Chapitre 6 - Louise

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«Je vais chercher le courrier !»

Je prends mon manteau et mon col, les enfile vite-fait et sors dehors, descends l'allée et arrive au niveau de la boîte au lettres. Je l'ouvre et en sors une liasse d'enveloppes. J'adore aller chercher le courrier, je pense que c'est le fait de recevoir des nouvelles (j'aime d'ailleurs beaucoup ce mot, nouvelles, sa sonorité (j'aime bien sonorité aussi !)). C'est aussi le fait d'avoir des lettres dans la main, ça me détends. Vu comme ça, on dirait que je suis amoureuse des mots, que je suis une écrivaine née, c'est d'ailleurs ce que prétends ma mère, mais je n'écris pas beaucoup. Il faut que l'on me le demande pour que j'écrive, je n'ai pas le temps de le faire souvent. Je m'occupe de tout ici, je fais les travaux ménagers, cuisine et bricolage, je m'occupe de l'administration et le reste du temps, je photographie. C'est ma passion, plus que les mots, j'aime les images. J'ai déjà fait une exposition d'art l'été dernier et j'en prépare une autre. Tout ça pour vous dire que j'ai beaucoup de choses à faire. Je nettoie aussi de temps à autre (tiens, j'aime bien cette expression) mes trouvailles chinées. C'est ma dernière passion.

Je ferme la boîte aux lettres et remonte l'allée gravillonnée. J'ouvre la lourde porte et pose les lettres sur la petite table de l'entrée.

«Ça y est !»

J'examine les enveloppes et trouve : trois factures, deux prospectus et... une lettre de Sacha !

«Si tu me cherches, je suis dans ma chambre maman !

-Oui, oui...», me répond-t-elle d'une voix faible.

Je grimpe les escaliers quatre à quatre et ouvre la porte de ma chambre en coup de vent. Je m'assoies sur mon lit tout en défaisant mon manteau et mon écharpe. J'enlève la bande collante de l'enveloppe puis sors la lettre. Il y a d'autres choses à l'intérieur, je les retire aussi.

Les larmes coulent sur mes joues, tellement de souvenirs sont enfermés dans cette enveloppe. Je sèche mes larmes puis déplie le papier. Je lis la lettre et mes larmes recommencent à couler.

«Mon dieu, Sacha...»

Je me laisses tomber délicatement sur le lit, la lettre contre moi, et me roule en boule, sans jamais finir de pleurer.

Le soir dépose doucement et au fur et à mesure sa douce couverture. Mes larmes se sèchent en même temps que la nuit arrive mais je suis empreinte d'un serrement au cœur et à la gorge. Je passe ma main sur mes yeux, dépose la lettre et les trésors sur mon bureau de bois et descends. Ma mère est installé sur le fauteuil du salon, elle tricote. Cette vision pourrait paraître magique pour certains, mais pour moi cela fait peur. Ma mère ne sait pas se débrouiller toute seule, je fais tout ici ! Ce n'est pas joyeux. C'est pour ça (en partie) que j'enviais Sacha et que je l'aimais. Chez elle, il n'y a que ce mot : joie, associé avec famille, ce qui est un merveilleux mariage.

Je regarde ma mère, si fragile, et faible, incapable de travailler et je me dis que Sacha à tout juste. Il faut que je vive ma vie, que j'avance sans me retourner, et profiter, être heureuse, exploiter mes capacités, aider les autres, vivre. Ma mère se tourne vers moi et me sourit faiblement.

«Tu seras gentille de faire le dîner Louise, il commence à se faire tard et mon ventre crie famine.

-Oui, ça va, répondis-je., merci de t'inquiéter mais tout va bien.»

Je sors du salon et me dirige vers la cuisine d'un pas rapide et fluide. Que ça fait du bien de se détendre un peu, de montrer aux personnes que tout ça n'est pas normal ! D'autant plus que ma mère n'a aucun problèmes de santé particuliers, et que c'est comme ça depuis toujours, ce qui est beaucoup trop longtemps !

Il faut que je mette un plan à exécution pour faire vivre ma mère. Je mets du blanc de poulet et de l'huile dans une poêle et allume le gaz. Il est temps que ma vie bouge !

HAGEL - Sacha SqyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant