L'initiation

63 4 2
                                    

PDV De Sarah

    Mes yeux fixent l'écran qui affiche en gros plan la photo de ma mère tandis que les sonneries continuent de retentir dans l'espoir que je réponde.

    Je prends l'objet vibrant des mains de Yassine pour contempler de plus près cette photo d'elle que j'aime si particulièrement. Je me rappelle l'avoir prise une certaine après-midi en rentrant du collège sans qu'elle ne s'en rende compte. J'étais arrivée devant chez nous quand je l'ai aperçue dans un coin du jardin entrain d'inspirer pleinement l'odeur des camélias roses qu'elle venait fraîchement de cueillir. Ces quelques fleurs, étant ses préférées, avaient le pouvoir de lui procurer un sourire plus rayonnant que tous ceux que je lui connaissais. L'effet était immédiat sur son visage qui s'est tout de suite illuminé, elle était tout simplement magnifique à regarder.

J'ai ressenti tant d'émerveillement devant ce moment de pure bonheur que je la voyais savourer que j'ai machinalement sorti mon appareil de mon sac à dos pour le marquer à jamais. 

La prise était bonne..la prise était magique! Parfaitement fidèle à la beauté qui émanait d'elle.

Mes iris se baladent en examinant chaque pixel de la photo comme si je la découvrais à nouveau et lorsqu'il s'arrêtent sur son visage, son sourire si spontanée, si naturel et si beau, me nargue à tel point que j'éclate en sanglots en me retenant la bouche de mon autre main. Mes larmes coulent à flots sur mes doigts et tous mes membres se mettent à trembler. Le mot "Maman" qui s'affiche en grandes lettres sous mon nez n'a jamais eu autant de sens qu'à l'instant présent.

Maman...MA maman... Cette personne qui m'a tout donné, à commencer par la vie elle même, est en danger...

Les sonneries cessent mais ma douleur ascendante, elle, continue de me secouer le corps... Ma poitrine se soulève et se rétracte répétitivement et mes yeux ne demandent qu'à se vider de ce liquide transparent qui les noie de plus en plus pour traduire l'ampleur de ma peine.

Un bipe que je reconnais instantanément se fait entendre, signalant l'arrivée d'un message. Puis d'un deuxième. 

Le docteur me tend un mouchoir pendant que Yassine me regarde troublé et tendu sans savoir quoi faire. Je m'essuie les yeux et le nez maladroitement et tente de reprendre un peu de contenance avant de m'adresser de nouveau au docteur Stan:

-"Qu'est ce que...enfin... comment je suis sensée faire comme si de rien n'était maintenant?? Elle va sûrement voir que j'ai changé..."

-"Tu n'es pas sensée faire comme si de rien n'était, c'est même tout le contraire que je te demande" Répond le docteur.

"Tu dois prendre cette maladie très à cœur et la considérer pleinement afin de trouver la force qu'il te faut pour la combattre avec elle au quotidien. Elle doit devenir ton pire ennemi, ton objectif de tous les jours, mais pas uniquement bien entendu... Tu dois continuer à vivre ta vie à côté, c'est une responsabilité qu'on partagera ensemble, sois-en sûre.

    Pour ta mère, sachant que j'allais obtenir le résultat des examens au plus tard aujourd'hui, je lui avais fixé un rendez-vous pour demain la dernière fois qu'on en a parlé. C'est donc demain que je lui dirai tout, mais si tu t'inquiètes vraiment et que tu as peur qu'elle l'apprenne à travers un comportement inhabituel de ta part d'ici là, saches que je suis prêt à venir avec toi à la maison pour le lui annoncer moi-même aujourd'hui. Mais avant je dois m'assurer que tu comprennes bien ce que signifie cette maladie, tout ce que ça implique et le rôle que va jouer chacun d'entre nous dans cette histoire, sinon, tout ce que j'ai fait jusqu'ici n'aurait aucun sens."

Ma vie sans luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant