Sex game - Plus qu'un jeu

Chapitre 1: Le jeu -Killian

-Ils ont pas fini de nous soûler, craché-je.

Je tire une taff sur ma cigarette et recrache la fumée blanche, qui s'échappe et disparaît.

-Comme tous les ans quoi, me répond ma sœur sans grand intérêt.

-Quand t'étais gosse, c'était ton émission préférée.

-Quand j'étais gosse, je mangeais de l'herbe, ça veut pas dire que j'avais raison.

J'esquisse un sourire et re tire sur ma cigarette.

-T'as peur ? lui demandé-je.

Elle baisse les yeux sur le sol. Le vent fait virevolter ses cheveux blonds sur ses joues rosies par le froid. Je prends son silence pour une affirmation. Allez Killian, c'est le moment de jouer le grand frère protecteur.

-T'en fais pas Anna, c'est pas ma première année, tu sais que t'as pas à avoir peur. Sais-tu seulement à quel point les jeunes de la tranche d'âge dix-huit vingt-cinq ans sont nombreux ici ?

Elle relève les yeux vers la mer dont la surface de l'eau est grisée car elle reflète un ciel assombri de nuages. Anna, comme chaque année, a une peur bleue que je soie tiré au sort pour participer à ce putain de programme télé. J'essaie de la rassurer, mais pas besoin de mentir: on est tous effrayés à l'idée que notre nom sorte. Aussi bien ceux qui viennent d'avoir leur majorité que ceux qui n'ont bientôt plus vingt-cinq ans.
On a tous une "chance" d'être choisis.
Pour m'expliquer, le "sex game", c'est une télé-réalité. La seule du pays, en fait. Une fois par ans, vingt candidats sont tirés au sort pour y participer. Dix hommes, dix femmes. Le but est de former des alliances, des stratégies, et surtout des couples, de manière à être aimé des téléspectateurs, acquérir leurs votes, et donc rester. Personne ne sait ce qui arrive à ceux qui en récoltent le moins, ceux qui sont éliminés du jeu. Personnellement, je suis persuadé d'une chose: on ne ressort pas de la maison du sex game indemne.
En bref, il y a deux vainqueurs, un couple évidemment. En général, ceux qui regardent encouragent leur couple favori et sont attristés s'ils sont amenés à partir.
Quels cons... nombreux sont ceux qui trouvent ce jeu amusant, divertissant. On trouve sûrement cela drôle, une fois les vingt-cinq ans passés. Mais quand on est comme moi, et qu'on a vingt-deux ans, croyez-moi, c'est loin de nous faire rire.
Et là vous vous dites "mais d'où vient cette merde ?". La réponse: je sais pas, et je m'en contre-fous.

Tout ce que j'espère, c'est que je vivrai un peu plus longtemps. À mon âge, on a encore rien vu, rien vécu.