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Aurait-il fallu simplement que j'embrasse de ma propre initiative Jonah pour que tout change radicalement ? Pour que tout devienne plus évident ?

En tout cas, sans savoir précisément où j'en suis alors que le tout me paraît paradoxalement plus clair, Jonah et moi semblons nous entendre pour l'instant sur ce point indéterminé où notre relation est posée.

On n'est plus de simples meilleurs amis. Parce que même si des amis ressentent ce besoin d'être ensembles, il n'est pas fort au point à ce que la présence devienne vitale et s'accompagne de désirs. Et puis qualifie-t-on d'amis deux hommes qui n'attendent juste que le monde ne soit qu'à eux seuls pour s'embrasser ?


Quand je sors de la fac, je suis surpris un instant de voir une silhouette inhabituelle ici qui m'attend dehors, une cigarette à la bouche. Un sourire radieux doit se dessiner sur mon visage, reflétant le sien qui a été présent dès le moment où il m'a aperçu. Est-ce qu'au moins mes sourires sont aussi magiques que les siens ?

Jonah salue rapidement les filles qui traînent avec moi, ainsi que deux gars qui ont commencé à sympathiser avec la bande. Peut-être que mon nouveau petit surnom loufoque y est pour quelque chose, à savoir.

– Tu sais quoi ? J'ai fini plus tôt, et je me suis dit que je devais aller voir ta tronche de déterré quand tu sors des cours, me lance Jonah en me tendant une de ses cigarettes.

– Moi, je vois la tienne tous les soirs, ça me suffit bien.

Le brun face à moi déforme son sourire en un rictus, avant de tenter de reprendre sa cigarette. Mais je suis plus rapide et la garde précieusement coincée entre mes lèvres.

– Quelle bande de gamins ! souffle May.

– Tu me fais penser aux vieilles mamies commères qu'on croise à chaque balcon au Portugal, tacle Jonah avant de me faire signe que l'on s'en va.

Je dis rapidement au revoir à mes amis après que Marjo me rappelle qu'elle m'accompagne puisque Gaël l'a invité à dormir. J'avais complètement oublié.

En marchant, je surprends souvent les prunelles vert foncé de Jonah me fixer différemment, vidées de toute la provocation qu'elles arborent habituellement. Derrière son air mystique, je devine une certaine joie.

S'il savait qu'en ce moment même, il me laisse un effet identique... Mon cœur bat à tout rompre, et d'une manière surhumaine, semble accélérer le rythme si jamais son bras ou ses doigts effleurent les miens pendant qu'on marche à côté.



Quand on arrive à l'appart, c'est Gaël qui ouvre et Marjo se jette dans ses bras. Il la fait tourner dans ses bras d'une manière romantique que je croyais seulement possible dans les films. Leur couple est si parfait. Et le mien, si on pouvait l'appeler ainsi, est-il de même ?

Je ne sais pas, parce que tout simplement on se cache avec Jonah. Cela a semblé naturel.

Comment annoncer à nos amis qu'en fait, on est des meilleurs amis qui aiment s'embrasser sur des balcons et sous la pluie ? Comment l'un doit annoncer qu'en fait, les filles qu'il ramenait n'étaient qu'une illusion pour cacher qu'il était gay ? Et comment l'autre doit expliquer qu'il est complètement paumé dans sa vie, et même sur ses choix, mais qu'il est en train de tomber amoureux d'un gars ?

Ce n'est pas bizarre, mais juste pas commun. Du coup, le silence semble nous protéger. Pourtant, n'ai-je pas appris que le silence pouvait aussi tout détruire d'une manière trop dangereuse pour que l'on croie à tort tout contrôler ?



La soirée se passe tranquillement. Zach nous a préparé un repas délicieux, et assis sur les canapés, on écoute Enzo jouer de sa guitare. S'il y avait bien une chose que j'ignorais, c'est que le jeune blondinet que l'on avait recueilli est autant doué pour la musique que pour le chant.

La théorie des montagnes russes - Tome 2.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant