« Le désordre de mon âme en l'écoutant, ne saurait être exprimé » — Abbé Prévost
" Je ne me reconnais plus. Où est donc passé l'Aleksi qui se terrait dans son coin sans rien dire ? Loin, il est loin. Il appartient au passé, il est ce que je ne veux plus être."
Je soupire et ferme mon stylo. Je ne sais pas si l'idée d'Astéria est bonne. Car on a beau se confier à une feuille, elle ne nous répondra pas. Il faut être sacrément mal pour en arriver à préférer parler à une feuille. C'est sur cette réflexion que je descends au salon où Flora m'attend. On est dimanche et Flora a décidé d'inviter Jace et Rosie « en souvenir du bon vieux temps », comme elle le dit si bien.
Je pense que les revoir en dehors du lycée me fera du bien. Au moins, j'oublierai ce lycée de malheur. Quoique, j'y pense de plus en plus souvent. J'observe la rue qui donne sur la cuisine. Les feuilles mortes voltigent sous le vent de novembre, qui deviendra bientôt le vent de décembre. Et bientôt, la neige blanche recouvrira le goudron noir, comme si toute la noirceur du monde se cachait sous un voile de pureté.
Je vais dans le salon et décide d'y attendre nos deux amis, même si ces derniers temps nous ne nous parlions plus tellement. Il faut dire qu'avec ma sœur, Rosie, Jace et leur espèce de triangle amoureux, notre amitié a bien failli y rester. Quoique, ça n'aurait pas tellement bougé pour moi.
Flora avait réussi à s'enticher de Jace au même moment que Rosie m'avouait qu'elle éprouvait des sentiments pour ce dernier. Et c'est comme ça que je m'étais retrouvé en plein milieu de cette « guerre de sentiments ». Si de mon côté je n'avais pas avoué à Rosie mes sentiments pour elle puisqu'elle venait de m'avouer les siens pour Jace, ma sœur n'avait pas eu cette « chance ».
On était en été, au beau milieu du mois d'août, et je sais que je n'oublierai pas ce jour-là de sitôt. Flora était rentrée en pleurant et s'était jetée sur son lit en claquant la porte sans une seule explication. Cliché, certes, mais tellement réel.
Je n'avais eu aucun mal à lui tirer les vers du nez. J'avais ensuite tenté de la réconforter, mais rien n'y faisait. Elle a passé toute la soirée sans bouger de sa chambre. Elle avait eu de la chance que Sofia, notre tante, était absente ce soir-là, sans quoi elle n'aurait pas échappé à un interrogatoire.
Même si Sofia était notre tante, il n'empêche qu'elle nous a élevés comme ses propres enfants. Elle ne m'a jamais dit si elle s'était fiancée, ni rien d'autre. Rien, nada. Si les raisons du suicide de nos parents restaient un mystère, la vie de ma tante l'était tout autant. La seule chose que je sais, c'est qu'elle travaille comme vétérinaire aux urgences, d'où le fait qu'elle est souvent absente et appelée n'importe quand. Et je suis sûr de cela car elle nous emmenait parfois avec elle, quand nous étions enfants.
— Aleksi ?
Flora m'appelle. Sa voix est un peu hésitante. Elle est à l'entrée de la cuisine. Je lui jette un regard interrogatif, attendant qu'elle me dise ce qui la tracasse.
— Est-ce que tu penses que j'ai bien fait de les inviter pour reprendre contact ? finit-elle par me demander
Je soupire.
— Évidemment que tu as bien fait. D'ailleurs, je ne comprends pas pourquoi tu as voulu couper les ponts. C'était totalement-... Oh, j'ai compris, tu as dû te disputer avec Jace en début d'année, non ? Et tu ne me l'as pas dit.— Tout juste, soupire-t-elle, ses cheveux bruns tombant devant ses yeux clairs
— Écoute, il n'y a aucune raison que ça se passe mal. Je suis sûr que c'est oublié.
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R & J
Roman pour Adolescents« L'Enfer, c'est les autres. » - Jean-Paul Sartre Avez-vous déjà perdu tout espoir ? Vous êtes-vous retrouvé(e) au fond du gouffre ? Avez-vous dû faire semblant ? Vous êtes-vous déjà rendu(e) compte que l'enfer, c'est les autres ? Astéria Redwood...