15. Denitsa

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Le soleil brillait, les oiseaux chantaient, le vent soufflait un air frais. L'herbe recouvrait les allées fleuries par les arrosages automatiques. Mes pieds se plantaient difficilement devant la pierre tombale face à moi. Alors c'est là, c'est là qu'il repose. J'en avais entendu parlé mais je n'étais pas encore venue de ma propre volonté. Il faisait beau en ce mois de Mars. Quelle année. Quand j'y repense j'en ai le vertige. Mes cheveux glissaient le long de mes épaules et le long de mon dos. Je serrais mon blouson en cuir contre moi pour me protéger du vent frais. Mon ventre arrondis par les premiers mois de grossesses me rappelaient que finalement la volonté de son père allait être réalité. Dommage qu'il ne soit plus là pour le voir. J'aurais aimé qu'il voit ce qu'on avait réussi à produire malgré toutes les difficultés qui pesaient au dessus de notre tête. À en croire mon médecin ce bébé est un battant. Comme lui, son grand père. Beaucoup de choses ont changé. Je pouvais pas continuer comme ça, comme de rien. J'étais plus toute seule à présent. Alors j'en suis arrivée à là dans ce cimetière, la main sur le ventre, la larme au coin de l'œil. On aurait pu ne pas lui pardonner de nous avoir laissé derrière lui avec cette douleur. La sienne.
J'ai bien cru qu'il allait devenir fou.
J'ai arrêté de voyager à droite à gauche pour mes mois de grossesse. Voilà, posée à Lyon, l'une des plus belles ville pour la famille désormais, on avait fait comme d'habitude, à l'arrache, en improvisation c'est là qu'on est les mieux décidément. En attendant que mon voir de chou pointe le bout de son nez, on allait attendre qu'il soit là avec nous. La main de Rayane se glissait dans la mienne venant la serrer doucement. Bachir était là depuis déjà plusieurs mois mais Rayane n'avait jamais eu le courage d'y venir et encore moins tout seul. L'annonce de la tumeur, le décès de son géniteur et puis rapidement la descente aux enfers. Je pouvais difficilement lui jeter la pierre. Je sais pas si j'aurais tenu à sa place si jamais ma mère m'avait annoncé ça dans un lit d'hôpital.
Mais aujourd'hui tout était clairement différent. Oh oui. Aujourd'hui je souriais, on avait gagné, on avait vaincu cette tumeur. Rayane vivait et encore mieux il était en parfaite santé.

Flash Back

Les rideaux étaient tirés et toujours son corps allongé dans ce lit blanc. Tout ici était blanc comme mon teint à présent. Ils allaient venir le chercher dans quelques minutes pour une opération au haut risque. Mais le médecin avait décidé de suivre ma volonté. Foutu pour foutu autant tout essayer. Tous les examens étaient bons et même si la maladie avait prit du terrain, que ses chances de survies étaient faibles elles n'étaient pas inexistantes. Et c'est pour ça que je gardais espoir, jusqu'au bout, pour lui, pour nous.
Après la lecture de la lettre de Rayane j'avais compris qu'au moins une des volontés de Bachir serait exaucée : j'attendais un enfant. Notre enfant exactement. De quelques semaines ce n'était rien du tout mais il était là et cette fois ci j'étais bien décidée à me battre pour le garder. Je demandais chaque jour au ciel de m'aider si au moins il existait. Jade était restée à mes côtés tout ce temps. Elle était autant à fleur de peau que moi comme si c'était son fiancé qui était allongé là devant elle entre la vie et la mort.
'' - Tu crois qu'il va s'en sortir ?
- Il a intérêt, un petit monstre l'attend. '' c'est vrai. Elle a toujours ce don pour me faire sourire dans les pires situations. S'il ne se réveille pas, je lui pardonnerais jamais de m'avoir laissé derrière comme si de rien n'était avec cette affreuse douleur. Et dire qu'il pensait sérieusement que je méritais quelqu'un de mieux que lui. Quelle connerie. Si j'étais vers lui c'était qu'en soit je ne pensais personne de mieux qualifié que lui. J'avais envie de l'insulter pour qu'il se réveille.
Je le hais autant que je l'aime.
C'était pourtant facile de l'aimer. En soit l'aimer c'est la meilleure chose au monde, il est sans aucun doute ce qui m'est arrivé de mieux. Mais moi je veux pas que ça s'termine de cette façon là.
Je veux pas vivre dans ce monde sans toi.
J'ai beau avoir des amis, j'ai beau avoir une famille, je pensais pas que mon cœur il serait aussi meurtri. Je veux que tu reviennes. Moi non plus j'peux pas vivre sans toi. Jamais plus je pourrais m'endormir sans penser à toi, sans rêver de ce qu'on nous a interdit pire ce qu'on a échappé. Finalement je t'ai trouvé, mon double, mon âme sœur.
Et maintenant je tourne en rond sans toi. La pièce tourne autant que je marche en rond. J'aimerais me râper les doigts contre me murs, me briser chaque os de mon corps pour être dans le même état que toi.
'' - Je l'aime Jade.
- Je sais Bulgaria. Il t'aime aussi tu sais. Il a juste été con de se rendre aussi vite.
- Il avait pas le droit...
- Eh eh. '' elle venait mettre ses deux mains que mes épaules et me regardait dans les yeux un sourcil relevé.
'' - Si toi aussi tu arrêtes d'y croire qui sera là pour lui Déni ?
- T'as raison, j'ai pas le droit d'lui faire ça. ''

Je serrais toujours la main de cet homme, miraculé on pourrait vraiment l'appeler de cette façon. Il est là où il devrait être mais face à ce qu'il a échappé. C'est beau non ? La larme au coin de l'œil, le cœur lourd, on quittait les lieux doucement sans la moindre parole. En arrivant dans la voiture Rayane reprenait une inspiration comme s'il venait tout juste de commencer à respirer. Le jour où il s'est réveillé j'étais partagée entre une tonne de sensations radicalement opposées. La colère, la haine, l'amour, le soulagement, l'incompréhension. Et la première chose qu'il avait trouvé à me dire c'était :
'' - C'est beau la mort finalement. T'es toujours là.
- Je suis là parce que t'es vivant, Rayane. '' il en avait perdu sa langue. Il n'avait décidément pas compris qu'il n'était pas condamné même s'il s'est laissé délibérément mourir. Je n'avais jamais autant engueulé quelqu'un en un si petit laps de temps. J'aurais pu l'étriper de mes propres mains pour lui faire comprend ô combien c'était un abruti j'avais quand même fondu en larme. Il était sauvé et c'était bien ça le plus important.
La musique romprait le silence qui régnait dans la voiture. Ce n'était pas un silence pesant mais serein, il était enfin en paix avec lui même. On avait décidé de vivre à Lyon elle temps qu'on en aurait besoin, quitte à se poser quelque part pour une fois on allait pas le faire pour rien. Même si notre logement n'était pas le meilleur sur terre au moins on en avait un. Ma mère était revenue de son voyage apparemment elle était partie. J'étais même pas au courant. Ce n'était pas dérangeant au final, elle faisait bien ce qu'elle voulait. Justement elle venait chez nous pour déjeuner. J'avais essayé de dissuader Rayane de la recevoir. La dernière fois qu'on s'est parlé on pouvait pas dire que ça s'est très bien terminé. Mais têtu comme il est il n'avait pas lâché. Et même il a fait pire, il a invité la sienne. Moment de gêne assuré. Et dire qu'il allait falloir que j'assume ces deux femmes sois mon toit en même temps. Quelle merde.
'' - On a tout ce qui nous faut ? Pas de dernière course de dernière minute ?
- Au pire ça nous donnera une excuse pour nous éclipser.
- Aller c'est un mauvais moment à passer après on en parle plus.
- Mais chéri pourquoi t'as voulu que ta mère à toi vienne en plus..
- J'ai envie que tu la connaisse. Et qu'elle sache la vérité. '' je bloquais deux secondes sur ce qu'il venait de m'annoncer.
'' - Attend elle n'en savait rien ?
- Absolument rien.
- Mais t'es dingue ?
- Et pourquoi pas ? Je voulais que personne pleure.
- C'est quand même ta mère.
- Elle a sa famille, sa vie, j'ai la mienne, c'est de bonne guerre tu sais.
- Ouais mais quand même... '' je riais quand même quel homme, c'est ce que j'aimais le plus chez lui je crois : sa façon de penser. Même si parfois elle fait peur.
'' - Et toi, tu m'as jamais dit pourquoi tu t'étais disputée avec la tienne.
- Si je crois.
- J'me rappelle plus...
- C'est pas grave. Elle m'avait demandé des comptes sur pourquoi j'étais partie sans rien dire.
- Et ?
- Et elle ne m'en avait pas donné sur son départ à elle non plus sur le choix de son nouveau mec. Pourquoi moi j'aurais eu à le faire ?
- Et tu oses me critiquer mademoiselle ?
- Évidemment. Te remettre les idées en place ne te fait jamais de mal.
- T'as raison, me laisse jamais rechuter. '' je prenais une profonde inspiration. Le revoir sur son lit d'hôpital ou même pire allongé à côté de sa baignoire reste vraiment traumatisant.
'' - Tu sais je l'aurais fait si tu m'en avais parlé.
- Je sais Déni. '' il mordillait sa lèvre inférieure et se garait devant notre immeuble. Je voyais que revenir à ses sources lui plaisait beaucoup. On avait construit quelque chose qui ressemblait à une histoire stable alors on avait tout ce qui nous fallait. En arrivant dans notre salon je réalisais que rien n'était préparé. Je riais nerveusement en expliquant à mon très cher compagnon que nous étions dans une merde noire.
'' - On a qu'à aller au petit resto au coin de la rue.
- Vendu. '' j'avais pas envie de cuisiner surtout si c'était pour empoisonner mes invités.

On s'asseyait tous ensemble à la table que le serveur nous proposait. La mère de Rayane, Sandra, s'asseyait face à moi, son compagnon à ses côtés. Ma mère était à la gauche son nouveau mari en face et Rayane à ma droite. Je crois que plus mal à l'aise que moi se relevait être impossible. J'ai beaucoup de mal à suivre la conversation que Rayane tente d'engager et ni l'une ni l'autre n'aide à notre tâche. Jusqu'à l'arrivé de la question que je redoutais tant.
'' - Tu vas garder le bébé ? ''

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Coucou les amis ! Ça faisait longtemps pardon pour cette absence j'espère que ce chapitre vous plaît. Vous voyez je ne suis pas si sadique...
Xxx Lisa.

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