7 - Elise

52 3 2
                                    

       

_ Ma puce, Vincent doit passer te voir à dix-sept heures, avant que tu partes. m'apprend mamie.

J'entends Roman râler et regarder l'heure.

_ Me voir ? Pourquoi ?

_ Il m'a dit qu'il devait s'excuser, quelque chose comme ça.

_ Ah.

Nous remontons au premier et parlons décoration. Mamie a envie de changement apparemment et me demande ce que j'en pense, ce que je verrais comme ambiance. Elle sait que j'adore l'endroit comme il est, mais je ne peux m'empêcher d'y voir certaines touches scandinaves, plus douces, plus épurées.

Avant l'arrivée de Vincent, j'ouvre le portail à distance depuis la terrasse flanquée de larges escaliers en pierres. Roman vient de prévenir ma grand-mère qu'il doit s'absenter peu de temps. Il est très poli et prévenant avec elle, pas comme mon cousin Aleksander peut l'être, davantage comme mes oncles jumeaux Jonas et Joël. Elle lui parle et ça le fait froncer les sourcils. Je m'approche devant l'ouverture des immenses portes fenêtres afin d'écouter ce qu'ils se disent.

_ Elle a le droit de savoir, elle va finir par se faire des films et s'inquiéter. Vous êtes plus qu'une grand-mère pour elle.

_ Je sais mon grand mais c'est trop tôt pour l'instant. Elle est en pleine formation pour grimper d'échelon. Après ça elle devra changer d'agence, c'est à ce moment que je lui annoncerai.

Quoi ? Mais qu'est-ce qu'elle va m'annoncer ? Mais que se passe-t-il ?

_ Encore cinq mois à tenir si je comprends bien.

_ Tout à fait, allez va, sinon tu vas croiser Vincent et apparemment tu ne le souhaites pas.

Je pars m'appuyer contre la balustrade en pierre, faisant mine de guetter l'arrivée de Vincent.

Roman s'approche de moi.

_ Bon, je dois filer, je te dis à la prochaine.

Il me fait la bise mais la peur me broie les entrailles. Je le retiens par son pull et lui glisse à l'oreille.

_ Dis-moi ce qu'il se passe.

Il relève la tête, faisant mine de ne pas comprendre.

_ Je vous ai entendu dans le salon.

Son front se plisse avant de répondre.

_ Ce n'est pas à moi de te le dire.

_ Mais est-ce qu'elle va bien ? Tu me le dirais si c'était pas le cas, hein ? Elle est va bien, n'est-ce pas ? Je ne suis pas prête... m'étranglai-je malgré moi.

Son front se défroisse en même temps que son regard devient compatissant.

_ Rassure-toi, de ce que je sais elle a une santé de fer.

_ Mais si elle n'est pas malade, pourquoi elle fait tout ça ?

_ Elle te le dira elle-même. Ne pense pas au pire, ok ?

Sa main se pose sur la mienne encore accroché à son pull.

_ Ok, merci Roman.

_ Ah, c'est déjà mieux que le repris de justice.

J'hoquète de surprise et grimace de honte.

_ Au fait, la prochaine fois, préviens-moi, je mettrai un caleçon. rajoute-t-il en me faisant un clin d'œil.

Je le regarde entrer dans le garage. J'entends un grondement que jamais j'aurais cru entendre ici, un deux roues. D'après le bruit c'est un petit cylindré. Roman sort sur un bobber noir avec des pneus à flancs blancs et rouges, petit moteur ok, mais il a du chien. Je lui adresse un signe de la main auquel il répond d'un hochement de tête avant de filer.

_ Je n'savais pas qu'il avait une moto. dis-je en me tournant vers mamie.

_ Bien obligé, il lui reste encore quatre mois de suspension judiciaire.

_ On lui a retiré son permis ?

_ Il ne t'en n'a pas parlé ?

_ Non, en fait on n'a pas trop parlé.

_ Hum. Lourd excès de vitesse, trois ans de suspension.

Je repense à notre rencontre sur le parking et vois un peu plus clair maintenant.

_ Qu'est-ce qu'il risque s'il est pris derrière un volant ?

_ Deux ans d'emprisonnement, 4500€ d'amende, véhicule confisqué et d'autre peines complémentaires.

Outch ! Je comprends vraiment mieux ses réactions, Vincent a joué gros avec la Chevy. Quand on parle du loup, le voilà.

_ Mesdames bonsoir.

_ Bonsoir Vincent, rentrons au chaud. dit mamie.

_ Oh, c'est gentil mais je n'en ai pas pour longtemps Elisabeth.

_ D'accord, mais moi je rentre, à bientôt.

_ Au plaisir.

Ma grand-mère hoche la tête et passe la baie vitrée.

_ Vous vouliez me voir ?

_ Oui, je tenais à m'excuser pour ma brusquerie d'hier.

_ Vous pouvez rajouter l'inconscience et la provocation. C'est sûr que se jouer de moi c'était moyen mais c'est auprès de Roman qu'il faut s'excuser.

_ Aussi, mais pour lui va falloir plus de temps. Tiens c'est pour toi.

Vincent me tend une carte métallique avec une chaînette. Je peux lire sur l'estampille en relief « THE DIFFERENT Private NO LIMIT ». Mon regard attend des explications.

_ C'est un pass VIP pour le complexe que je tiens. Garde-le, il est valable pour la personne à qui je l'offre ainsi qu'à la personne qui l'accompagne. Je te le confie, ne le perd pas, c'est le seul no limit. Tu peux venir aussi bien au bar, qu'au restaurant et qu'au club. Il suffit juste de le présenter et de donner ton nom. Le personnel détient la liste des quatre pass.

_ Il n'y a pas d'entourloupe ?

_ Non, ta grand-mère me ferait la peau.

_ Effectivement.

_ Nous avons un site, tu veux vérifier.

_ En résumé, si j'ai bien compris, vous m'offrez l'accès et la consommation pour deux et sans date butoir ?

_ C'est ça.

_ C'est risqué.

_ Tant que tu ne me mets pas sur la paille, il est à toi. Je ne pense pas avoir d'ennui avec toi. Seul bémol, vient avec la même personne, une personne de confiance cela va de soi. Je donne assez de travail à mes physionomistes avec le privé.

_ Ok, j'étudierai ça.

_ Tu viendras ?

_ C'est possible.

_ Je te laisse, on m'attend au ranch.

Il me fait la bise et se retourne d'un coup.

_ J'oubliais, laisse tomber le vouvoiement c'est pour les vieux.

Un sourire plus tard et il est parti, tout comme moi.

ONDESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant