question

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Le silence. C'était ce qui semblait les séparer de milliers de kilomètres à cet instant. Ils étaient assis l'un à côté de l'autre sans se prêter un regard, sans même échanger un mot, tels deux parfaits inconnus. Ce n'était pas la première fois qu'ils restaient ainsi sans bruit, pourtant, tout paraissait différent. Contrairement à leurs autres moments fort agréables, celui-ci était glacial et embarrassant. Gauthier savait à la mine de son amie que c'était une de ces mauvaises journées où il ne fallait pas la brusquer. Son humeur maussade correspondait parfaitement à ce temps grisâtre.

Les perles chocolatées de l'adolescent croisèrent pendant peu de secondes les yeux vitreux de la brunette. Il lui suffit de ce contact pour lui enlever toute idée d'engager la conversation. Il se remit alors à regarder ce point imaginaire en face de lui en se tournant les pouces. En repensant à son regard terne, il remarqua qu'il ne discernait plus cette couleur noisette qu'il appréciait tant ni cette once de vie. Et la phrase "les yeux sont le reflet de l'âme" lui vint en tête. Il se dit qu'elle devait vraiment se sentir vide au fond d'elle. Le châtain ne put s'empêcher d'avoir de la peine pour la jeune fille qui avait laissé échapper un soupir. Elle devait vraiment être épuisée...

Jo' mordit sa lèvre inférieure qui tremblait. Elle ramena une mèche sortant de sa queue de cheval derrière son oreille. Et elle se mit à contempler le sang sortir de ses plaies qu'elle n'avait cessées de gratter.

"-Tes mains... Jo' est-ce que ça va?
-Ce que je voudrais c'est qu'on arrête de me poser cette question. Non, ça ne va pas. Peut-être bien que tout va mal mais est-ce vraiment nécessaire de me le rappeler sans cesse? Oui, je suis paniquée à l'idée de monter dans ce fichu train mais qui s'en soucie vraiment? Personne, parce qu'on m'a toujours laissé seule. J'ai toujours été seule.
-Jo' je ne voulais pas... je suis... il la retena par le poignet alors qu'elle était sur le point de s'en aller, furieuse.
-Non, laisse-moi. Tu as déjà assez causé de dégâts comme ça. le stoppa-t-elle en se détachant de son emprise."

À peine avait-elle prononcé cette phrase, qu'elle regrettait déjà ses mots. Elle ne les pensait pas vraiment. Elle les avait dits sur le coup de la colère mais à un moment ou un autre, ça devait tomber sur quelqu'un. Malheureusement, le garçon avait été la goutte qui avait fait déborder le vase.

Encore une fois, ce dernier laissa la jeune fille désemparée se dérober sous ses yeux sans pouvoir l'aider. Il restait encore choqué de ce qui venait de se passer. Il n'avait jamais vu Joyce dans un tel état. L'image de ses pupilles remplies d'autant de rage lui revinrent sans arrêt en tête. Il avait tout gâché. Qu'est-ce qu'il avait été stupide de penser qu'il arriverait à la faire se sentir mieux. Il n'avait fait qu'empirer la situation.

Gauthier observa la scène se déroulant devant lui, même si son coeur paraissait se fendre dans sa poitrine. Joyce avait rejoint un garçon plus grand qu'elle sur le quai d'en face. Ce dernier entoura ses épaules de son bras et ils partirent ensemble, au lieu de prendre son train.

"-C'est pour le mieux. Peut-être qu'il réussira à effacer tous ses maux que moi, je n'ai pas pu."

Deux voies opposéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant