Retour en arrière part-1-

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- " Bonsoir grand-mère... "

(Neuf ans plus tôt)

      Voilà maintenant plusieurs jours qui sont passées et l'état de ma mère ne s'est toujours pas amélioré. Moi qui croyait qu'elle se sentait mieux et que tout allait redevenir comme avant... que j'allais retrouver la mère souriante et chaleureuse aux fourneaux qui m'attendait à mon retour de l'école pour que je lui raconte ma journée et qu'on se mette à papoter sur tout et sur rien. Je me retrouve devant une version fragile d'elle, une version méconnaissable, clouée au lit, qui peine à aller aux toilettes ou même à se relever pour s'adosser au mur. Refusant catégoriquement d'aller à l'hôpital, j'ai dû lui ramener 4 docteurs différents à domicile pour l'examiner mais aucun n'a su nous donner une explication satisfaisante... 

       On a eu droit à l'hypothèse d'un état de fatigue extrême qui requiert du repos et des médicaments qu'elle devait prendre à des moments précis de la journée pour guérir. Celle d'un certain virus qui nécessite une injection qu'elle a d'ailleurs subit sans pour autant donner de résultats. L'un des médecins nous a même suggéré d'emmener ma mère en voyage quelque part où il fait bon vivre car elle souffrait d'un début de "dépression" qui nécessite qu'elle s'éloigne un peu du cadre dans lequel nous vivions.  D'ailleurs celui là a aussitôt été viré par Daniel qui l'a traité d'incapable et de novice à l'entente de son diagnostic. 

      Mon sale beau père que je voyais peu avant, est désormais tout le temps dans les parages. Lorsque je rentre du lycée, lorsque je me réveille, mais surtout à chaque fois que je ramène un médecin chez nous. Il ne va plus au boulot depuis que ma mère est tombée malade prétextant qu'il s'inquiète pour elle et qu'il est le seul à pouvoir s'en occuper vu que moi j'ai mes études alors que je sais qu'il ne rate pas l'occasion de se taper toutes les michtoneuses du coin lorsqu'il se sent trop seul. Lui qui travaille ou plutôt "travaillait" comme médecin anesthésiste (étant donné qu'il ne va plus du tout à l'hôpital et que je ne connais toujours pas la véritable raison), prétexte souvent le fait de faire partie du domaine médical pour s'immiscer dans de longues conversations et argumenter avec les docteurs à chaque fois qu'ils déclarent leurs diagnostics en les poussant vers sa propre hypothèse qui est: la fatigue qui nécessite du repos et du temps. 

    J'ai tilté face à sa réaction devant la déclaration du dernier médecin. Lorsqu'il nous a parlé d'un début de dépression, mais surtout lorsqu'il nous a demandé de l'emmener se reposer ailleurs, j'ai vu son visage se crisper et le fait qu'il le vire et le traite de tous les noms alors qu'il n'avait rien fait de mal n'a fait que confirmer mes soupçons : Il veut que ma mère reste impérativement à la maison... mais pourquoi?? 

      Depuis l'incident de l'autre fois avec la boulangère, mais surtout depuis qu'il m'a ouvertement menacé avec son "Rappelles-toi que je suis docteur, et que ta mère est souvent seule" , Je le soupçonne même d'être la cause de sa "maladie" soudaine. Sauf que je n'en ai aucune preuve. Tout ce que j'ai pu faire c'est engager une infirmière qu'on m'a recommandée pour surveiller ma mère le temps que je rentre du lycée... pour qu'elle ne soit jamais seule avec lui. La solution la plus évidente à mes yeux était bien entendu de quitter l'école et de m'en occuper moi-même mais ma mère m'avait fait promettre de ne jamais abandonner mes études. Elle me disait que j'avais un avenir brillant qui m'attendait et que la seule chose qui la faisait se sentir mieux était de me savoir entrain de le construire comme il faut. Que l'idée que je quitte le lycée pour elle lui était insupportable, et que ça ne ferait qu'empirer son état si je le faisais car elle se sentirait coupable. Et dieu sait que j'y ai repensé à maintes reprises... mais la tristesse que je voyais dans ses yeux lorsque j'abordais le sujet, ou même quand j'y faisais seulement allusion me faisait me rétracter à chaque fois jusqu'à ce que je finisse par céder à ses protestations. Ma mère est tout pour moi, elle est tout ce que j'ai, cette décision de la laisser à longueur de journée seule dans son état, même si je rentrais tôt et même s'il y avait une infirmière qui l'accompagnait à longueur de journée, était loin d'être facile à prendre. Toutes mes pensées s'orientaient autour d'elle, je me débattais pour me concentrer sur mes études et avec le temps j'y arrivai de plus en plus en me disant que quelque part... le fait d'obtenir mon diplôme la ferait peut être guérir. Cette idée positive, bien qu'un peu idiote, s'est transformée peu à peu en objectif, en un défi qu'il me fallait absolument gagner. 

Ma vie sans luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant