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J'arrive à Paris d'humeur morose. Gaël et Enzo, que je ramenais avec moi, n'ont pas osé prononcer un seul mot du trajet. Même Grizou, dans sa caisse de transport, n'a pas miaulé une seule fois, et n'a ni fait ses besoins pendant le trajet. C'est à peine si mes compagnons ont osé respirer.

Quand j'entre dans l'appartement, je me rends compte que Zach et Jonah ne sont pas encore là. Je me dis tant mieux d'un côté, même si de l'autre, ça m'attriste. En fait, je ne sais pas trop comment réagir. Du coup, je suis encore plus perdu.

Je me suis enfermé dans ma chambre, avec Grizou. C'est lui qui a insisté pour venir. Il est calé contre mon torse tandis que je reste avachi sur mon lit. Je caresse doucement ses longs poils gris d'une douceur extrême, en écoutant ses ronronnements apaisants.

La vie de Grizou paraît simple : manger, dormir, et faire caca dans les voitures. Ça a ses avantages et inconvénients. Mais au moins, ça ne perd pas une nuit de sommeil à réfléchir continuellement sur ses sentiments pour un autre garçon et sur le devenir d'une relation qui semble vouée à l'échec.

Ma porte s'ouvre délicatement plusieurs heures après, et se referme avec autant de soin. Zach m'adresse un petit sourire crispé, et s'avance sur mon lit. Sa main vient se perdre aussi sur le pelage de Grizou, heureux d'avoir toute cette attention.

— Ça te dit un McDo ce soir ? demande mon ami.

Je hausse les épaules. Franchement, pas du tout. Rien que de penser à la bouffe me donne envie de gerber.

— Pas faim. Mais allez-y sans moi.

— Comme tu veux, mon petit Val.

Je lui adresse un regard de remerciement. Parce qu'il me soutient en fait. Même si ce serait plus son style de me faire un grand discours moralisateur sur la philosophie de l'amour et de la haine, Zacharias comprend ce soir-là qu'il ne faut pas trop me solliciter.

— Tu sais que j'ai fait plusieurs heures de route avec un Jonah qui avait un caractère pire que celui habituel ? Tu sais que ça a été dur pour moi ?

Je pince les lèvres en frottant le cou de Grizou. Le problème, c'est qu'à vivre sous le même toit, si comme ce soir, Jonah et moi sommes en froid, c'est toute la colocation qui subit cela, et c'est assez gênant pour eux, je le devine aisément.

— Vous vous êtes engueulés ?

— Ses parents ont appris. Ils n'ont pas eu la meilleure réaction au monde.

— Ah.

Zach se lève en regardant sa montre hors de prix.

— J'ai promis aux deux blondinets qu'on se ferait un McDo ce soir. Mais tu sais quoi, Jonah m'a dit qu'il restait là aussi. Je pense que tous les deux, vous devriez parler. Tu me diras que ce n'est peut-être pas mes affaires, mais ne laissez pas les choses s'envenimer. La vérité, c'est que vous deux, c'est trop beau pour s'arrêter maintenant.

Mes yeux brillent, je le sais. Je baisse la tête, et je sens la main de Zach m'ébouriffer ma tignasse de cheveux bruns, avant de me coller un baiser exagéré sur le sommet du crâne.

— Sois mignon, Valou ! Bonne soirée avec ton Grizou !

Il s'éloigne en secouant la main, et j'entends rapidement la porte principale de l'appartement claquer à son tour. Ils sont partis. Il ne reste que moi et Jonah, et pourtant, je crains des explications avec lui.


Et pourtant, après un quart d'heure d'intense réflexion, je me résigne à aller le voir.

J'avance jusqu'au salon le cœur lourd, craignant tout ce qui va suivre. Ça ne peut pas mal se passer ? Enfin, si. Tout peut mal se passer. Samedi dernier est un assez bon exemple pour cela.

La théorie des montagnes russes - Tome 2.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant