5. Eldarion

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- Les ennemis nous ont attaqués par surprise, en pleine nuit, disait une voix. Les veilleurs ont été massacrés avant qu'ils aient eu le temps de nous avertir. En quelques minutes, tout le camp a été envahi et saccagé. Il n'en reste plus que des cendres...Beaucoup d'hommes sont morts la nuit dernière. Et beaucoup risquent de l'être encore avant le prochain lever de soleil.

- Et mon fils ? Demanda le roi d'une voix sourde. Et mon fils ?

- Gravement blessé, votre majesté. Les meilleurs soigneurs elfes essayent par tous les moyens de le sauver. Si les dieux sont avec nous, il survivra.

Aranel entendit un gémissement de douleur.

- Hélas ! Le sont-ils ?

L'interlocuteur, dont Aranel ne reconnaissait pas la voix, n'osa répondre et garda le silence.

- Et Legolas, reprit Aragorn. Est-il toujours aux côtés de mon fils ?

- Il l'est, votre majesté. Depuis l'attaque, c'est lui qui commande l'armée du prince. C'est lui qui m'a envoyé vous conter ces tristes nouvelles et vous mander des renforts. Nous ne pourrons tenir nos positions plus longtemps avec seulement la moitié de notre effectif.

- Toutes les armées ont besoin de renfort, répondit le roi d'une voix fatiguée. Les nains en demandent aussi à l'Est. Et ici même, nous peinons contre l'ennemi. Mais soit, je vais envoyer mille hommes rejoindre l'armée de mon fils. Je ne peux rien de plus.

Après les habituelles formules de politesses et maintes révérences qu'Aranel devinait même sans les voir, l'homme sortit de la tente. Le jeune garçon, qui s'était caché pour une raison que lui-même ignorait, aperçut un Elfe blond dont le visage était défiguré par les cicatrices et dont la main droite ne comptait que trois doigts.

Sur chacun, la guerre avait laissé des traces. Aranel avait été chanceux, pour le moment du moins...Mais dans quel état était son frère ? Est-ce qu'il survivrait ?

Alors que l'Elfe s'éloignait, Aranel hésitait à entrer dans la tente de son père. Il avait totalement oublié le motif de sa venue. Aria et son escapade lui était presque sortie de la tête, et à leur place, le visage de son frère s'imposait à lui. Le reverrait-il ? Il regrettait déjà de ne pas avoir passé plus de temps avec lui. Lorsqu'Aranel avait cinq ans, Eldarion en avait huit et commençait déjà à assumer ses responsabilités. Depuis, ils s'étaient peu à peu éloignés...

Si Eldarion venait à succomber à ses blessures, c'est lui, Aranel, qui deviendrait héritier du trône. Il réfléchit quelques secondes à tous les changements que cela impliquerait, mais presque aussitôt, il fût dégoûté d'avoir eu de telles pensées.

Un cri retentit sous la tente. Un cri de rage, de tristesse, de douleur. Un cri de désespoir. Le cri d'un roi inquiet pour son peuple. Le cri d'un père angoissé pour son fils. Le cri d'un homme torturé par l'existence.

Aranel s'enfuit dans la nuit. Il ne voulait plus entendre ce cri. Il voulait que tout cela cesse. Il allait devenir fou.

Eyquem le retrouva le lendemain matin, inconscient, étendu sur le sol.

La Dernière larmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant