'elle et que lui l'aimait mais son cœur à elle ne battait que pour Niall. Elle aurait aimé être amoureuse de Harry –elle en rêvait- mais elle ne l'était pas. Et à cause de ça, elle serait toujours la femme qui briserait son cœur.
La blonde soupira à nouveau et tendit la boite à Harry, lui soufflant un « Ouvre-la ». Le brun obtempéra et découvrit en premier lieu un cliché d'Ailis près d'une fontaine. « L'Italie », pensa-t-il immédiatement. La photographie avait été déchirée puis scotchée pour réparer les dégâts d'une crise de nerfs mais l'emprunte du chaos restait là, bien visible. Harry se souvenait de la photographie tout simplement parce qu'il avait en avait été le photographe.
Au début de la carrière de One direction, la jolie blonde avait accepté de suivre le groupe lors de leurs déplacements. Ses cours n'étaient pas une priorité et lorsqu'elle avait parlé de son envie de découvrir le monde à ses parents, ils n'avaient pas pu lui interdire. Elle n'avait que dix-sept ans mais son envie de voyager était un héritage de ses parents. Depuis son plus jeune âge, elle les voyait absents, toujours en train de courir pour dégoter des contrats qui leur permettaient de vivre aisément. Ils avaient vu en ce voyage de trois mois une opportunité culturelle et l'occasion d'apprendre de nouvelles langues. Ce qu'il se produit. Alors que le boysband enchaînait les plateaux télé et autres interviews, Ailis avait pris des cours. De français, un peu. D'italien, surtout. Et ils s'étaient retrouvés à Florence, à arpenter les rues tels des touristes, leur appareil photo braqué sur les monuments célèbres de la ville. Jusqu'à ce qu'Ailis découvre une fontaine qui lui rappelait Rome et qu'elle supplie Niall de se joindre à elle pour une photo. Harry s'arma de son appareil. Cinq, quatre, trois, deux, un, smiiiiile. C'était dans la boîte.
Le brun avait presque oublié cette photographie jusqu'à ce qu'il tombe sur une autre série de clichés et qu'il se rende compte que c'était à ce moment-là qu'il était tombé amoureux d'Ailis. Lorsqu'il avait visé son visage avec son objectif et que son sourire avait inondé ses nuits, les rendant plus douces.
Harry continua de vider la boite et décolla son corps de celui de la blonde pour présenter tout ce qu'il s'y trouvait. Il n'aurait jamais cru qu'une si petite boite pouvait contenir autant d'objets et de souvenirs. Une fois les tickets en tout genre écartés, il ne resta qu'une dizaine de photographies, quelques enveloppes déchirés et un pendentif qui disait vaguement quelque chose à Harry. Ailis s'en empara immédiatement et fit tourner le médaillon dans ses mains, le détaillant de ses yeux clairs et passionnés.
- C'est un cadeau de Niall, souffla l'irlandaise en guise d'explication.
Mais cela ne suffit pas à Harry. Elle en avait trop dit ; ou pas assez. Jamais de sa vie Harry n'avait vu une femme contempler un bijou de la sorte, hormis sa mère lorsque son beau-père lui avait offert ce qui deviendrait sa bague de fiançailles. Le bijou n'était pas beau en soit, ni même d'une grande valeur mais la raison pour laquelle il avait été offert avait d'avantage d'importance pour Ailis. Cela se voyait aux étoiles qui avaient pris ses yeux en otage.
- Il me l'a payé avec son premier salaire, sourit fièrement la blonde. Son premier vrai salaire, c'était en rangeant le garage de son père quand il avait sept ans mais il m'a offert ce collier après que vous ayez signé chez Sony. Il est rentré en courant chez ses parents, a célébré ça avec eux et après, il est venu chez Sean et il me l'a donné. Ca ne lui avait pas couté cher car au début, on ne pariait qu'à moitié sur vous mais jamais un cadeau ne m'a autant touché. Parce qu'il venait d'avantage de son cœur que de son compte en banque.
Harry s'apprêtait à dire quelque chose lorsque la sonnette retentit dans l'appartement. La mère d'Ailis avait pris rendez-vous chez plusieurs psychiatres dans la journée pour trouver celui qui conviendrait à sa fille et son père avait décidé de quitter l'appartement en voyant Harry arriver. Il ne savait pas ce qu'il se passait entre eux mais il savait qu'Ailis était en sécurité avec le jeune homme. Aussi, ce fût à Harry de laisser Ailis se remémorer de bons souvenirs et à lui d'aller ouvrir la porte d'entrée. Et c'est à cet instant qu'il comprit son erreur, alors que les jointures des mains de Niall blanchissaient et qu'il pouvait presque entendre son cœur cogner fort dans sa cage thoracique.
Harry avala difficilement sa salive et manqua de trébucher sur les chaussures abandonnées dans le hall. Il se rattrapa de justesse au porte-manteau alors que Niall s'avançait dans la pièce, fermant la porte derrière son passage. L'irlandais n'avait rien d'impressionnant. Son corps était moins musclé et moins grand que celui de Harry mais une telle rage était injectée dans les yeux de Niall que le bouclé ne tenta rien. Il baissa la tête, honteux, attendant sa sentence.
- Harry, dit seulement le plus âgé.
L'originaire de Holmes Chapel ne pipa pas un mot. Qu'avait-il à dire pour sa défense ? La cour le condamnerait toujours. Il était coupable. Ailis lui avait peut-être demandé de venir la chercher à l'hôpital mais c'était lui qui avait choisi de taire cette information. Et toutes les autres. C'était lui qui avait raccompagné Ailis. Lui qui avait partagé huit jours de son retour à la maison avec elle. Lui qui avait choisi de cacher les confidences de la blonde, aussi. Elle ne lui avait jamais demandé de le faire. Il avait été le seul à prendre cette décision et bien qu'il risque de perdre son meilleur ami, Harry ne ressentait aucun regret. Parce que depuis huit jours, il était heureux.
- Je peux savoir ce que tu fais ici ? Demanda Niall, ne cillant pas face à la gêne de son ami.
- J'ai retrouvé Ailis.
- Tu te la tapes ?
Harry releva la tête, horrifié que Niall ait pu penser une telle chose. L'irlandais s'apaisa et sa voix fût moins accusatrice, plus douce.
- Tu ne te la tapes pas, en conclut-il, soulagé. Elle est dans sa chambre ?
Le bouclé hocha la tête.
- Elle va mieux ?
Nouvel hochement de tête.
- Tu peux parler, tu sais.
- Je sais, se contenta de répondre Harry.
Niall lâcha un soupir et laissa tomber sa garde. Ce n'était pas un ennemi, ce n'était que Harry. Le garçon trop gentil qui était tombé amoureux de la mauvaise personne. Qui était tombé, tout court. Niall n'avait pas à le réprimander, ni à le punir injustement. L'avenir serait assez malheureux pour le brun. Parce que chaque jour de sa vie, il se rappellerait le moment où il avait touché son but du bout des doigts. Parce que chaque jour de sa vie, il aurait le souvenir douloureux d'Ailis et lui, heureux, avant qu'elle ne disparaisse dans les bras d'un autre. Parce que chaque jour de sa vie, il souffrirait jusqu'à ce qu'il rencontre une autre femme qui le détruira et le schéma se reproduira. Encore et encore. Jusqu'à ce qu'il tombe sur « la bonne » - en supposant qu'elle existe.
- Je suis amoureux d'elle, s'étrangla le bouclé, les larmes prêtent à déverser sur ses joues.
- Je sais.
Mais ça continuait de lui faire mal. De leur faire mal.
- Je suis désolé d'avoir tout fait foirer, reprit Niall, le cœur lourd.
- Elle t'aime toujours, tu sais. Elle t'aimera toujours, répéta-t-il pour lui-même.
Un sourire triste se glissa sur les lèvres de Niall. Oui, il savait.
Ailis pénétra dans la pièce, surprise d'y voir Niall et Harry. Elle lança un regard discret à Harry mais ses yeux cherchèrent surtout à capter l'attention de l'irlandais. Ce qui arriva instantanément. La boucle de Niall s'entrouvrit en découvrant ses cheveux plus courts et sa mine resplendissante. Il avait devant elle une pâle copie de sa petite-amie et le bonheur de la retrouver le paralysa. Il l'aimait à s'en faire mal au cœur et il crut comprendre ce qu'Ailis voulait dire en lui disant cela. C'était un plaisir si coupable et exquis que son cœur et son cerveau livrait une bataille acharnée à l'intérieur de lui-même.
Ailis s'approcha doucement, laissant le temps à Niall de remarquer les changements opérés chez la jeune femme et surtout, toutes les choses qui n'avaient pas changé. Elle portait ses habituels chaussons en forme de lapin qu'elle avait prise une taille en dessous et écrasaient ses orteils mais en les achetant, elle avait expliqué à Niall que « Un tel modèle, on le prend quand il se montre à nous. Même si ce n'est pas la bonne taille ». Et aujourd'hui encore, deux ans plus tard, elle les avait aux pieds. Ailis avait maquillé ses yeux d'un fin trait d'eye-liner et avait mis un peu de rouges à lèvres sur sa bouche, juste ce qu'il fallait pour se fondre dans la masse. Même si Niall ne voyait quelle depuis toujours. Elle portait encore l'un de ses tee-shirt à l'effigie des héros de Marvel et avait opté pour un jeans qui laissait entrevoir ses jambes plus amaigries qu'à son départ. Il sourit tristement en se doutant de sa perte d'appétit mais se promit de lui faire retrouver ses trois kilos en trop en lui achetant sa marque de chocolat préféré. Et alors que son visage était proche du sien, Niall remarqua surtout le manque qui s'était creusé en lui depuis qu'elle l'avait quitté. Avant qu'il ne vienne l'étreindre. Harry baissa la tête, l'éternel perdant cette histoire. Il quitta l'appartement d'Ailis et se promit de ne plus y remettre les pieds. Jamais. Parce que depuis le début, Louis avait raison. Niall et Ailis étaient un poison qui n'était pas nocif pour eux seuls. Et rien qu'eux. Et Harry venait de retrouver sa place de second choix. Toujours le second choix...
VOUS LISEZ
Baisers Salés.
Fanfiction« C’est pas ça, mourir. C’est pas quand on met ton corps sous terre et qu’on pleure sur ta tombe. Ton cœur n’a pas besoin d’arrêter de battre pour que tu crèves. »