Balcon

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Annabelle Stark a été retrouvée, morte.

L'article donne peu de détails, allant jusqu'à omettre l'endroit où a été découvert le corps.

Ma mère réalise un tour de maison, vérifiant que nos volets et fenêtres soient bien clos, l'expression de ses traits trahissant une certaine inquiétude.

Inquiétude contagieuse, selon le visage sombre de mon père.

Je débarrasse calmement mon assiette, clame un bonne nuit poli justifiant ma montée en chambre.

Pour la dixième fois, j'agite le curseur de ma souris, la crainte de manquer une mise à jour de Woods.
L'intuition qu'il s'apprête à agir.

Rafraîchissement de la page.

J'étale une feuille blanche, agrippe un crayon, tentant audacieusement de réfléchir aux meurtres.

Plus particulièrement aux familles de victimes, à la recherche d'un lien. Lopez, Abelanet, Eden, Stark.

Faut-il assembler les premières lettres ?
L-A-E-S.
S-A-L-E ?
Impensable, improbable. Fausse piste.

Rafraîchissement de la page.

Dernières lettres ? ZTNK. Non plus.

Rafraîchissement de la page.

Annabelle Stark.
Toujours en prenant la première lettre, avec la même logique, A-S, S-A.
Je tourne en rond.

Rafraîchissement de la page.
Un post y apparaît, je me surprends à me jeter presque sur l'appareil.

Deux lettres, pourpres, plantées au milieu de la page.
VU.
Encore.
Je fronce les sourcils, perplexe, la raison de la présence du mot sur son blog m'échappant.

Puis je comprends que celui-ci est en lien direct avec la réalité, me retourne, le rythme cardiaque palpitant.

Je me mords la lèvre, au sang pour contenir mon sursaut d'effroi.

Le visage pâle sourit de derrière la vitre, avec dans sa main un téléphone, celui ayant posté le "VU" d'il y a quelques secondes.

Je froisse la feuille sur laquelle j'étais entrain de gribouiller, la lance d'un geste du poignet dans la corbeille.

- Descend de mon balcon, Jeff.

L'intéressé ne daigne même pas à accorder la moindre crédibilité à mes paroles.
Il s'assoit en tailleur dans la nuit, sur le carrelage beige de mon extérieur. Absurde.

- Pars.

Aucune réaction. J'appuie sur la baie vitrée, froide, sors sur ma terrasse,
Le vent glacial me fouette le visage, les cheveux frivoles s'emmêlent.

Il continue à sourire tandis que je m'approche, sa silhouette s'affirmant dans l'obscurité.
Je continue à réduire la distance, accélère le pas, tiraillée par un affreux pressentiment.

L'écarlate a imbibé la presque totalité de son sweet-shirt, son rire résonne en une bande son d'horreur.

Toujours en tailleur, entrain d'agoniser sur le carrelage devenu rougeâtre.

- Et... Si....

Respiration irrégulière.
Je peine à sortir de ma transe, mes membres pétrifiés d'effroi.

- C'était... À mon.... Mon tour...

La trousse de secours arrachée de sous mon bureau.
Il n'a pas voulu prévenir ni la police, ni les urgences, trop dangereux pour son statut de journaliste illégal.
Un risque inconsidéré, une partie de l'intrigue m'échappe.

-... D'aller dormir...

La quatrième catégorie [Jeff the killer]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant