Envoûte-moi ...

Chapitre 15

Nous arrivons dans la bibliothèque. Elle est tout simplement immense, au moins quatre fois la taille de mon appartement, qui n’est pourtant pas petit ! Sans parler du caractère luxueux des ouvrages, qui donne un cachet indescriptible à la bibliothèque ! D’immenses étagères en bois massif sur lesquelles reposent un nombre incalculable de grimoires en cuir véritable, finement reliés et ornés d’enluminures, si beaux et si vieux en vérité qu’ils me semblent impossibles à dater, tant ils paraissent remonter du fond des âges, se dressent devant nous.

— Je… Je peux vraiment feuilleter ces livres ? Ils ont l’air si… précieux et anciens !

— Oui, vous pouvez tout consulter.

— À qui appartiennent-ils ?

— Dante, mais s’ils sont entreposés ici cela signifie qu’ils sont à la disposition du visiteur de ce lieu.

Je m’aventure dans un rayon d’armoires, totalement émerveillée. Ici, tout est gigantesque et je ne sais pas quel édifice saurait être assez grand pour abriter tout ce que j’ai pu voir jusqu’ici. Cette question me brûle les lèvres depuis mon arrivée et me décide enfin à la signifier à voix haute :

— Ce lieu est immense. Où sommes-nous au juste ?

Il hésite un instant et finit par répondre :

— Dans un château.

Je me retourne vers lui, stupéfaite. J’avais certes pensé à cette option, mais je l’ai vite rangée dans la catégorie du grotesque sachant qu’à part ceux que l’on trouve dans les contes pour enfants, les châteaux les plus proches, de nos jours, se situent tous à plusieurs longues heures de route de la ville !

— Un château ? Où ça ?

— En Écosse, laisse-t-il échapper à toute vitesse, comme s’il avait peur de se faire surprendre trahissant un secret.

Alors ça ! C’est la meilleure ! On m’a kidnappée et envoyée ailleurs, mais pas n’importe où : à des centaines de kilomètres de chez moi !

— Et plus précisément ?

— Je ne peux pas vous donner plus d’informations.

J’aurais eu le mérite d’essayer. Bon sang, je n’en reviens pas ! J’ai atterri à des centaines et des centaines de kilomètres de chez moi, chez des vampires, en Écosse !

— C’est toujours pareil ! On me dit des choses et dès qu’il s’agit des informations les plus importantes, vous devenez tous muets comme des carpes ! Vous me fatiguez ! m’indigné-je, excédée. Oh, et puis, je ne vois même pas pourquoi je m’égosille avec vous !

Je lui tourne le dos et emprunte une nouvelle allée. Je ne devrais pas lui en vouloir, ce n’est pas de sa faute, il ne fait qu’obéir aux ordres qu’il reçoit. Ordres donnés par Dante. C’est donc vers lui que doit se retourner ma colère, c’est lui le fautif depuis le début, et depuis son attitude envers moi n’a cessé de susciter mon indignation. Je regarde chaque étagère et chaque tranche de livre. Je ne peux demander d’aide à personne, mon but étant de mener mes investigations le plus discrètement possible. Hélas, certaines inscriptions sur les livres sont dans des langues qui me sont totalement inconnues. Pour beaucoup d’autres ils ne sont explicitement rattachés à aucun domaine d’études, aucune science ni discipline particulière, ce qui rend la tâche d’autant plus ardue. Je finis par prendre des livres un peu au hasard et en feuillette quelques pages. Rien de bien concluant.

Je passe au crible chaque rayon, Mike s’installe sur une chaise les pieds sur une grande table en bois, les bras ballants, la tête renversée en arrière, les yeux fermés. Je ris en le voyant ainsi, ce qui lui fait hausser une paupière pour me regarder. Je lui souris furtivement et replonge mon nez dans les livres. Dans cette position, c’est drôle, car il n’a pas du tout l’air d’un grand méchant vampire sanguinaire. Quand j’y pense, il n’a d’ailleurs jamais été méchant avec moi, seulement, il ne faut pas que j’oublie que c’est un vampire, donc un prédateur dangereux. À ses yeux, je ne suis qu’une humaine, autant dire une poche de nourriture ambulante ; aussi, à ce titre, mieux vaut rester sur ses gardes. Je continue de feuilleter les ouvrages : j’en suis à ma troisième rangée à présent.