Le doute de l'espoir

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         Tarek s'était vivement reculé, ayant dégainé sa dague et un poignard. Les bras à hauteur de son torse, bras tendus vers les deux étrangers, il sondait leurs regards. Eux-aussi s'étaient vivement reculés, mais contrairement au dragonnier, les mains qu'ils avaient levées étaient vides. Mais les paumes fermement relevées avertirent le combattant qu'elles n'en étaient pas moins dangereuses. Il constata par la même occasion que les mains de la jeune femme étaient ornées de bijoux d'un métal qu'il ne reconnut pas, d'une couleur brune. Ses doigts décorés de bagues se tenaient immobiles, contrairement à ceux, tremblants, de Himanshu.

        Le dragonnier constata que le visage du vieil homme reflétait plutôt une sincère surprise mêlée à une profonde curiosité qu'à une réelle animosité. La jeune femme, en revanche, le foudroyait de ses yeux pâles alors que ses sourcils accentuaient la méfiance lisible dans ses iris.

        Tarek avait un profond respect pour les magiciens, mais il n'oubliait pas que certains s'étaient rangés du côté du Mal. Cependant, il n'avait jamais apprécié les sorcières. Leeroy et lui avaient été amenés à voyager à travers de nombreux villages, et ils avaient par conséquent eu l'occasion de croiser quelques de ces femmes dotées de magie. Si la plupart d'entre elles préféraient se tenir à l'écart de la population et vivre isolées, d'autres se fondaient néanmoins dans la foule de temps à autre. Personne ne connaissait réellement leur but, ni leurs activités, mais les rumeurs ne manquaient pas. Les sorcières étaient réputées pour propager le Mal partout autour d'elles. On disait qu'elles préparaient des potions capables de vous changer en animal, ou qu'elles pouvaient vous maudire sur plusieurs générations. Les enfants racontaient même qu'elles pouvaient voler sur un balai, ou se changer en corbeau. Les parents, eux, ne les contredisaient pas. Non seulement parce qu'ils pouvaient se servir de ces rumeurs pour menacer leur progéniture s'ils n'obéissaient pas, mais également parce qu'ils y avaient cru étant petits eux aussi. Et ils ne savaient pas vraiment faire la différence entre de simples histoires et la réalité.

        Finalement, on savait très peu de choses sur les sorcières. Mais elles n'en étaient pas moins craintes.

— Qu'est-ce qu'un dragonnier fait ici, loin de la Vallée et sans son dragon ?

La voix de la jeune femme avait été cassante.

        Tarek ne bougea pas le petit doigt, muscles tendus, prêt à n'importe quelle éventualité. Il répondit cependant par une autre question :

— Qu'est-ce que fait une sorcière accompagnée d'un magicien au beau milieu d'une forêt ?

Himanshu observa attentivement le combattant, et finit par abaisser ses bras, à la plus grande surprise des deux autres. Il expliqua d'une voix calme :

— J'ai vu en toi de sombres images. Tu es le Fils Noir, et tu as en partie perdu ton dragon. Mais tu n'es pas une menace pour nous.

Le dragonnier arqua un sourcil sans pour autant abaisser sa garde. Comment ça « en partie » ? Sait-il que Brusanth revit à travers moi ? Que sait-il exactement ?

— Mihoko, il n'est pas ici pour nous.

Le ton du vieil homme avait été calme mais ferme lorsqu'il s'était tourné vers elle.

        La jeune femme dénommée Mihoko hésita un instant. Elle tourna un regard suppliant vers celui qui semblait être son mentor, puis capitula. Elle rabaissa ses mains brillantes de bijoux, non sans jeter un regard noir à Tarek.

        Celui-ci resta en position de longues secondes, puis finit par abandonner sa garde à son tour. Il rangea ses armes. Les trois restèrent ainsi encore un long moment dans le silence, qui contre toute attente, fut finalement brisé par le dragonnier :

La Fille Gelée et la ProphétieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant