Cinq jours après le départ de Rispu, Vardan et ses hommes aperçurent dans la nuit de la lumière se détacher, immobile, d'entre les ombres qui l'étouffaient. Ils plissèrent des yeux avant de se mettre à sourire : encore une journée à cheval et ils bénéficieraient d'une couchette avant de reprendre leur route le lendemain.
A mi-chemin, de grandes barrières de bois les stoppèrent. Il faisait à peine jour, quelque rayons peinant à se faire un chemin entre les airs nocturnes que prenait encore le ciel. Gardées par les soldats de Tarian, ces derniers se tenaient en ligne, surveillant les lieux du regard.
Tout devant ces barrières, les lieux étaient investis par de grands draps perchés sur de longs bouts de bois, de sorte à créer des tentes de fortune. Elles ne devaient protéger ni du vent, ni de la pluie. Sans doute, vu d'en dessous, vous pouviez admirer le ciel étoilé sans grand dérangement. Des familles s'y regroupaient et, le groupe passant au travers, Adalrik se retourna alors que le félin grondait, constatant qu'un père avait tenté de cacher son enfant sous la carriole de la bête, et stoppant son geste en croisant les yeux de l'animal.
Il fronça les sourcils lentement, désolé.
De longs murmures montaient tout autour du groupe de marchands et leurs gardes, et Adalrik resserra les mains sur les rênes. Le cheval au bout, qui tirait son chargement avec ardeur, ralentit en réponse, et Adalrik claqua les rênes d'un mouvement sec sur sa croupe. Il ne souhaitait pas se retrouver à l'écart de son groupe, tous ces yeux rivés sur lui. La détresse qu'il pouvait y lire le rendait mal à l'aise. Il devait réussir sa mission. Il avala sa salive.
Les habitants des lieux s'étaient réunis et plantés comme pour leur indiquer le chemin, droit comme des i, leurs têtes renversées vers l'arrière et leurs regards implorants. Pour s'en cacher une bonne fois pour toutes, Adalrik rabattit sa capuche sur sa tête. Derrière lui, il crut entendre l'animal pousser une sorte de rire.
Dans la pénombre, la scène prenait un air lugubre et étouffant, à peine éclairée de quelques rayons et de quelques lanternes, juste ce qu'il fallait pour détacher mes ombres et laisser entre-apercevoir quelques détails effrayant sous cet angle.
A quelques centaines de mètres se trouvaient les remparts de Disp.
La ville-passage, tel qu'il était usage de l'appeler, se dressait, bâtie vers le haut, montant en colonne comme un escalier taillé directement dans la roche. Les maisons à l'arrière étaient toujours plus hautes que leurs précédentes, et leur hauteur ne semblait avoir de limite que le ciel. Elles surplombaient même les montagnes de schiste rougeâtre sur lesquelles elles reposaient. Chaque bâtiment était éclairé d'une lumière cascadant de son point le plus haut et venant trouver fin là où elle entre-choquait la bâtisse plus basse, mordant son toit incurvé, dont les tuiles étaient façonnés dans le schiste des montagnes, et venant continuer sa route. Le schéma se répétait jusqu'au sol, la lumière disparaissant en dégradé dans les ombres.
Nul doute que Disp était plus belle de nuit que de jour.
Une troupe de soldats demanda au groupe de marchands de se stopper, vérifiant leur pass, les laissant ensuite passer en s'écartant, puis refermant le passage de leur corps en une chaîne humaine. Tous passèrent un à un. Les carrioles de marchandise furent fouillées.
Plus le temps passait, plus Adalrik ressentait un malaise lui monter. Il espérait qu'aucun soldat ne jette le moindres doute sur sa couverture. Le Roi lui avait demandé de présenter son sceau pour pouvoir passer la première ligne de la frontière. La seconde en revanche, à la sortie de Disp, ne devait en aucun cas avoir de soupçons, ou sa tête se retrouverait bientôt sur une pique.
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Elestreÿa : l'Assemblée
FantasyDe l'Yggdrasil, le Royaume de Tarian n'a hérité que du mauvais : entre pénuries d'eau, chaleur étouffante et froid mordant, le pays ne connaît que de malheurs. En guerre contre Deras depuis trois ans, que se passera-t-il lorsque le messager du roi G...