Chapitre 19

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- Bon, bah y'a du progrès quand même ! ricana Finn avant de balancer le sac sur ses épaules.

Je lui lançai un regard noir et commençai à marcher en direction de la maison. J'étais complètement dépitée et démotivée. Des jours que je bossais avec lui pour au final n'avoir aucun résultat hormis avoir réussi une fois à le faire vaciller. Faible et inutile, voilà ce que j'étais.

- C'est quoi cette tête ?

Je me tournai vers le blondinet en soupirant et le contemplai d'un air las. Tous les éléments étaient rassemblés pour passer une bonne journée avec le soleil qui traversait doucement le feuillage des arbres, l'eau douce qui ruisselait près de nous et le vent frais qui balayait nos cheveux. Pourtant, ma bonne humeur s'était envolée et laissa place au doute et à la tristesse. J'avais besoin de Jared plus que jamais et il n'était pas là.

- C'est ma tête, lançai-je. On rentre ?

- Tu fuis le problème.

- Non, tu crois ? grinçai-je.

- On t'a jamais dit que c'était mal de faire ça ?

- Non, pas vraiment. Et puis, tu veux vraiment que je te parle en long et en large de mes problèmes de filles ?

- Je suppose que la réponse est non ...

- Tu supposes bien !

Tout en rigolant, nous retournâmes près des habitations. Même si il ne comblait pas le vide dans mon coeur, sa présence m'aidait. Il me faisait me sentir mieux, plus détendue. J'étais tellement paumée ces derniers temps, principalement parce que je ne comprenais pas du tout le lien que j'avais avec Jared, Finn était donc vital pour moi.

Nous discutions gaiment lorsque nous arrivâmes sur la petite place du village. Je vis le visage de celui qui hantait mes rêves et mon coeur loupa un battement. Son regard se planta dans le mien et ses yeux d'un bleu foudroyant m'hypnotisèrent. J'y lus une certaine rancoeur dont je ne comprenais pas la provenance jusqu'à ce que je me rende compte du bras de Finn sur mes épaules.

Une gêne s'installa aussitôt. Je ne voulais pas dégager le bras de Finn pour satisfaire Jared, néanmoins je sentais le besoin oppressant de mettre une distance entre nous. Rapidement, les loups qui avaient chassé avec leur Alpha se rendirent compte de ce qui se passait, Finn aussi se rendait compte du regard meurtrier de l'Alpha, pourtant personne ne bougeait.

Avant que tout le monde ne surprenne cet échange silencieux, je me décalai du blondinet en lui offrant un léger sourire, ignorai Jared et me dirigeai vers le chalet en prétextant vouloir prendre une douche. Je ne voulais rien savoir de leurs besoins de domination sur les femelles.

La femme ayant été possédé par un loup devient intouchable, encore plus lorsque ce loup est un Alpha. S'approcher d'une femelle déjà prise est un manque de respect qui déclenche régulièrement des combats à mort. Le gagnant remporte la dîtes femelle. On m'avait assuré que cette pratique ne se faisait plus trop mais je doutais un peu.

Dans mon cas, je n'avais été possédé par personne donc je ne comprenais pas le regard sombre de Jared. Avais-je rêvé ? Était-ce juste ma présence qui l'avait mis dans cet état ? Je n'en savais rien ... J'espérais que non en tout cas.

Au final, je ne montais pas me doucher mais me préparais en deux temps trois mouvements un sandwich que j'avalais et partis par derrière dans la forêt. J'étais décidée à disparaître toute l'après-midi et à courir pour travailler mon endurance. Si j'étais aussi nulle en face à face, autant opter pour l'option de la fuite ... De toute façon, ça a toujours été ce que je faisais de mieux.

D'un rapide regard aux alentours, je vérifiai que le champs était libre et commençai ma course à travers les arbres. Même si au début j'eus un peu de mal à trouver ma cadence, elle revint vite et je pus me détendre. J'essayai de me concentrer sur mes pas, sur mon souffle encore régulier et sur la nature sauvage qui m'entourait. Tout était tranquille en ce début d'après-midi et c'était reposant.

Je chassai l'image du visage presque consterné de Jared pour profiter du jeu magique de lumière que les feuilles des arbres faisaient avec le soleil. Des milliers de bruits me parvinrent et pourtant ça n'avait rien d'assourdissant car je m'y étais habituée. La biche qui broutait, l'oiseau qui chantait, l'insecte qui s'envolait, les branches qui craquaient et les feuilles qui bougeaient, le tout formait une délicate musique.

Le temps passa à tout allure et je ne m'en rendis pas compte. Lorsque j'émergeai de ma pseudo transe, je compris que j'étais au bout du territoire des loups, leur odeur était devenue très faible. Je m'apprêtais à faire demi-tour au plus vite, légèrement inquiète, quand quelque chose attira mon attention.

Je m'avançai d'un pas méfiant vers l'odeur que j'avais senti, une odeur que je connaissais que trop bien. Une masse sombre se dessinait sur le sol, derrière des buissons. D'un coup d'œil, je vérifiai que j'étais bien seule et m'approchai un peu plus de ce qui s'avérait être une silhouette. De la main, je déplaçai les branches pour apercevoir un peu mieux le personnage et, lorsque je vis son visage, mon coeur loupa un battement.

« Et ce n'est que le premier ... » était gravé sur tout le front du cadavre.

Aussitôt, je me précipitai vers la masse et vérifiai son pouls en appelant de l'aide de toutes mes forces. Comme je l'avais appris, je me mis en tête de lui faire un massage cardiaque mais c'était inutile.

Je criai, frappai son torse, hurlai à nouveau et lui fis du bouche à bouche sauf qu'elle était déjà morte. La femme étendue sur le sol, pleine d'hématomes et de lacérations, n'était autre que celle qui m'avait élevée. C'était la directrice de mon orphelinat, elle m'avait tout donné, tout appris. Ma force venait d'elle. Elle m'avait transmis tout ça, et pourtant cela ne l'avait pas sauvé.

Des larmes coulèrent le long de mes joues et j'entendis des bruits de pas derrière moi, des personnes s'approchaient en courant. Je serrai un peu plus le corps ensanglanté de la femme contre le mien tandis que d'autres odeurs devinrent distinctes, comme celles de Finn et de Jared. Je les ignorai et continuai de serrer de toutes mes forces le corps froid contre mon torse.

Finn tenta une approche, s'accroupit à mes côtés et posa une main sur mon épaule mais je me tournai vers lui, les yeux luisants de rage, et grondai. Aussitôt, il recula. Ma puissance suintait de mes pores, ma louve et moi étions dans le même état. Toutes les deux ressentions cette sorte d'admiration et d'affection pour cette femme.

Personne n'osa ressayer pendant un temps, sachant que je devais faire mon deuil et que de toute façon je leur arracherais la tête si ils essayaient. Personne, sauf Jared, qui s'approcha à son tour de moi. Je me crispai et serrai toujours plus la femme dans mes bras en sanglotant. Il s'accroupit mais ne me toucha pas. Il n'essaya pas de me séparer d'elle mais se contenta de poser sa paume sur le front de la morte et prononça des paroles dans une autre langue dont je compris étrangement le sens.

- Reposes en paix auprès de la déesse. Pars sereine, ton combat s'achève ici.

Les larmes arrêtèrent de couler et je le regardai désormais avec un air à faire peur. Il ignora mon regard d'hurluberlu et détacha doucement le corps de la femme du mien pour l'allonger sur le sol.

Une fois fait, il se tourna vers moi. Lorsque je croisais son regard, je n'hésitai pas plus longtemps et fondis dans ses bras, m'accrochant désespérément à son teeshirt, laissant couler les dernières larmes pour cette femme à la fin tragique.

Le message était clair, je n'étais en sécurité nulle part ... Même ici.

Nightfall SchoolOù les histoires vivent. Découvrez maintenant