Cerca

11. Rayane

J'avais finalement réussi à le sortir. Cette phrase elle me hantait. Peut être parce que je l'avais jamais dit à personne. Personne sincèrement en tout cas. Et pas non plus dans un moment de lucidité comme celui là.
Je les avais peut être déjà dit ces mots mais j'étais tellement sincère que j'avais cru m'effondrer tellement c'était lourd à porter. L'amour ça te tombe dessus quand tu t'y attend le moins ? Ouais c'est cliché mais c'est tellement vrai. Y a rien de plus vrai qu'à ce moment là. Pourtant c'était pas gagné à la base.
On s'était quand même rencontré dans des circonstances particulières. On y a jamais fait référence parce que pour nous ça n'a aucune importance, mais sûrement que l'âge qui nous sépare ça aurait peut être dû nous éloigner. Bah pas du tout. Six ans c'est que d'al. C'est qu'un chiffre parmi tant d'autres. Et puis six ans ce n'est pas trente, pas vingt-cinq. Pourquoi ça viendrait nous emmerder ? Non le problème entre nous venait de la situation dans laquelle on était chacun.
Quelques éléments nous liaient d'ailleurs. Une absence totale de présence maternelle, une envie dévastatrice de dégager de son quotidien et surtout un manque d'attachement à tout ce qui nous entoure.
Ça peut paraître génial d'être constamment détaché. Bah pas du tout, on se sent extérieur à notre propre monde, intouchable. C'est horrible comme sensation.
Et puis on s'est rencontré.
Je sais pas si ça a été pareil de son côté parce que j'suis pas dans sa tête et qu'on en a jamais vraiment parlé mais pour moi en tout cas ça a été immédiat. J'ai juste jamais voulu me l'avouer. Parce que j'avais trop peur, et parce que y a cette merde toujours présente et écrasante.
J'avais pas de mots appropriés pour dire ce que je ressentais pour elle, ces mots là n'étaient pas assez forts pire ils n'existaient même pas.
'' - Ouais.. Je t'aime Denitsa. '' les mots étaient repartis tout seul alors que ma brune était toujours en état de choc face à moi. N'abandonne jamais c'est ça ? Comment on est censé faire lorsqu'on sait d'avance que se battre contre un iceberg n'allait servir absolument à rien ? J'aimerais qu'elle me donne cette volonté qui n'a jamais fait partie de mon intégrité.
Je suis un lâche c'est définitif.

En relevant les yeux vers la mer face à moi j'étais contraint de me mettre à la réalité qui s'infligerait à moi. Les souvenirs qui étaient gravés dans ma tête et donc dans la sienne n'étaient pas encore assez nombreux.
Je pourrais paraître totalement schizophrène parce que je veux qu'elle ait assez de souvenirs de moi mais que pour autant elle n'ai aucune larme à mon égard. C'est paradoxale. C'est totalement moi.
Le fait est que cette réalité qui nous consumait tous les deux et dont je suis le seul à être au courant est de plus en plus difficile à gérer. C'est vrai que peu de choses me retiennent encore. À vrai dire il n'y en a qu'une et elle porte son prénom. Et si elle n'était pas là je serais sûrement encore plus tranquille, là éloigné de toutes les personnes qui étaient susceptibles d'avoir croisées mon chemin.
Denitsa n'aurait du rien en avoir à faire de moi. Au départ notre relation - si on pouvait appeler ça une relation d'ailleurs - n'avait rien à voir avec ce qu'elle est aujourd'hui. Le fait est qu'à l'époque je lui laissais entendre que je ne m'attacherai jamais à personne. Ce n'était pas totalement faux car j'en étais moi même persuadé. Mais aujourd'hui la réalité est bien différente. Et elle sait parfaitement que je suis attaché à elle. Parce que je suis revenu et qu'elle a bien compris que je ne revenais jamais d'habitude. Avec toutes celles que j'ai croisé. Même la fille avec qui je l'ai trompé. J'ai honte putain mais honnêtement je ne me souviens même plus de son visage. Juste qu'elle avait des yeux à peu près clairs. Sûrement bleus délavés. Mais rien à voir avec les reflets chocolatés et chauds de la femme qui hantait constamment mes pensées.
La mer faisait des vagues lasses à quelques mètres de moi laissant l'eau glisser doucement sur mes jambes étendues devant moi. Je me demandais si vaguement je manquais à ma mère. Chaque mère digne de ce nom ressentirait le besoin vital de savoir ses enfants heureux et posés. La mienne doit faire exception à cette règle. Elle ne m'a plus donné une seul signe de vie depuis cette fois où elle m'a appelé. Même pas un message, rien.
Au moins j'avais réussi mon pari sur elle, lorsque je déserterais ma place elle n'aura aucun remord à m'accorder. C'est ce que j'aurais voulu pour la petite brune qui était en train de dormir à mes côtés. Elle était si belle avec ses cheveux étalés sur sa serviette. Son maillot de bain rose fluo rendait son teint encore plus bronzé.
Elle était belle à en crever.
Alors que je fixe l'horizon un mouvement sur ma gauche me fait sortir de ma léthargie. C'est mon ange qui se réveille. Denitsa c'est un peu cet être exceptionnel qu'on ne rencontre qu'une seule fois dans sa vie. Et dés qu'on pose les yeux sur elle on sait d'avance que notre vie ne sera jamais plus comme avant. Des êtres comme ça sont des âmes sœurs.
Et si chaque histoire est pas différente je suis intimement convaincu que si on aime vraiment qu'une seule fois c'est parce qu'il n'existe qu'une seule personne qui est faite pour nous que cette terre.
C'est romantique hein ? C'est à cause de Denitsa elle me rend faible face à tous ces trucs à l'eau de rose qu'elle me force à regarder de temps à autre. Apparemment elle aime les comédies romantiques. Ce n'est pas spécialement mon cas mais je prend toujours sur moi pour lui faire plaisir.
Laisser une bonne image de toi. C'est ce que je me répète tous les jours. Ça paraît extrêmement difficile quand on s'appelle Rayane Bensetti. Mais peu importe au moins j'ai le mérite d'essayer.
Elle me regarde à présent, plongeant ses yeux Nutella dans les miens. Je crois que je retomberais tous les jours amoureux de son regard. Au moins pour les dernières fois où je pourrais les voir.
'' - Qu'est ce qu'il y a ? '' elle avait un petit sourire et ça m'intriguait. Qu'est ce qu'elle avait encore derrière la tête ?
'' - Rien je te regardais c'est tout.
- Denitsa, je commence à te connaître tu sais. '' elle fit une petite moue adorable mais redevins vite sérieuse.
'' - Tu sais tu as réussi à éviter la conversation une fois grâce au deal que tu as remporté au billard mais ça ne sera pas toujours le cas.
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Tu sais à quoi ça me fait penser cette situation là ?
- Dis ?
- Lorsque tu refusais de me dire pourquoi tu m'avais embrassé alors que je dormais. '' je riais à l'évocation de ce souvenir. J'avais l'impression que c'était dans une autre vie, extérieur à celle que je mène à présent. À l'époque et c'était vrai je n'embrassais que des femmes que je trouvais magnifiques. Ça craint n'est ce pas ? Mais c'était comme ça. Je n'avais rien à perdre, tout à gagner. Jusqu'à ce qu'un matin je me réveille et tout avait changé.
'' - Oui, c'était con hein.
- Très. Faut dire que je balançais entre le fait d'avoir halluciner ou non.
- C'était le but. Je voulais te remercier, à ma manière.
- Assez spéciale quand même.
- Mais maintenant tu sais que je peux faire nettement pire.
- Je sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise chose.
- Et je sais pas si c'est un compliment.
- Pas vraiment.
- Parfait, je note Deni. '' je souriais bêtement. Elle était tellement belle. J'adorais sa façon de me répondre, cette faculté qu'on avait de jouer au ping-pong dans nos discussion. On avait toujours un petit quelque chose pour relever l'humour de la situation.
Putain ce que ça allait me manquer.

L'alcool coulait flot. Je ne savais pour quelle raison très spéciale mais Denitsa avait tenu à se bourrer la gueule comme une folle dans la chambre. Cela avait un goût de déjà vu. Elle n'avait pas encore donné d'explication plus ou moins rationnelle à cette envie aussi soudaine que prématurée. Mais j'étais un homme qui quand il le voulait pouvait se montrer patient. Alors j'attendais.
J'étais aussi contre le mur, à même le sol avec une bouteille entre les jambes. Denitsa était face à moi dans la même position mais elle était appuyée contre le socle du lit. Elle riait aux éclats et dés qu'elle affichait une mine dubitative elle se descendait une nouvelle gorgée.
'' - Alors Déni.. si tu me disais ce qui se passe.
- Ah la la. Ce qu'il se passe. Comme si c'était si simple.
- Ce n'est pas pourtant toi qui arrive à simplifier les choses ?
- Là non j'y arrive pas.. ça se voit non ? J'serais pas en train d'me défoncer la gueule.
- Alors ?
- De m'mettre minable...
- Denitsa.
- Oui, Ray ?
- Pourquoi t'es dans cet état là ? '' elle riait de nouveau en fixant le plafond nerveusement. On aurait dit qu'elle était à la recherche d'une étoile qui lui inquiétait le chemin qu'elle était censée suivre. Le fait est que la réalité n'était pas aussi simple. Elle avait raison, si la vie humaine l'était ça se saurait.
'' - Crois moi tu ne veux certainement pas le savoir. '' elle disait ça avec une certaine amertume. Comme si cette situation était déjà arrivée. Mais mon esprit embaumé d'alcool n'arrivait plus à déchiffrer les différents événements. Je ne comprenais pas non plus ce qu'elle insinuait. J'étais partagé entre fatigue et alcool. Qu'est ce qui m'a prit de boire autant ?
'' - Je veux tout savoir sur toi Dénitsa. '' et c'était vrai elle pouvait tout me dire. Même ce dont elle a le plus honte. Après tout j'allais l'emporter avec moi, et ses secrets seront toujours bien gardés.
'' - Laisse tomber. '' et finalement c'est ce que je fis. Ce soir elle allait être davantage têtue que moi. C'était un mal pour un bien, l'état dans lequel j'étais m'empêchait de me concentrer sur la situation dans laquelle j'étais en train de nous laisser glisser tous les deux.
Une pente relativement penchante dans le mauvais sens. Je n'avais probablement pas le droit de l'emmener avec moi, mais à présent c'était ainsi : où j'allais elle me suivait.
J'espérais seulement que ça n'allait pas s'appliquer à toute circonstance.

-------------

Coucou les amis ! Nouveau chapitre que j'ai adoré écrire j'espère que vous l'aimez autant que moi. Et aujourd'hui c'est mon anniversaire j'ai 18 ans !
Xxx Lisa.