Chapitre 28 : Courir

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Je n'en crois pas mes yeux. Il est là, juste devant moi. Je supplie aux trois autres :

-Ne tirez pas !

Je m'approche. Mon frère transformé en mutant. Je n'en crois pas mes yeux.
Timoe fait un pas en avant. Il me regarde bizarrement. J'ai l'impression que c'est l'enveloppe charnelle de mon frère, mais que son âme ne se trouve pas à l'intérieur. Son regard est vide. Mon frère. Je le revois enfin. Mes yeux se brouillent de larmes.

Sous le coup de l'émotion, je crois presque à une hallucination. Je veux m'assurer qu'il est réel.
Alors je lève ma main pour le toucher.

-Harmony, ne fais pas ça ! C 'est un mutant ! me rappelle Karl.

Trop tard.

Mon index frôle son front. À ce contact tout bascule. Timoe m'agrippe les bras. Je tombe comme une idiote. Mon mutant de frère me griffe la peau. Son poing se cogne contre mon estomac. La douleur surgit en une seconde. Je ne vois plus rien. Je reçois un nouveau coup dans la mâchoire. J'ai le goût de sang dans la bouche.

Jim a tiré. Je sens la balle siffler à mes oreilles. Timoe s'affale sur le sol de la boutique, inerte.

Je me relève, déboussolée. Je crache du sang. Karl est furieux :

- Tu es complètement folle !

S'approcher d'un mutant comme ça ! Tu n'as pas compris, encore ? Ce ne sont pas des humains ! Ils sont morts ! Ce sont des mutants !

Il a raison. Qu'est ce que j'avais cru ? Que mon frère allait me reconnaitre subitement et redevenir vivant ? J'ai vraiment été bête.

La douleur s'intensifie au niveau de mon genou. J'ai dû me tordre quelque chose en tombant.

Le sol vacille. Ma tête retombe lourdement sur le sol. Je tombe dans les pommes.

Combien de temps s'est-il passé pendant mon coma ? Une heure ? Deux ? Je ne sais pas.

Je me réveille dans les bras de William. Ça ne pourrait pas mieux tomber. Il me porte et je vois que Karl et Jim sont avec nous. Nous sommes dehors. Il fait chaud. Ma langue est pâteuse.

William s'aperçoit que je suis réveillée. Il désigne Karl et Jim du menton et me met au courant :

- Ils sont d'accord, pour le plan de rébellion. L'idée leur avait effleurée l'esprit à eux aussi. Karl a été plus suspicieux mais il a finit par accepter.

Il continue :

-Là, nous sommes en train de revenir sur nos pas. À l'entrée de la ville. Il faudra être prudent, car au panneau de la ville il y aura sûrement des gardes. Il faudra que nous courions à ce moment-là.

Je peine à répondre :

- Et où est-ce qu'on va aller après, si on réussit à s'enfuir du troisième cycle ?

-Jim connait un endroit pas loin d'ici qui pourrait nous cacher. Le temps pour nous d'organiser notre plan d'attaque pour renverser le gouvernement.

Je rajoute :

- Et tuer Maru...

Il sourit. C'est la première fois que je le vois sourire. Il est encore plus charismatique quand son visage est joyeux.

Du coin de l'oeil, j' aperçois une mutante qui sort d'une rue adjacente. Elle est abattue sur le champ.

Au bout de quelques minutes, nous apercevons bientôt le panneau de la ville.

Près de la frontière, dix gardes se tiennent debout, mitraillette en avant. Ils ne nous voient pas pour le moment.

-Te sens-tu prête à courir ? me susurre William.

J'acquiesce d'un signe de tête. Il me repose sur la terre ferme.
Karl nous toise du regard, puis se tourne vers les dix soldats :

-À mon signal, on court sans s'arrêter, jusqu'à qu'on soit hors de vue. Les gardes sont trop nombreux pour qu'on puisse les tuer tous.

-Ça marche, fait Jim.

Nous nous taisons. Je n'ai pas vraiment peur. Je suis endurante. Je vais y arriver.

- Go ! s'égosille Karl.

Et nous détalons comme des lapins.

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