25 - Roman

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Mais qu'est-ce qu'elle a ?

Au loin, Élise vient de mettre Lili derrière elle, comme si elle la protégeait. Tout en me rapprochant je regarde dans la même direction et tombe sur un type, mais putain, c'est qui lui ?

Si Élise pense que c'est un danger, il ne m'en faut pas plus. J'accélère et m'arrête brusquement en double file. Je descends, fais monter la petite derrière et prends Élise par la main qui fixe toujours le type. Je tire un peu plus, elle me regarde avant de s'engouffrer dans la voiture.

Je fais le tour de la voiture tout en dévisageant le type qui fait de même. Cet échange de regard me fait comprendre que je ne vais pas aimer la suite.

_ Maman ?

_ Oui mon ange.

_ C'était quoi comme chien ?

_ Quel chien ? demandai-je.

_ Un gros dogue. répondît-elle en fronçant les sourcils.

_ Il était méchant ? s'inquiète la petite.

_ Non, je ne pense pas mais il était jeune et foufou. Faut faire attention.

_ Ah d'accord.

Il n'y avait pas chien mais je pense avoir compris le message. Je fais appelle à mes vieux souvenirs en espérant que Lili ne parle pas la langue de Zacharie.

_ Kto eto ? (C'est qui ?) demandai-je à Élise.

_ Yego otets. (Son père.) dit-elle en serrant les dents.

Oh putain ! C'est la merde !

Je fais un grand détour avant de rentrer, histoire qu'on ne soit pas suivi, juste au cas où.

Sur le retour Lili a décidé de se baigner. En les attendant, je préfère tendre les toiles au-dessus de la piscine sinon elles vont griller. Au moment où elles arrivent je termine d'orienter les pâles de la pergola et coulisse la terrasse des bains de soleil. A peine ai-je fini de découvrir l'eau que Lili y saute.

Élise râle après elle et lui rappelle quelques consignes. Sous la pergola, je profite de la vue d'un corps mince, aux muscles fins et fermes, interrompus par de douces rondeurs que mes mains aimeraient à nouveau toucher. Putain qu'elle me plait !

_ Tu vas pas te baigner ? demande-t-elle en regardant mon tee-shirt.

_ Après. Ça va à l'intérieur ?

_ Pas trop non.

_ Je m'en doute.

_ Je ne sais pas ce que mamie t'a dit à propos de lui.

_ Le strict minimum. Les photos de ta chambre ont fait le reste.

La chambre qu'elle a occupé depuis sa grossesse est remplie de photos d'elle et sa fille. Il y en a deux magnifiques, en noir et blanc, l'une montrant son ventre rond entourées de ses mains, l'autre capturant un instant d'amour d'une mère allaitant son enfant. Ça en rebuterait plus d'une, surtout si jeune, mais elle, non et je ne sais pas pourquoi, j'aime ça.

_ Ok, je me lance. J'ai appris la voltige avec une ancienne famille de circassiens. J'ai rencontré Santos au début de l'été, avant la fin et sans le savoir nous concevions Lili Anne. Seule ma meilleure amie était au courant de notre relation. Pendant les vacances de Noël lors d'un cours de voltige j'ai eu un accident, rien de trop grave. A l'hôpital j'ai appris les deux nouvelles qui ont changés ma vie. La première, ma grossesse, à qui il restait que quelques jours pour savoir si elle allait poursuivre ou non. La deuxième, la mise en détention de Santos et ses oncles pour vol en bande organisée. Comme tu le sais, j'ai gardé le bébé et j'ai fui Bordeaux. Seule Sherazade sait ce qu'il s'est passé, sinon j'ai raconté à tout le monde que j'allais dans les Pyrénées pour ma rééducation et continuer ma scolarité. La seule fois où j'ai eu des nouvelles, c'est quand j'ai croisé la cousine de Santos, Sara à la foire de Bordeaux. Je ne l'ai pas reconnu de suite à cause de sa brûlure récente au visage. Elle m'a seulement dit : « C'est à cause de toi qu'il m'a fait ça. » Elle a regardé autour d'elle avant de partir apeurée. J'en ai fait de même, j'ai récupéré Lili et suis partie illico. J'ai compris qu'il était sorti, c'était il y a trois ans. Depuis avec Lili, j'évite les cirques et les fêtes foraines. Maintenant ça ne sert plus à rien.

Un tas d'émotion se lit sur son visage, trop même, mais celles qui ressortent sont la peur et la colère.

ONDESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant