Chapitre 6 : Le désert du Cobra

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Épuisée par toutes ses pensées et réflexions, Elizabeth se coucha sur son lit. Elle s'endormit aussitôt bien que le soleil était encore haut dans le ciel. Elle dormit quelques heures puis fût réveillée par une voix lointaine qui hurlait : "Terre en vue".

  La jeune femme se leva d'un bond pour rejoindre le pont. La vue était à couper le souffle. Le Mary Jane se dirigeait vers une immense mer de sable fendue en deux par un large canyon. Un vent chaud venu des terres lui soufflait doucement au visage, faisant voler quelques mèches de cheveux qui retombaient de son chignon décoiffé. Elizabeth trembla face à la contemplation d'un tel paysage, sa peau blanche se couvrant d'un délicieux frisson. Elle n'avait pourtant pas froid mais elle découvrait enfin ce qu'était la liberté. Elle inspira à fond et bloqua l'air dans ses poumons. Le vent salé de la mer fit  place à l'odeur si particulière de la chaleur et de l'aridité.

  Elizabeth fixait le paysage, éperdument amoureuse de ce nouveau monde lorsqu'un homme approcha derrière elle.

– Magnifique, n'est-ce pas ? demanda Kaylin, faisant sursauter la jeune femme.

  Elle se tourna vers lui, les yeux brillants et le sourire aux lèvres, comme une enfant déballant un cadeau. Sur son visage, l'excitation et la curiosité étaient clairement affichées.

– Splendide, en effet ! Dites moi, Kaylin, qu'est-ce donc ?

  Il sourit face aux questionnements incessants d'Elizabeth.

– Vous n'arrêtez donc jamais de poser des questions ?

– Jamais, souria t-elle.

– Le désert du Cobra.

– Un désert ?

– Oui. Ce sont des zones arides. Il n'y a jamais de verdure dans ces grandes étendues de sables.

  Le bateau s'approcha rapidement du canyon et s'y engouffra. L'espace était assez restreint. Il restait moins d'un mètre entre les parois et les rambardes du navire. Elizabeth retenait son souffle tandis que le soleil disparaissait, laissant place à des ombres gigantesques qui semblaient danser sur les roches. Elle se retourna vers Kaylin, légèrement inquiète par ce changement si soudain. Celui-ci se contentait de la regarder avec un léger sourire, qui se voulait rassurant. Pendant de longues minutes, le dirigeable manœuvra lentement entre les parois rocheuses. Et enfin, le canyon déboucha sur une vaste plaine entourée de roche orangée.

  Une bouffée de chaleur écrasante rougit les joues pâles de la jeune femme. Le sable s'insinuait partout dans les rues de la ville, qui s'étendait jusqu'à ses limites naturelles. Les petites habitations, toutes identiques, semblaient s'effriter sous le soleil de plomb. Certaines étaient plus hautes que d'autres, mais elles étaient toutes construites sur la même base d'un carré d'à peine cinq mètres de côté. Des draps colorés pendaient après les fenêtres en bois. Ceci était la seule et unique trace de vie. Il n'y avait personne dans les allées sableuses, pas même un petit animal errant.

  Et tout au fond de la ville, une imposante maison se dressait, surplombant le reste de la cité. De hauts murs en pierres rouges, qui semblaient plus solides et récents que le reste de la ville, cachaient un manoir. Il était composé de cinq ou six étages avec de nombreux balcons taillés dans le roc. La façade était en réalité une énorme gravure, comme celle qu'Elizabeth avait autrefois pût admirer dans la cathédrale Saint-Cyprien. De simples spirales se dessinaient sur les murs, jouant avec les ombres pour créer des profondeurs. Les fenêtres en argents étaient fermés, empêchant l'air chaud de pénétrer à l'intérieur.

  Plus le dirigeable s'approchait de cette splendide demeure et plus Elizabeth se sentit oppressée, prisonnière de l'imposante masse. Son instinct lui hurlait la prudence.

Dans les rouages du temps (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant