Téluxa III, monde de tous les possibles - 5 -

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La suite était immense. Destuiz n'osa pas imaginer combien cela pouvait coûter de passer une nuit dans cet hôtel.

– J'attendais de la famille, qui devait arriver aujourd'hui, expliqua Dawampa, mais ils m'ont fait parvenir un message d'Arcturus signalant qu'ils seraient retardés d'une semaine.

– C'est fâcheux, mais ils m'ont rendu un fier service.

– Oh, ils seront certainement heureux de l'apprendre.

Destuiz se demanda si son hôte avait percé à jour son déguisement... Face à une personne d'une telle noblesse, il sentit qu'il était stupide de jouer au chat et à la souris. Aussi, s'asseyant sur un sofa, il prit son courage à deux mains et annonça :

– Monsieur Dawampa ?

– Voyons Johan, appelez-moi Arnest...

–... Oui, Arnest. Je suis navré, mais il faut que je vous dise quelque-chose.

L'hôte sortit une bouteille de Bambelchoups et servit la liqueur dans des coupes de béryl d'Aldébaran.

– Je ne suis pas un représentant, lâcha Destuiz, au prix d'un effort surhumain.

Arnest parut étonné.

– Non ? fit-il.

– Non... Je suis né sur Venturi.

– Ça alors !

– Eh oui... Si je suis venu ici, c'était dans l'espoir de... eh bien, de revoir une jeune femme pacitaine que j'ai aperçue dans le vaisseau de la CSB.

– Dieu cosmique ! Quelle aventure romanesque !

– J'en suis confus, car je ne connais pas bien votre... race. Mais dès le premier coup d'œil, j'ai été séduit.

– C'est terrible ! Comme je vous plains.

– Pourquoi ? fit Destuiz en se redressant.

– Imaginez que cette femme ne partage pas vos sentiments ! Vous savez, les représentants ont une morale terne et un peu bâtarde...

– J'ai été habitué à bien pire.

– Je comprends, excusez-moi, c'est une réflexion déplacée.

Ils burent leurs coupes, puis Arnest fronça les sourcils.

– Êtes-vous sûr qu'il s'agisse de représentants ?

– Eh bien... je ne sais pas, pourquoi ?

– J'ai entendu dire qu'un groupe de réfugiés de Wenigassy était arrivé par le vaisseau de la CSB aujourd'hui.

– Ils sont donc ici ? exulta Destuiz.

– Oui, bien sûr. Mais seuls deux d'entre eux étaient des représentants. Les autres étaient Immaculés.

– C'est-à-dire ?

– C'est-à-dire des Pacitains purs, sans aucun lien avec la race humaine. Des gens qui se tiennent absolument à l'écart des autres êtres vivants, et même des représentants, tant que c'est possible.

– Et comment les reconnaît-on ?

– Les Immaculés sont plus grands, plus minces, plus bleus, en d'autres termes : moins humains que les autres.

Destuiz rassembla ses souvenirs. Il en conclut que, effectivement, un des deux hommes était plus étrange que l'autre, que la femme et l'enfant semblaient plus extraterrestres que la jeune fille. Il espéra que sa mémoire ne lui faisait pas défaut.

– Je vais faire le nécessaire pour nous mettre en relation avec ce groupe, annonça Arnest.

– Je ne saurais comment vous remercier, répondit Destuiz en essayant de contenir sa joie.

– Le bonheur des uns fait le bonheur des autres ; c'est une maxime pacitaine dérivée d'un dicton humain.

Une longue nuit stellaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant