Chapitre 14

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Nous avons vidé les sacs sur le sol pour étudier le matériel. De la nourriture, de l'eau, une carte, une boussole, un talkie-walkie, des ciseaux, un stylo, un ordinateur, un dictionnaire, un marteau, un mug, des vêtements chauds, des maillots de bain, une fourchette, et des vêtements idéaux pour courir car ils sont moulants mais sont légers et ne tiennent pas chaud.

Nous avons changé nos tenues avec les tenues de sport et nous n'avons pris que ce qui était vital. L'eau, la nourriture, la carte, la boussole, les vêtements chauds et le talkie-walkie en pensant que ce serait notre moyen de communication avec Ana.

Quand nous sommes sortis de la tente, des équipes étaient déjà partis, d'autres préparaient leurs affaires et d'autres démontaient les tentes pour les ranger dans les sacs. La carte posée sur le sol, nous nous sommes situé puis nous nous sommes orientés à l'aide de la boussole.

- La destination est lointaine, on a intérêt à bouger rapidement.

- Pas de problème, on va couper en passant par la forêt.

- Ok, aller on y va.

Donc nous avons tous les trois enfilé nos sacs à dos avant de partir en direction de la forêt.

Une forêt relativement dense ralentissait notre progression. Nous enjambions les fougères et les racines, nous nous baissions sous les branchages touffus des arbres. La chaleur étouffante sous le feuillage nous fatiguait et nous obligeait à faire des poses régulièrement pour boire. Après deux heures de marche dans cette forêt luxuriante nous sommes enfin parvenus à la lisière de l'autre côté. Marc a demandé :

- Attendez, on peut faire une pause s'il vous plaît ?

- Ça ne sera pas de refus.

Je me suis appuyé contre un arbre pour boire, puis j'ai sorti la carte pour voir dans quelle direction continuer. Devant nous, s'étendait une étendue de sable en forme de cuvette de plusieurs kilomètres de long et d'une dizaine de mètres de profondeur, au-delà, s'étendaient des montagnes qui étaient notre destination. Sur une des bordures de la cuvette il y avait un barrage qui retenait un important volume d'eau.

Un mouvement a attiré notre attention. Une équipe était devant nous et se dirigeait vers le barrage.

- Il faut qu'on se dépêche.

Si nous avions eu le temps, nous serions passé sur le bord de la cuvette en rejoignant le lac derrière le barrage, mais nous aurions perdu trop de temps donc nous avons dû passer dans la cuvette. Nous avons dévalé la pente de sable à toute vitesse. Et une fois en bas nous avons pressé le pas pour sortir le plus rapidement possible de la fosse car les pentes de plusieurs dizaines de mètres de haut nous oppressaient.

Il n'y avait pas un bruit, pendant dix minutes nous avons parcouru la moitié de la distance qui nous séparait de l'autre côté de la cuvette.

Soudain, le talkie-walkie a grésillé, alors Emma l'a saisi puis a ajusté le signal pour que le grésillement devienne la voix d'Ana.

- Est-ce que vous me recevez ? C'est Ana ! Est-ce que vous me recevez ? Répondez moi.

- Oui Ana, on te reçoit, ça fait plaisir, tu en a mis du temps pour nous contacter.

- Moi aussi ça me fait plaisir, mais on n'a pas le temps de discuter. Il faut....schrrr...que...schrrr...prévienne...schrrr....danger....schrrr...derrière vous...schrrr...barrage.

Le signal grésillait à nouveau et les paroles d'Ana étaient incompréhensibles. Emma avait beau tourner tous les boutons, les grésillements s'intensifiaient. Alors Marc a éteint le talkie pour le ranger sur le côté de son sac.

Soudain un bruit métallique a retenti et s'est répercuté sur les bordures de la cuvette. Nous nous sommes retournés et nous avons vu des milliers de litres d'eau jaillir par les vannes du barrage. L'autre équipe avait sûrement ouvert le barrage, mais pourquoi ? Malheureusement, nous n'avions pas le temps de réfléchir à cette question.

- Vite, ils ont ouvert les vannes du barrage, courez !

Nous nous sommes précipités en direction de la pente la plus proche de nous, vers notre objectif, les montagnes. Nous entendions l'eau qui se déversait à un rythme effréné dans la cuvette. Je comprenais à présent à quoi servait cette cuvette.

Nous courrions comme nous n'avions jamais courus auparavant. Nous étions maintenant à deux cents mètres du bas de la montée. Nous avons couru, avec nos sacs sur le dos, pour échapper à la vague qui grossissait à vu d'œil derrière nous. Plus que cent mètres,...quatre-vingt-dix,...quatre-vingts,...soixante,...cinquante,... mais Marc a trébuché et s'est étalé sur le sol de tout son long.

- Vite, relève-toi. Lui ai-je dis en l'aidant à se relever.

Il est repartit mais j'ai vu qu'il avait fait tomber le talkie. Je me suis penché pour le prendre et quand je me suis redressé, j'ai vu l'eau rugissante arriver droit vers moi. Je me suis retourné et j'ai crié :

- Courez.

J'ai couru derrière eux. Emma en tête avec vingt mètres d'avance sur Marc qui avait une dizaine de mètres d'avance sur moi. Ils était presque au début de la montée, mais j'entendais l'eau juste derrière moi.

J'ai tourné la tête pour voir la vague m'engloutir et m'aspirer avec une force inouïe. Mon corps a tourbillonné dans les courants qui se sont calmés seulement une fois la cuvette remplie, et mon corps a été déposé au fond de l'eau, le silence est revenu au bout de quelque secondes.

J'ai ouvert les yeux; l'eau sombre m'entourait et de l'eau plus claire scintillait plus loin au-dessus de moi. Mon corps fatigué flottait apaisé dans ce liquide translucide qui diminuait l'impression de gravité, je pouvais me laisser aller, tout abandonner, partir tranquille, sans problème, sans épreuve dont on ne connaissait le but. J'ai refermé mes yeux, j'avais abandonné, le combat, l'épreuve, la vie, mais le visage d'Ana m'est apparut, elle me souriait et je me suis soudain souvenu qu'elle était partit dans un bus à destination inconnue avec un chauffeur qui faisait un peu flipper. Elle avait besoin de moi, j'avais besoin d'elle.

J'ai rouvert les yeux et j'ai voulu remonter à la surface mais mon sac me retenait au fond et mes lanières étaient coincées. J'ai essayé de les enlever mais l'air commençait à me manquer et je voyais de plus en plus flou. J'ai levé les yeux une dernière fois vers la surface et je me suis évanoui en relâchant ma dernière bulle d'air.


Rêve d'une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant