Chapitre 11

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NATE


Après avoir composé le numéro d'Ivy, je porte le portable à mon oreille, et attends patiemment qu'elle décroche. Enfin, patiemment est un grand mot  : j'attends qu'elle réponde, et non qu'elle laisse une nouvelle fois son téléphone sonner, m'ignorant royalement. Les sonneries retentissent les unes après les autres dans le combiné, et je les compte, tout en me retenant de lever les yeux au ciel. Après huit sonneries, je tomberai sur sa messagerie, encore une fois.

Le téléphone se tait, et durant un instant, seul le silence m'entoure  ; mon cœur manque un battement, bien que je sache que c'est inutile  : déjà, la voix mécanique du répondeur se fait entendre.

«  Le numéro que vous tentez de joindre n'est pas disponible pour le moment.  »

Avec un soupir, je presse le bouton rouge au bas de mon écran et rejette ma tête en arrière, paupières closes.

-Ivy McBlair, tu as intérêt à avoir une bonne raison de ne pas me répondre, grommelé-je.

Je jette un coup d'œil au téléphone, jeté en travers de mon lit. Il reste silencieux, sans aucune petite notification. Je sais pourtant que la rouquine est sortie de son rendez-vous avec l'avocat, Gemma me l'a dit – elle, au moins, répond, quand on lui envoie des messages.

Mon esprit ne peut s'empêcher de faire un lien entre aujourd'hui et un an plus tôt, lorsque les rôles étaient inversés. Après la soirée d'Halloween de Gemma, où je m'étais rendu, et avais frappé un type, le lycée entier balançait à nouveau des rumeurs sur moi. Tout ce que j'avais trouvé à faire, à ce moment, était de me réfugier au terrain de basket et de marquer des paniers. Mon portable était éteint, et Ivy me cherchait partout dans l'établissement.

Je n'oublierai jamais à quel point elle semblait énervée de me voir jouer tranquillement, alors qu'elle et Gemma se faisaient un sang d'encre. Elle était drôle à voir, le visage rougi par le froid, les mains sur les hanches et le regard énervé, du haut de son mètre soixante.

Le souvenir de la scène m'arrache un sourire. Et le changement de rôles, aujourd'hui, agrandit mon rictus. La belle coïncidence...

Mais ce qui reste encore plus marqué, dans mon esprit, est la chaleur qui a m'a traversé, lorsque j'ai compris qu'elle était là pour moi. Qu'elle était venue parce qu'elle s'inquiétait, qu'elle voulait savoir comment j'allais. Alors même qu'elle ne connaissait rien de moi, au fond.

Je crois que c'est là que j'ai compris qu'elle ne me laisserait pas tomber. Pourquoi, comment, exactement  ? Je n'en sais rien. J'ai simplement senti que je pouvais lui faire confiance. Comme si cette scène n'avait été que le déclic qu'il me fallait, pour comprendre qu'il y a des gens formidables autour de moi.

Mon téléphone vibre soudain sur le matelas, et je m'empresse de l'attraper afin de voir si Ivy m'a répondu. Mais ce n'est qu'un appel entrant de Gemma.

-Alors, blondinet, pour répondre à la question que tu vas me poser, non, je n'ai toujours pas de nouvelles d'Ivy, débite-t-elle avant que je n'aie pu ouvrir la bouche.

-Ce n'est pas –

-Ce que tu allais me demander  ? Bien sûr que si, ne te voile pas la face.

Je grimace, piégé, avant de changer de sujet.

-Et tu sais où elle est, au moins  ?

Savoir Ivy seule dans Västeras ne me rassure pas le moins du monde, sachant combien sa famille est... tarée. Je me souviens encore des fois où elle arrivait en cours le matin, avec l'air de ne pas avoir dormi, et les yeux rougis à force d'avoir pleuré. Tout ça à cause d'eux.

FEARLESS (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant