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Je suis si surprise, que Briou me tombe des bras, accompagné d'un miaulement plaintif.

- Qu... Que faites vous chez moi ?

Un sourire gêné se dessine sur les lèvres pulpeuses de mon interlocutrice.

- Je crains que tu ne fasses erreur ma belle, rétorque t-elle en tapotant de ses longs ongles manucurés la porte en métal. J'ai emménagé il y a quatre mois de cela.

- Non, c'est vous qui faites erreur, j'habite ici depuis cinq ans. La propriétaire vient de me rendre les clefs !

Son regard se durcit en observant l'objet puis soudain ses muscles se détendent et elle éclate de rire.

J'ouvre grand la bouche, choquée par sa remarque. Je balbutie :

- J... je... reviens.

La tête rouge comme une tomate, je me précipite vers les escaliers pour descendre au rez de chaussée et aller toucher un mot à ma proprio. C'est à ce moment précis que je réalise que je me trouvais au deuxième étage, or j'habite au premier. Mon dieu, je m'étais trompée de porte !

J'insère les clés dans la serrure - qui s'ouvre merci bien -, laisse rentrer le chat et referme la porte derrière moi. Le coeur battant, je me laisse glisser jusqu'à tomber sur les fesses. J'ai la tête ailleurs, il faut vraiment que je me repose. Je suis enfin chez moi. Ici, rien ne peut m'arriver, je suis dans mon cocon, mon havre de paix.

Les gargouillis de mon ventre me font sortir des mes pensées. Je réalise que je n'ai pas mangé de la journée, encore un peu et je vais tourner de l'oeil. Je me redresse tant bien que mal et me dirige vers la cuisine. J'essaie d'allumer la lumière mais l'électricité est coupée. Je grimace et sors de l'appartement pour rétablir le courant puis re-rentre en vitesse. Les pièces sont telles que je les ai laissés il y a des mois de cela. Des fruits moisis mijotent dans un saladier, répandant une odeur désagréable. Pas la peine d'ouvrir le frigo, j'en ai des frissons rien que d'y penser. J'ouvre les armoires et trouve un vieux paquet de pâte. Ça périme ces trucs ? Oh et puis zut, j'ai trop faim. J'ouvre l'évier, verse de l'eau dans une casserole et mets les pâtes à cuire. En attendant je me dirige vers mon canapé chétif. Ce dernier est magique, il possède un pouvoir mystique qui m'endors instantanément quand j'y suis allongée. Un nuage de particules s'envole alors que je m'y affale. Une pellicule de poussière saupoudre les tables et les objets. Je pousse un éternuement magistral à en faire trembler les murs. J'avais presque oublié : je suis allergique aux acariens.

Je me relève d'un coup et me questionne sur l'état de ma chambre. Je l'ai laissé en catastrophe, je dirais même que c'était l'anarchie. En effet, un champs de bataille opposant bocaux de peintures et débris de verre gisent de parts et autres. Je m'avance à pas de loup, évitant les pièges mortels et récupère ma toile étendue au sol. En la soulevant, plusieurs morceaux de verre tombent, mais la majorité, collés par de la résine, customisent les effluves d'acryliques peintes. La toile est magnifique, mêlant des couleurs et des reflets surprenant. Épatée du résultat, je reste immobile à l'observer. Comme quoi, parfois ce que on peut être agréablement surpris par des erreurs.

Le minuteur de la plaque de cuisson retentit et je retourne dans la cuisine. J'égoutte les pâtes et plonge directement une fourchette dans la casserole. La première bouchée me fait presque pleurer de bonheur. Je m'affale de nouveau sur le sol et engloutis la nourriture aussi vite que mon corps le peut. Une fois terminé, je m'apprête à me relever quand je remarque une pomme moisie au sol, logée sous la porte du frigo. Je la récupère par le pédoncule et la lance dans la poubelle. Un sacrée ménage s'annonce.

Soudain, un frisson me parcourt la colonne vertébrale et un bruissement aigu vibre dans mes oreilles. Je secoue la tête pour chasser cette sensation, ma vue se brouille et j'ai l'impression de tanguer. Aussi vite qu'ils sont apparus, les symptômes diminuent jusqu'à disparaître. C'est alors que les lumières s'éteignent et qu'une musique pop s'enclenche dans le salon. Je regarde de nouveau en face de moi et j'en lâche ma casserole de surprise : la pomme moisie est de nouveau coincée sous le frigo.

C'est pas vrai, ça recommence.

Animé par un éclair d'adrénaline, je me redresse et titube contre la table à manger. Très vite, je me rends compte que des meubles ne sont plus à leur place et qu'une mystérieuse pile de vaisselle vient de se matérialiser dans mon évier. Je cligne des yeux et m'ordonne de reprendre mes esprits. Je me dirige vers le salon dont les meubles et la décoration ont eux aussi été modifiés par je ne sais quelle magie et entends de l'eau couler dans ma salle de bain. Je ne serai tout de même pas passée dans l'autre dim...

- Quelle journée, tu as entendu les informations aujourd'hui ? Une illuminée est apparue en ville !

Je sursaute et manque de hurler. Qu... quelqu'un est dans mon appartement ! Je cours vers la cuisine et attrape le plus gros couteau qui me vient sous la main. Les mains tremblantes, je m'avance vers la salle de bain. Je ne sais pas vraiment à quoi me sert ce couteau puisque je sais pertinemment que je ne ferai pas de mal à une mouche.

- CHÉRI ! TU M'ENTENDS OU QUOI ? ET J'AI PLUS DE SERVIETTE ! Hurle la voix depuis la salle de bain.

- J'arrive ! Un peu de patience ! répond une voix masculine sur un ton indifférent.

Mon coeur rate un battement. Ils sont deux.

La porte de la salle de bain s'ouvre sur une femme dont ses longs cheveux sont enveloppés dans une serviette qui fait trois fois sa tête. Elle me regarde, interloquée, puis pousse un hurlement en apercevant mon couteau à la main. Je prends peur, me retourne et rentre dans un homme. Je tombe à terre, à moitié assommée.

La dernière chose que je vois sont leurs visage ahuris m'observer et la femme s'écrier : « oh mon dieu ! Regarde c'est elle ! »

BRUISSEMENTS D'AILES [RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant