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Jonah n'est pas le meilleur copilote du monde, ça c'est sûr. Mais avec un GPS dont la batterie s'est mystérieusement éteinte dès lors que l'on avait franchi la frontière entre la France et l'Espagne, je n'ai d'autre choix que de composer avec ce que j'ai. Soit le garçon qui m'a assuré un grand « T'inquiète, je fais la route tous les ans, on se débrouille bien en espagnol et je suis en plus bilingue portuguais, il n'y a pas de raison pour que l'on n'arrive jamais ». En fait si, il y a plein de raisons. Parmi elles, celle que l'on soit perdus.

—     Je pense que l'on n'aurait pas dû sortir de l'autoroute, analyse Jonah.

—     Je devais faire le plein Jonah, alors à part si tu voulais pousser la voiture à bout de bras jusqu'au Portugal, on devait quitter cette autoroute. Ça faisait presque cinquante bornes que l'on roulait sur la réserve, je n'ai jamais connu un tel stress avant d'arriver à la pompe.

Si vous voulez un défi pour mettre les couples à l'épreuve, le trajet des vacances est un des meilleurs qui soient. Crises de nerfs, oublis d'objets, crainte de s'être perdus, engueulades sur l'itinéraire à suivre, tout y est pour décourager les plus patients.

Je ne fais pas exception avec Jonah, sauf que l'on arrive à prendre un certain recul et à en rire. Pourtant, on a plus de mille kilomètres à faire pour arriver dans son village portugais perdu, en traversant en plus des pays étrangers. Et connaissant notre degré d'organisation pourri, je laisse imaginer le fiasco.

Je comprends un peu mieux mes parents qui avaient cette petite lueur de crainte en me laissant partir, même s'ils savaient que cela me ferait du bien d'aller chez la famille de Jonah.

Toujours est-il que l'on est partis à six heures du matin, traversé la frontière aux alentours de midi, et depuis, on est là. Enfin "là", je ne sais pas ce que c'est précisément. Une route uniforme, au paysage cramoisi à côté et à la circulation quasi-absente.

—     Tu veux pas qu'on s'arrête sur la petite aire là-bas ? Il est bientôt quatorze heures et j'ai faim, râle Jonah.

Je soupire mais il a raison. Je me gare sur la petite aire de pique-nique ne comportant qu'une table en bois avant un banc cassé, perdue au milieu de nulle part.

Jonah sort les sandwichs que ma mère nous a préparé hors de la glacière et m'en tend un. Je mords dedans comme si je n'avais pas mangé depuis deux semaines. Je m'assois sur le dessus de la table, à côté Jonah, tandis que le soleil nous tape brutalement sur la peau. Il a fallu en plus que ce soit une vraie canicule le jour de notre départ.

—     Val', tu sais que tu peux me demander ton cadeau d'anniversaire. Parce que je ne t'ai rien offert le jour de ton anniversaire et cela n'a pas l'air de te perturber tant que ça.

—     Peut-être parce que vu ce qui nous est tombé dessus, je comprendrais que tu ne m'aies rien offert et que tu aies la tête ailleurs. Mais je m'en fous, je n'ai pas besoin de cadeau. Tu sais, être juste avec toi, ça me rend heureux.

Jonah roule des yeux, un peu exaspéré. C'est la vérité après tout. Oui, il ne m'avait rien offert le jour J, mais je n'allais pas lui faire un scandale pour ça. Il avait participé à la soirée que l'on avait fait quelques jours après avec les gars à Paris, donc cela m'allait.

—     Non, mais en tant que petit-ami, je devais quand même t'offrir un truc mémorable pour tes vingt ans, renchérit-il. Ne me dit pas que j'ai fait tous ces efforts pour rien.

Je me retourne vers lui, un sourire guilleret.

J'ai bien entendu ? Il m'a préparé quelque chose alors.

La théorie des montagnes russes - Tome 2.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant