Segment 1; Chapitre 1

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Je plonge encore et je revis ces moments, quinze ans plutôt, je n'étais qu'une enfant perdue dans un monde de grands bien trop effrayant. J'avais quinze ans, dans la fleure de l'âge, frêle et intrépide. Mais j'étais surtout naïve à cette époque ce qui n'est plus le cas. Naïve et insouciante ce que je ne suis plus non plus. Aujourd'hui, je me laisse envahir par les souvenirs du passé, je les laisses m'inhiber, j'en oublie ce que je suis devenue, je me relance dans ce que j'étais.

Je jouais aux billes avec mon ami Joseph ; je nouais des rubans dans mes cheveux, courrais derrière le chat de la voisine qui ne s'occupait plus de lui, j'avais une vie de petite fille des plus simple. J'aidais mon père à la boutique familiale, ma mère, elle s'occupait de la maison, ils n'avaient eu que moi et ma mère m'avait récemment annoncé qu'elle attendait un autre enfant. J'avais un petit train-train quotidien que j'aimais plus que tout. Il y avait Richard aussi, il venait tous les jours à la boutique, il achetait des pastilles à la menthe pour sa mère et quand il payait et que j'étais à la caisse, il prenait un ruban dans sa poche, il me demandait de chanter toujours en m'appelant petit rossignol puis une fois que j'avais poussé la chansonnette, il me l'offrait.

Sa mère travaillant à la mercerie du village, je suppose encore aujourd'hui qu'il volait ses rubans pour me les offrir. Je le prenais avec précaution comme si c'était un ruban fait d'or et allais le ranger dans la boîte de ma chambre. La boîte était belle, c'était ma grand-mère qui me l'avait offerte, un petit boîtier blanc avec un couvercle sur le dessus qui permettait de découvrir les trésors qui reposaient à l'intérieur. Une dizaine de rubans attendaient que je choisisse l'un d'eux. Un bleu pour aller avec mes cheveux châtains, du rose pour rehausser la couleur de mes pommettes, du jaune, du orange, du pourpre, du cyan. Toujours, il prenait des couleurs qui se mariaient à merveille avec les aspects de mon physique.

Ce jour-là, il avait choisi un ruban qui allait embellir ma collection. C'était un ruban de satin vert sapin, il avait une texture très douce sur la peau, et quand du soleil passait entre les mailles du tissu celui-ci dévoilait un filigrane, le travail pour le faire avant du être très intense, car le dessin était très précis.

Il était composé d'un oiseau sur une branche et de deux lettres en capitale juste au-dessus de la tête, un "R" et un "P". Le soir lorsque j'étais dans mon lit, j'observais le ruban dans la lumière de ma lampe de chevet, c'est là que je vis pour la première fois. Le filigrane. J'ai souri tellement longtemps que les muscles de mon visage ont fini par me faire mal...

C'est à ce moment-là que mon chat me sortie de ma rêverie, je me suis redressée et suis allée lui donner à manger. Je me demande comment ce chat peut-être encore en vie après tous les périples qu'il a vécu...

Le chat que j'avais devant moi devais avoir treize ans et pourtant, il était toujours aussi vif qu'un chaton à peine né. Je fixais  le pelage de l'animal, il avait une couleur rousse et des yeux bleus, un mélange très particulier que j'affectionnais particulièrement. Je l'ai toujours gardé près de moi ce chat, je le poursuivais toute la journée, lui tirais les poils et pourtant chaque soir, il était toujours là avec moi.

Je me rassois sur une des chaises de la cuisine et laisse Mano grimper sur mes genoux pour se faire une place sur mes cuisses. Je retourne dans le passé et me noie dans les souvenirs.

Les rubans.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant