Désastreux Amoureux

Chapitre 33

Les jours du mois de janvier avaient été ensevelis sous la neige. Je n'avais pas réussi à soutirer d'autres informations au sujet de Sophia. Jade ne parlait plus à Charles et prononcer son nom était devenu un outrage au même titre que celui de sa nouvelle petite-amie ou de son père. La dispute du nouvel an avait aussi enterré leur amitié. Comment une simple fille pouvait déclenchait de telles incendies ? Qu'avait bien pu faire Sophia pour créer des ouragans de nerfs dans le crâne de Jade ? Et je n'arrivais toujours pas à comprendre ce qu'elle avait dit par "c'est grace à elle que Charles est devenu mon meilleur ami". Les mystères de Jade étaient à tirer par les cheveux. Aucun scénariste d'Hollywood n'aurait imaginé un passé aussi désastreux pour l'un de leurs personnages.

Il y avait quelque chose de curieux ce mois là. Lorsque je lui remontais son courrier en venant chez elle, la châtaigne me l'arrachait à peine avais-je passé le seuil de la porte. Comme si sa part de mystère était dans l'une de ces enveloppes. Alors elle avait commencé à guetter l'arrivée du facteur prenant le courrier fraîchement déposé pour s'assurer que mes yeux ne s'y perdent pas.

Et puis le rude février s'était installé. J'étais resté toute la journée au lit ce jour là. Je ne me sentais pas très bien. Je lui avais promis la veille qu'on passerait la journée ensemble mais les plans du jour étaient désormais à jeter à la poubelle, j'étais malade. La veille, dans la nuit, nous avions tourné un clip avec les gars. J'avais dû prendre froid dehors, dans les rues de la capitale. Je lui avais envoyé un message au matin après avoir vidé un premier paquet de mouchoirs lui expliquant mon état.

J'étais donc seul, dans mon lit. Les rideaux étaient restés clos et seuls quelques fourbes traits de lumière apparaissaient dans ma chambre. J'avais essayé de finir le bouquin que j'avais récemment commencé mais mes yeux s'étaient vu devenir si feignants qu'ils ne relayaient rien à mon cerveau. Alors j'eus l'idée de regarder un film. J'ouvris mon ordinateur et le posai sur la place, qui d'ordinaire était rarement vide, à côté de moi. Et au moment de choisir le film, je pensai à elle. À elle et à son costume d'Halloween. Je souris bêtement en tapant le nom du film. J'étais devenu un homme très différent de celui que j'étais avant notre rencontre. Elle m'avait rendu beaucoup plus doux et m'avait donné de l'espoir. Cet espoir en l'amour que je boycottais depuis tant d'années. Quand j'y repensais, j'étais en total rupture avec l'autre moi. Mais contrairement à Jade, ce n'était pas l'alcool qui faisait ressortir cette facette, c'était elle.

Le cours de mes pensées fut tout à coup stoppé quand j'entendis du bruit. J'étais certain d'avoir entendu la porte de mon appartement s'ouvrir et se refermer. Alors, méfiant, je sortis de mon lit, quittant sa chaleur reposante, et pris le premier objet qui me servirait d'arme contre l'intrus. Je sortis alors de la pièce en veillant à ne faire aucun bruit. J'entendais des pas depuis ma cuisine. Et au moment de surprendre le cambrioleur, je fus agressé par le rire de Jade, tenant une pomme.

– Tu croyais que j'étais une voleuse ou quoi ? rit-elle aux éclats.
– Pendant un instant, j'avais complétement oublier t'avoir donné le double de mes clés comme tu les oublies toujours et sonnes à la place.
– Je me suis dite que comme tu étais cloué au lit, j'allais pas te faire lever pour m'ouvrir.
– C'est réussi.

Elle fit un croc dans le fruit vert avant de remarquer un détail.

– Au fait, c'est original qu'un bouquin puisse faire office d'arme de défense. Contre un moustique, je peux le comprendre mais un humain...

Devant son air perplexe, je la laissai finir sa pomme et retournai sous ma couette. Jade me rejoignit ensuite alors que j'avais déjà lancé le film, bien trop impatient de le revoir. L'ordinateur avait atterrit sur mes genoux pour lui rendre sa place. Elle s'était glissé près de moi et en voyant ce que je visionnais, elle déposa un baiser sur ma joue.

J'étais malade mais bon sang ce que cette journée était chouette.