Comptoir

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Allongé dans son lit, les yeux grands ouverts, Scorpius n'arrivait pas à s'endormir. Il comprenait parfaitement pourquoi et cela le mettait dans une colère folle, encore moins susceptible de lui apporter le sommeil.

Cela faisait deux heures maintenant qu'Albus Potter avait quitté sa boutique. Deux heures qu'il avait débarqué à nouveau dans sa vie comme un ouragan pour y faire ses ravages, et repartir presque aussitôt, comme un fantôme.

Fermant les yeux, Scorpius soupira. Il haïssait, il haïssait Albus. Il haïssait son attitude désinvolte qui l'avait conduit à frapper chez lui au beau milieu de la nuit sans même se soucier de comment il réagirait. Il haïssait son insolence et le culot absolu qui lui permettait de lui demander son aide pour participer à ses projets mégalomaniaques. Et surtout, il haïssait ce pouvoir qu'Albus avait toujours sur lui...

Se redressant pour attraper une cigarette, Scorpius s'écroula à nouveau sur son lit. Rien à faire. Toutes les distractions du monde ne suffirait pas à effacer la pression de ce baiser sur ses lèvres, le corps d'Albus tout près du sien, sa présence, son odeur, et l'irrésistible aura qui lui permettait de s'insinuer partout dans la moindre de ses pensées...

Et merde. Dix années avaient passé, bordel ! Dix années ! Et pourtant, il suffisait qu'Albus se pointe à sa porte la bouche en cœur pour que Scorpius se sente vaciller comme le jour de leur premier baiser... Scorpius eut envie de se traiter de tous les noms et enfonça sa tête dans l'oreiller, ce qui fut fatal à la cigarette. Il se sentait comme un adolescent moite et maladroit. Comme une midinette vivant son premier coup de foudre. Une telle agitation ne lui ressemblait pas, et Scorpius désespérait de retrouver le véritable lui-même...

Le pire dans tout cela, c'était sans doute qu'Albus savait. Il savait, forcément. Albus n'avait jamais eu son pareil pour détecter ce genre de choses. Scorpius avait beau s'être montré froid et avoir gardé une indifférence de façade, même pendant le baiser, il était sûr et certain qu'Albus avait senti quelque chose : une excitation, un frémissement, et qu'il allait y planter ses crocs pour revenir à la charge sans en démordre, encore et encore...

Scorpius soupira. Il jouait avec le feu et il le savait. Il n'était pas prêt à laisser Albus revenir dans sa vie : il ne l'avait même jamais envisagé. Rêvé peut-être, à ses heures perdues... Mais il n'y a pas de mal à rêver, pas vrai ? Rêver d'Albus ne voulait pas dire qu'il voulait revenir à ses côtés ?

Scorpius se retourna machinalement sur le côté. La partie de lui-même qui demeurait lucide – et non fixée sur les lèvres d'Albus – lui soufflait que les artifices du jeune homme lui faisaient oublier le plus important. La baguette de Sureau. La carrière d'Albus. Cette réputation de politicien sulfureux dans laquelle il se drapait comme du velours... Scorpius voulait-il vraiment être mêlé à tout ceci ? Visiblement, il avait déjà accepté. Mais il n'était pas trop tard, pas vrai ? Il pouvait encore faire marche arrière...

Il y avait quelque chose en lui, pourtant, qui lui soufflait qu'il ne pourrait pas. Peut-être étaient-ce les battements accélérés de son cœur, depuis qu'il l'avait vu sur le pas de sa porte. Peut-être était-ce cette sensation enivrante de danger et d'absolu qui l'avait pénétré, comme autrefois, à chaque fois qu'il fréquentait le sillage d'Albus... Scorpius avait eu la sensation d'être projeté dix ans en arrière. Lorsqu'Albus arpentait les couloirs de Poudlard avec lui comme un roi, et qu'à ses côtés, contaminé par son aura, Scorpius se sentait invincible. Il y avait quelque chose d'irrésistiblement galvanisant dans la fréquentation d'Albus : son entrain, son assurance, sa confiance en la vie et en sa propre réussite... Scorpius aimait tout cela. Il aimait se sentir le favori et le témoin privilégié d'un être à part. Il aimait la compagnie de ce jeune homme qui se permettait tout ce que lui n'aurait jamais osé faire, même dans ses rêves les plus fous. Il aimait le parfum d'aventure et d'interdit qu'Albus lui offrait, en partageant sa vie...

Pandemonium (Scorpius x Albus)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant