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CHAPITRE 6

On était devant le collège, comme on le faisait souvent. On attendait que ta sœur, Clara, vienne nous chercher.

Il n'y avait plus personne devant le collège... alors, comme d'habitude, on était assise sur nos sacs, par terre, ma tête sur ton épaule et ta tête posée sur la mienne.

On discutait calmement et je jouais avec une feuille morte. Et puis, une idée me traversa l'esprit. Je ne pu retenir mon geste et je jetai la feuille sur toi. Dans ta bouche plus exactement.

Sur le coup je me suis sentie stupide. Tu t'étouffais avec ta feuille et je riais. Mais tu t'es prêtée au jeu; tu as pris une feuille et tu me l'as lancée dessus.

« Je vais te les faire bouffer tes feuilles moi! » avais-tu crié en te jetant sur moi.

Pour me défendre, je t'ai prise par les hanches et t'ai fait basculée en arrière. On est tombées, l'une sur l'autre, toi sur le dos, moi sur le ventre. Je me suis relevée et me suis mise à quatre pattes et je t'ai attrapée les mains pour les coincer au dessus de ta tête.

Tu riais aux larmes... moi, je ne riais plus. Non, je te regardais rire en me disant que tu riais grâce à moi. J'avais réussi à te rendre un peu heureuse. Et ce "un peu" a fait grandir un sentiment de fierté en moi dont tu ne peux pas imaginer la puissance. Et, vu sous cet angle, à rire comme ça, tu étais magnifique...

Mais tu as vu que je te regardais. Alors tu as arrêté de rire et tu as plongé ton regard dans le mien. Le sourire aux lèvres, on se fixait, les yeux dans les yeux, toi par terre, sur le dos, les mains coincées au dessus de la tête, et moi, à quatre pattes juste au dessus de toi.

Je n'avais qu'une seule envie; t'embrasser. Alors, je me suis approchée tout doucement de toi et tu n'as pas bougé. Est-ce que tu as vu que je m'étais approchée? Je ne sais pas... mais tu n'as pas bougé. Alors, je me suis approchée un peu plus... et puis une voiture nous klaxonna...

Je t'ai libérée et je me suis reculée si vite que je me suis cognée le dos contre le mur. Tu t'étais remise à rire et moi aussi. On est montée dans la voiture qui nous avait klaxonnées; celle de ta sœur.

À peine entrées, Clara s'écria;

« J'ai rien vu! C'est pas moi, j'ai rien vu!!
- Non mais c'est pas ce que tu crois!! » as-tu dit en riant.

Je me suis assise à l'arrière de la voiture, souriante et heureuse, fêtant ma victoire silencieusement.