Segment 1; Chapitre 7

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Après avoir entendu la voix de Richard, je sentis tout mon être se réchauffer. Comme si l'on m'avait offert une bouillotte que j'avais collé contre mon cœur. Le soldat continuait de m'éloigner. C'est là qu'un cri effroyable a retenti dans mon dos, celui-ci me glaça le sang.
À ce moment j'aurais voulu retourner dans le train, j'aurais préféré ressentir à nouveau les bandes de cuir déchirer ma peau.

Je me suis tournée vers la source du cri. Je vis Aimeric un pistolet sur la tempe de Richard, celui-ci à genoux sur le sol. Puis un bruit sourd, ce genre qui vous hante jusqu'à votre mort. Je sentis la bouillotte sur mon corps refroidir à mesure que le crâne de Richard aller pour s'éclater contre le sol. Ma bouche était ouverte, ma langue pâteuse. Je ne pouvais ni plus rien dire, ni plus rien faire. Je sentis seulement des gouttes couler sur ma peau.

Mano miaulait dans mes bras, ma valise pesait sur mon dos et frottait contre mes blessures de la veille. J'avais mal physique et mentalement. Mon cœur ressemblait désormais à une bouillie compacte qu'on malmènerait.

Je revis le visage de Richard la première fois que je l'avais vus à l'école, puis quand il m'avait offert le premier ruban, le blanc, puis quand il m'avait offert le vert. Puis je le vis, la tête sur le sol, une balle transperçant son crâne. Ses yeux n'exprimaient plus rien, alors qu'ils avaient toujours été si vifs et de ce brun chocolat chaud que j'affectionnais tant.

Aimeric leva les yeux vers moi et sourit comme à chaque fois qu'il lit de la souffrance dans mon regard et me lança: << Je n'aime pas que l'on me mente !>> Puis il fit un geste futile de la main et je sentis le jeune soldat me tirer vers l'arrière. Il nous amena dans une des petites maisons, cela donnait l'impression d'être dans une rue paisible mais loin de là, la vérité. Celle-ci était sombre, froide et lugubre. Le type de maison qui vous fait vous retourner quand vous passez à côté. Il devait y en avoir une quinzaine, toutes alignée et aux allures sinistre.

Une fois à l'intérieur de la maison, le soldat me fixa avec froideur. Je me sentais comme victime d'un élan de claustrophobie. C'est là qu'il se présenta: <<Bonjour, je suis Reinhard, Aimeric a sûrement dû t'expliquer?

-Je... Non...

- Bon... Et bien Aimeric t'a ramené ici pour que tu t'occupes de moi, il parlait avec cet accent atroce qui me retourne l'estomac.

- B-bien...>>

Il sourit et me jaugea du regard, je le regardais également. Il était blond, et possédait des iris gris. Ses yeux ressemblaient à des troues béant sans aucun sentiment. Il arborait une peau claire et des cheveux coupés en brosse et il avait un sourire déplaisant qui vous donne envie de prendre vos jambes à votre cou. Heureusement, moins effrayant qu'Aimeric ce qui me rassura une demi-seconde. Puis-je vis le même éclat sournois que dans le regard de mon tortionnaire, un éclat qui vous fait hérisser les poils de votre nuque et ravaler difficilement votre salive. Il me fixa sans me lâcher, du regard ce qui augmente mon malaise.

Il porte ensuite son regard sur Mano, il semble sourire et s'approche du chat pour lui caresser l'oreille. Reinhard lui gratte la tête et Mano se mit à ronronner tout bas, je me rassure un peu et me dis que je serais mieux ici que dans ce train tout droit sorti des enfers, malgré que je n'oublie l'air sournois que j'ai aperçue. Il finit par stopper ses caresses et me prendre le bras pour m'amener dans une petite buanderie.

Celle-ci est composée d'une paillasse pour dormir, d'un bac à linge avec, sur le dessus, un panier rempli de produits d'entretiens. Il me dit que je peux déposer mes affaires ici, et qu'ensuite je devrais préparer un repas, il me dit aussi de prendre une douche et de me changer.

Je pose ma valise dans la petite pièce que je considère désormais comme ma chambre, Reinhard lui sort du petit logis et je vois la porte se fermer et j'entends aussi le cliquetis de la clé qui tourne dans la serrure.Je me laisse aller sur la paillasse et vois une couverture en lin sur le côté. Puis je regarde le plafond poussiéreux et l'ampoule dénudé, qui dégage une faible lumière. Mano prend place sur mon " lit ", se roule en boule avant de s'endormir.

Je souris attendrie, et me dirige vers la petite cuisine. J'ouvre le réfrigérateur et prends un morceau de viande, avant de le faire cuire avec un vin de table, que je trouve dans un des tiroirs accrochés au mur. Puis je prépare des pommes de terre. Je laisse le tout mijoter doucement sous un couvercle en fonte. Je vais ensuite à la salle de bain et une fois dans la pièce je regarde mon visage, dans le petit miroir, au-dessus de la vasque du robinet.

Je suis pâle, et j'ai deux grosses cernes violacés sous les yeux. Un bleu entache également ma joue droite, et tourne au vert jaune, mes yeux ressemblent à deux billes noires vidées de toute vie. En deux jours je ne reconnais même plus mon visage, la petite fille aux joues rouge remplie de couleur à laisser place à une jeune femme fatiguée. Un constat me viens à l'esprit.

Voilà ce que je suis désormais.

Remplie de larmes et de douleur.

Les rubans.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant