Chapitre 14

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Chapitre 14


Cette après-midi n'a pas été des plus passionnants : toujours pas de nouvelle de Suzanne, Elia ne nous a pas adressé la parole avec Nora - à part pour nous demander pourquoi on faisait une gueule d'enterrement- et je n'ai pas reparlé Maël, car les seules fois où je l'ai vu, j'étais avec Elia, et je l'ai un peu ignoré...

Je ne sais pas quoi faire à propos de lui. Maël. Tout m'attire en lui, ou presque. Son visage d'ange, ses épaules larges, son sourire, sa voix... Mais je me sens tellement coupable ! A chaque fois que je me surprends à penser à lui, je m'excuse intérieurement auprès d'Elia. Comment je peux lui faire ça ?

Je me sens ridicule. Je ne le connais même pas. Il a peut- être fait du mal à Elia pour qu'elle soit aussi distante avec lui. Je n'ai pas envie de voir le visage d'Elia se décomposer si je lui avoue mes sentiments pour lui. Enfin sentiments... Je mélange encore tout. Je ne peux pas «tomber amoureuse» de quelqu'un au bout de deux jours ! « Tomber amoureux »... c'est si pathétique comme expression. On se croirait dans une vieille comédie romantique américaine complétement clichée, où les deux acteurs principaux se rencontrent en se rentrant dedans.

Je rentre dans ma chambre. La nuit s'annonce bonne. Insomnie en approche. La nuit est censée porter conseil, mais si je ne dors pas...

Je n'ai pas faim, je ne vais pas manger. Elia non plus, mais Nora la force à y aller. Je m'allonge sur mon lit défait en me tapant le front contre celui, vide, de Nora. Je reste un long moment, étendue sur le ventre, fixant l'armoire en face de moi. Des formes se discernent dans les dessins du bois, et j'essaie d'imaginer des visages, des paysages ou des animaux. J'arrive à trouver un loup, ou un chien, parmi les nuages, les vagues et les montagnes. Le soleil se couche, et la pièce se fait plus sombre. J'allume ma lampe de chevet, et prends mon livre.



Il est 20h quand les filles reviennent, avec une odeur de frites qui ne me redonne pas beaucoup d'appétit. Quand elles ont fini de se préparer pour aller dormir, Elia s'étale sur son lit, et Nora escalade lourdement l'échelle du sien. Je l'entends s'écrouler à son tour.

« Pas de nouvelles de Suzanne ? » Je demande prudemment,m'attendant à une nouvelle crise de nerfs d'Elia.

« Non,toujours pas... »


J'allume mon portable, et je vois qu'il est 3h du matin... Je ne dors toujours pas. Je sors de mon lit, et me dirige silencieusement vers la fenêtre, à l'autre bout de la chambre. Elle s'ouvre en grinçant exagérément. Je me hisse sur le rebord qui est assez grand pour que je puisse étendre mes jambes dessus. J'observe l'extérieur. D'ici au premier étage on peut apercevoir la forêt, dont les arbres immobiles ressemblent à des fantômes lugubres. En se penchant de l'autre côté, on voit le Bâtiment C qui se découpe dans la nuit noire. Seul le petit parc juste en dessous de moi est éclairé par la faible lueur de la pleine lune. C'est un spectacle étrange. L'étang est baigné par la lumière laiteuse des étoiles. En parlant d'étoiles... Quand je lève la tête vers le ciel, je suis impressionnée par leur nombre et leur beauté. Sans pollution lumineuse, les constellations se démarquent, et les millions d'astres clignotent sur la voûte noire du ciel.

J'attrape ma lampe de poche et mon livre, et m'installe confortablement ( du moins, le plus confortablement possible quand on est assis sur un muret). Le doux vent frais de la fin de l'été me fait frissonner, mais le spectacle est trop beau pour que je m'en aille. Soudain, un bruissement de feuillage me fais sursauter. Je me retourne et lâche mon livre, qui tombe dans un arbuste du petit parc, trois ou quatre mètres en dessous de moi.

« Et merde », je dis à voix haute.


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⏰ Dernière mise à jour : Jul 30, 2017 ⏰

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