Chapitre 2: SERENA (partie 2)

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Maintes heures passèrent, humidifiées par la rosée. Dans la nuit noire, en même temps que bruissaient dans l'herbe haute des grillons, avançait paisiblement une charrette transportant trois adolescents. Elle avait quitté la plaine et arpentait dès lors l'encolure d'une étroite vallée. Bientôt, les sabots des équidés trempèrent dans l'eau scintillante d'un ruisseau. Nul doute qu'elle devait être très froide. Alors, Fate se sentait un peu coupable d'infliger ce supplice à son cheval. Seulement, il ne leur était pas possible de s'attarder plus longtemps dans la plaine. 

Ils avaient attendu durant quelques temps que Serena se réveille, mais cela ne s'était point produit. Ils s'étaient alors résignés à abandonner les restes de leurs compagnons près du marais, et avaient fait chemin vers le Nord, sans savoir si la jouvencelle se réveillerait. La respiration lente, la peau blême, elle semblait se mourir. Le natif de Maltréa craignait grandement cette éventualité. Car il ne s'expliquait toujours pas ce à quoi il avait assisté et nourrissait l'espoir que la jeune fille répondrait aux interrogations qui lui martelaient le crâne. Mais elle ne se réveilla pas. Alors, il se tendait à mesure que se mouvait la charrette. Une des roues glissa sur une pierre, provoquant une secousse. Le jeune homme lança une œillade à l'arrière, constatant que le tendron ne s'était toujours pas éveillé, son corps frêle uniquement couvert par une couverture en soie malodorante, usée par le temps. Solen, replié sur lui-même, n'avait pipé mot tout du long, le regard perdu dans la montagne. La peur ne s'était toujours pas défaite de son corps et ses mains tremblaient. De temps à autres, il lui arrivait de regarder longuement Serena. Ses traits doux reflétaient l'essence même de l'innocence. Face à cela, le garçon ne désirait que s'enfoncer d'avantage dans ses vêtements. Il s'assura de bien garder ses bras à l'intérieur de ses manches.

Au bout d'un moment, la jeune fille gigota. Sans tarder, le jouvenceau s'approcha d'elle. Ses lèvres, et bientôt ses yeux, remuèrent. Ses iris verts eurent tôt fait de refléter l'astre de la nuit. Mut par un enthousiasme subit, Solen hurla : « Elle s'est réveillée ! ». Au son strident qui émana de la bouche du garçon, une douleur lancinante foudroya le crâne du tendron. Péniblement, elle se redressa. La vision encore trouble, elle posa les yeux sur les deux éphèbes.

-     Que m'est-il arrivé ? Où suis-je ? articula-t-elle non sans difficultés.

-     Pour vous répondre avec exactitude, commença Fate sans se retourner, je vous dirais que nous traversons actuellement la vallée de Candem en direction du camp Fenrys qui se trouve à quelques lieues d'ici. Quant à ce qui vous est arrivé..., s'interrompit-il.

La jeune fille semblait être habitée par la crainte. Elle prit son dextre dans sa main gauche. Cela n'échappa pas au natif de Maltréa qui la guettait par-dessus son épaule.

-     Que vous est-il arrivé ? demanda Solen d'une voix remplie de toute la sollicitude du monde.

-     Ce n'était pas... Ce n'était pas moi, balbutia-t-elle effrayé.

-     De quoi parlez-vous ? s'enquit l'éphèbe blond quelque peu décontenancé par l'expression de l'adolescente.

-     Vous voulez dire que ce n'est pas vous qui avez vaincu cette créature ? lança Fate, l'œil vif. Pourtant nous vous avons vue faire, termina-t-il en plissant des yeux.

-     Non... protesta-t-elle timidement, c'était moi, mais ce n'était pas moi, tenta-t-elle d'expliquer maladroitement, un brin agacée.

-     Calmez-vous je vous prie, je vous crois, intervint le cadet en lui prenant les mains, souriant.

Dès lors, elle consentit à recouvrer son calme en respirant profondément. Quelques temps après, elle prit la parole :

-     Je sais bien que c'était mon corps qui bougeait... Mais j'avais l'impression... Que je n'étais que spectatrice de mes actions, depuis qu'il y a eu cette vision...

FATEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant