Elestreÿa : l'Assemblée

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Après le copieux repas qu'ils prirent à l'auberge dans laquelle ils avaient réservé leurs chambres, la plupart des hommes du convoi décidèrent de trouver le sommeil le plus rapidement possible. Bien décidé à faire de même, Adalrik finit par se résoudre à sortir de son lit : quelque chose le tracassait.

La bête, dont la cage était couverte par un grand drap noir au devant des écuries, ouvra les yeux à l'approche du chevalier, et gronda alors qu'il se plantait devant elle sans plus bouger.

- Dégage de là, hein ? C'est ça que tu aimerais pouvoir dire, si seulement tu pouvais parler ?"

En seule réponse, le félin se retourna à l'opposé de la forme sombre de l'homme, qui se détachait au travers du tissu.

Adalrik souffla un grand coup.

L'auberge était placée au fin fond de la ville, tout en bas de ses immenses bâtisses, dans la poussière et l'ombre de leurs lumières. Le sol y était sec et craquelé comme le dessus d'une vieille miche de pain rassis : un bout de ville abandonné, qui rappelait à Disp ses origines et aux voyageurs la véritable identité de Tarian.

Adalrik s'accroupit pour prendre un bout de terre entre ses doigts. Il s'effrita aussitôt et la poussière orangée se dispersa autour de ses doigts comme un vieux souvenir insignifiant.

Devant l'auberge se trouvait une petit cour qui continuait presque dans la seule ruelle par laquelle on y accédait. Les pavés venaient fondre dans la poussière et une vieille statue d'argile rose représentant l'envolée d'un dragon y tombait presque en ruine, tentant inutilement de s'élever en son centre.

Face à l'entrée principale, de l'autre côté de la cour et de cette statue, il y avait les écuries : quelques barres d'attache en bois mangées par quelques insectes, un puits qui n'avait pas embrassé d'eau depuis bien longtemps, rien de plus. Et dans la cour, près des chevaux attachés au bout de longes flambant neuves, le félin et l'homme, comme deux fantômes.

Adalrik aurait aimé pouvoir poser ses mains sur la cage, mais il avait conscience que la bête ne ferait qu'une bouchée de lui, ou de ses mains : autant ne pas lui donner une telle occasion.

Il se contenta de soulever le tissu, en posant un pan sur le dessus de la cage. Le félin ne broncha pas, et le chevalier en profita pour poser sur lui des yeux admirateurs, traçant de son regard chaque courbe de son corps gracieux, à la manière de celui d'une femme, bien que maigre. On lui voyait toutes les côtes, saillantes, et ses omoplates ressortaient avec dureté.

- Je me demande d'où peut venir une bête aussi magnifique que toi ... Je n'ai jamais rien vu de tel." souffla-t-il avec admiration. Le jeune homme attendit une réaction, mais rien ne se produisit. Il eût un petit rire idiot, se lançant ironiquement à lui-même : "Mais bien sûr tu n'en as que faire, tu n'es qu'un animal. N'est-ce pas ?", il marqua une brève pause. "J'avais cru voir en toi quelque chose d'autres, une sorte de ... mais de toute évidence ce n'était que mon imagination. Tu n'es pas de ceux pouvant contrôler la mag-"

Un bruit sourd et un énorme mal de crâne le fit alors vaciller vers l'arrière, l'empêchant de terminer sa phrase. Portant une main sur le sommet de son crâne, il se laissa lourdement retomber au sol, surpris et désorienté. Il comprit alors qu'on essayait de l'assassiner, sans pour autant réussir à faire un seul geste. Entre ses doigts, un liquide chaud coulait, et collait ses cheveux. Ses paupières étaient à demi-closes, pourtant il vit son assaillant, dos à la cage du félin, un reste de bouteille à la main, s'avancer dangereusement vers lui. Il eût un instant d'absence, croyant voir dans la cage autre chose que le félin, puis il tenta de reprendre ses esprits.