CHAPITRE 4

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     Il y a encore quelques années, son avenir était tracé. Il devait être comme il l'avait imaginé et rien n'aurait pu changer cette vision si parfaite. Cependant, l'avenir nous joue des mauvais tours qui n'étaient pas prévus dans le chemin de la réussite, dans le chemin d'une vie.

« L'avenir... »

     Elle faisait toujours cela. Peu importe le patient, elle posait cette question qui selon elle pouvait faire avancer son patient dans la bonne direction. Imaginer l'avenir s'est accepté notre vie actuelle.

« Comment le voyez-vous? »

     Toutefois,l'homme n'était pas un patient comme les autres. Il ne pensait pas comme eux. Sa manière de penser était différente et l'a déstabilisé.

« Je n'aime pas y penser. »

     Qui aimait penser à celui-ci quand tout était bouleversé ? Tousses plans, tous ses projets d'avenir, étaient désormais irréalisables.

« Vous ne pensez qu'au présent ? »

     Peu importe, chacune de ces pensées était bien trop horrible.

« Penser est douloureux. »

     Lorsqu'il regarde son passé, il le regrette. Lorsqu'il regarde son présent,il le hait. Lorsqu'il regarde son avenir, il ne voit que le néant.

« Mais il faut avancer. »

     Ille savait, mais il n'y arrivait pas. Il voulait lui dire qu'il essayait, qu'il faisait de son mieux, mais tout ce ne serait qu'un mensonge de plus. Il avait abandonné, il y a bien longtemps.

« Est-ce obligatoire? »

     Pourquoi lutter ? Il voulait juste se laisser dépérir. Il venait ici que par habitude, parce que c'était la seule chose plaisante qui lui restait dans cette société, dans sa vie.

« Dans la société actuelle, oui. »

     La société actuelle ? Il n'appelait pas ça ainsi, c'était une bergerie. Des moutons suivant scrupuleusement le berger.

« Je n'aime pas notre société. »

     Il se rendait compte qu'il n'aimait pas grand chose, qu'il n'aimait plus grand chose. Autrefois, être un mouton ne le dérangeait pas, sans doute car il faisait parti des moutons heureux.

« Qui l'aime ? »

     Sa question l'avait elle-même surprise. Rares sont les fois où elle osait parler ainsi face à un patient.

« Vous. »

     Elle se devait d'être sincère face à lui. Même si elle aimait son métier, même si, tout comme lui, elle était un mouton, elle n'aimait pas cette machine appelée « société ».

« J'aide les personnes qui ne sont pas bien dans notre société. »

     C'était une évidence. Il le savait.

« Il n'est dit nulle part qu'il faut l'aimer. »

     Il ne pouvait pas dire qu'il était surpris, ou alors l'était-il dans le bon sens du terme. Il n'aurait jamais pensé qu'une femme, telle qu'elle, pouvait ne pas aimer la société. Peut-être ne faisait-il pas assez attention aux personnes l'entourant.

« N'est-ce pas ironique alors ? »

     Un sourire se dessina sur le visage de Jaewon, puis sur celui de la jeune femme.

« Sans doute. »

     Son patient était en train de réfléchir à ce qu'il venait d'apprendre. Finalement, il se livra, se dévoilant un peu plus à la psychologue.

« Je n'arrive pas à imaginer mon avenir. »

     Imaginer son avenir est dur. Il n'y arrivait plus. Sans aucun doute car il l'avait bien trop longtemps idéalisé. Il avait appris à son dépend la douleur que cela provoquait lorsque tout s'écroulait

« Ce n'est pas simple, en effet. »

      Elle devait lui poser une question pour approfondir son aveu, mais elle n'y arrivait pas. Connaître la réponse d'avance l'en dissuadé.

« Comment le voyez- vous, vous ? »

     La première fois. C'était la première fois qu'un patient lui posait une telle question. Aucun n'avait osé. Sans doute, était-ce pour cela qu'elle aimait le recevoir dans son cabinet.

« Sans aucun patient. »

     Un léger rire s'échappa de la gorge du jeune homme. Elle sourit à pleines dents face à sa réaction.

« Vous êtes sans doute la seule à le vouloir. »

     Ça,elle le savait. Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait pas ses collègues qui ne demandaient que plus de patients.

« La société serait alors guérie. »

     Il aimait sa façon de pensée. Il aimait l'intelligence de cette femme qui l'a fasciné.

« C'est beau. »

     Bien trop idéalisé serait bien plus convenable comme réponse, selon elle.

« Voulez-vous guérir ? »

     Elle redoutait toujours la réponse. Pas une seule fois elle avait aimé poser cette question, sans doute car tous les patients répondaient« oui » tout en pensant « non ».

« Peut-être. »

THE ENDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant