Chapitre 32

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Il m'était insupportable de la voir dans cet état, les joues humides et le chagrin au bord des lèvres. Elle releva les yeux vers moi. Elle ne mettait plus ses lentilles dorénavant. J'avais remarqué qu'elle avait cessé de les porter le jour où elle était entrée en pleurs dans le bar où elle travaillait. J'ignorais pourquoi ce changement subite mais j'en étais heureux. De la colère se nichait au fond de ses yeux, faisant presque de l'ombre à sa tristesse. Cette Sophia lui avait fait du mal. Mais je ne comprenais pas un détail. Si cette fille l'avait faite souffrir, pourquoi Charles, censé être son meilleur ami, avait décidé de se remettre avec elle ? Je décidai donc de commencer par demander le commencement.

– Qui est Sophia ? demandai-je.

Elle ouvrit la bouche pour répondre mais on frappa à la porte à ce même moment. Simon apparut en criant "surpriiiiiise". Le sourire de Jade revint au galop avant qu'elle ne se jette dans les bras de son grand frère. La châtaigne s'écarta de son aîné pour lui parler.

– Qu'est-ce que tu fais là ? Je croyais que tu ne pouvais pas venir, fit-elle.
– Quelqu'un m'a convaincu, me jetta-t-il un petit regard.

Jade l'imitai alors.

– Tu étais au courant ?

J'hochai doucement la tête, un sourire au coin de ma bouche. Les yeux de Jade revinrent sur Simon. Ce dernier remarqua enfin ses larmes sur son visage.

– Tu pleures ?
– Je suis juste super contente que tu sois ici, mentit-elle comme une excellente actrice.

Il serra à nouveau sa petite sœur dans ses bras. Savait-il ? Connaissait-il l'histoire électrique, voir orageuse, entre Sophia et Jade ?

–  T'es mignonne, grimaça-t-il. Mais je te connais mini pouce et tu ne me dis jamais ce genre de choses. Il marqua un pause. Ça n'a rien avoir avec le fait que je viens de croiser Charles dans les escaliers avec celle dont on ne doit pas prononcer le nom, par pur hasard ?

Il avait mis le doigt sur la vérité. Il devait être au courant. Ou peut-être, était-il comme les amis de Jade. Ne sachant simplement qu'elle haïssait cette fille au plus au point. Jade ignora ses paroles et déclara :

– J'ai besoin d'un verre.

Mais honnêtement, nous le savons tous. Mis à part les plats de Sacha, ce que digérait affreusement Jade, c'était bien l'alcool. Elle était une autre facette d'elle-même dans ces moments d'ivresse. Elle était la partie tristement joyeuse de Jade. Ce qu'elle pouvait dire ou faire était alors imprévisible. C'était avec la joyeusement triste que j'avais conversé pour la première fois. Elle avait été pour ainsi dire beaucoup plus gaillarde que peinée, voire aucunement peinée. Et pourtant, elle venait de surprendre la tromperie de David. À croire qu'elle attendait le moment où il trébucherait pour pouvoir s'en séparer. Peu importe, ce soir là, j'avais causé avec la ivre et optimiste Jade pour la première fois.

En revanche, ce soir, c'était l'autre facette qui était apparue après les verres qu'elle s'était enfilée. J'étais étonnée qu'elle tînt encore debout pour faire le chemin du retour à pied. Elle tenait physiquement bien l'alcool, psychologiquement, c'était totalement différent.

Quand certains avaient crié à plein poumons "BONNE ANNÉE", d'autres s'étaient embrassés en espérant que cela leur porteraient chance. Mais Jade, elle, m'avait regardé avec ses yeux vitreux. Elle m'avait fixé pendant de longues secondes qui m'avait paru toute une éternité. Elle avait fini par me prendre la main et se blottir dans mes bras avant de murmurer contre ma poitrine :

– Je voudrais vivre cette année entièrement...

Elle avait marqué une pause malsaine tandis que mon souffle s'était coupé sous son chuchotement.

– ...avec toi.

J'étais resté muet à cela. Elle avait insinué quelque part qu'il n'était pas certain qu'elle soit vivante au prochain nouvel an en faisant cette pause. Et j'en étais timoré. J'étais complètement terrifié à l'idée de la perdre. Ce n'était pas avec ce genre de pensés que je désirais commencer cette année. Mais la tristement joyeuse Jade en avait décidé autrement.

J'aurais préféré qu'on s'embrasse.

Jade marchait à mes côtés, sans dire un mot. Les rues n'étaient pas silencieusement. Tout le monde fêtait ce jour pourtant si ordinaire. Alors que nos pas faisaient craquer la neige sous nos pieds, j'eus une idée scandaleuse.

– Qui est Sophia ? répétais-je mots pour mots la question que je lui avais posé plus tôt.

Elle avait bu et c'était sournois de ma part. Mais si je voulais être certain d'obtenir une réponse sincère, c'était le moment idéal.

– Une garce, cracha-t-elle.
– Comment ça ?
– En fait, je devrais peut-être la remercier ? Non, c'est trop tard en fait, répondit-elle aussitôt à sa propre question.
– Pourquoi aurais-tu eu à la remercier ?

Nous étions arrivés devant chez elle. Ces derniers temps, je vivais plus ici que dans mon propre chez moi. Mais on voyageait toujours entre nos deux appartements. Jade bailla.

– C'est grace à elle que Charles est devenu mon meilleur ami.

Désastreux AmoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant