Chapitre 6

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Joanna

Je laisse l'eau de ma douche coulée sur ma peau nue. Elle me fait un bien fou, me réveille. Je repense à ce que Monsieur Leviels, Mark, et moi-même nous nous apprêtions à faire. Ai-je rêvé ? Où allions-nous nous embrasser ? Cette idée me plait comme elle m'effraie.

Mark est quand même le directeur de la firme. C'est un peu le bras droit de Ryan Carter. Si je refuse ses avances, est-ce que je risque de perdre ma place ? Je me suis tellement battue pour l'obtenir que je n'ai pas envie qu'une amourette de quelques secondes vienne gâcher mes espoirs. Je n'ai pas envie de quitter cette entreprise, je n'ai pas envie de partir, de ne plus revoir mon adorable collègue et les quelques amis que je me suis faits ici. Je me suis habituée à la vie new-yorkaise. À défaut d'aimer un homme, je suis tombée amoureuse de cette ville qui ne dort jamais. Je ne me vois pas partir pour ailleurs. New York a fait de moi quelqu'un de meilleur. Je me sens pleine et heureuse. Elle m'a permis d'oublier les fantômes de mon passé, de les laisser loin derrière moi, de me reconstruire. Lorsque mes parents m'ont eue au téléphone, ils m'ont trouvée changée, plus épanouie ! Et j'en suis ravie.

Je repense à Mark et aux conséquences que notre relation pourrait avoir au travail. Je me demande un instant comment réagirait Matt ou Gabriel s'ils l'apprenaient.

Mes pensées dérivent vers cet homme singulier. Je ne sais comment le définir. Quand je le croise parfois, je vois toujours au téléphone, la mine sévère. Son ton est autoritaire et sur à croire qu'il est le CEO de l'entreprise. Je me souviens une fois l'avoir aperçu en grande discussion avec une jeune femme. Le jour et la nuit. Il était détendu, son sourire illuminait les lieux et ses joues s'empourpraient facilement. J'ai nettement pu détailler son visage anguleux alors qu'il nettoyait ses lunettes. Ses yeux vert émeraude sont d'une incroyable clarté. Ses cheveux en bataille lui donnent un air de mauvais garçon. Un peu comme Matt, son côté fripon et chien fou en moins. Mais un air cassé par l'aura angélique qu'il dégage. Je me souviens de ce jour, j'étais restée figer à le regarder, tenant contre moi des dossiers urgents que j'amenais à Gabriel. Mon cœur, à ce moment-là, s'est fait la malle, ma raison avec. C'est rouge comme un poivron que je l'ai salué de la main avant de reprendre mon chemin.

Mark... Pourquoi est-ce que je pense à lui ? Est-ce parce que nous avons failli nous embrasser ou bien parce qu'il dégage une aura rassurante ? Peut-être un peu des deux. Je dois admettre que depuis que je l'ai cogné avec cette fichue porte, il me hante.

Mais j'ai tellement peur de me tromper. J'ai tellement peur de me bercer d'illusions, d'être déçue. Je soupire gravement. Les larmes me montent. Je me demande un jour si j'arriverai à refaire confiance, à avouer l'inavouable à un homme. Surtout à lui. Cette pensée me perturbe et me rend triste.

— Je ne peux pas...

Mon téléphone sonne. Je sors rapidement de la douche et cours répondre.

— Princesse, c'est Matt ! Je viens te prendre ? Je suis pas loin de chez toi, j'avais un truc à faire.

— Tu arrives dans combien de temps ?

— Je suis là dans cinq minutes !

— OK, pas de souci, je t'attends !

Je raccroche et me précipite devant mon dressing pour choisir mes affaires. Je ne fais pas partie de celles qui s'habillent et se bichonnent pour un oui ou pour un non. Ce soir je vais à un concert, pas à un défilé de mode. J'opte alors pour un débardeur noir, un sweat à capuche violet et un jean moulant. Mes Vans feront l'affaire. J'attrape un sac en bandoulière et file aux toilettes. Il va vraiment falloir que j'aille voir le médecin ! Cela en devient gênant. Lorsque j'en ressors, quelqu'un toque à la porte. J'enfile mon perfecto et chope mes clés.

Le paladin aux émeraudesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant