VII ~ Jalousie ~

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   Arrivée chez moi, je passai devant mes parents sans répondre et partis directement me coucher. Allongée dans le lit, j'observais le plafond, sans réelle émotion, mon esprit se rejouant sans cesse la scène. Il réinventait le monde avec des "si". Si j'avais été plus mince, il aurait voulu de moi. Si j'avais été moins laide, il m'aurait aimée. Si j'avais été autre, j'aurais eu mes chances.
   Ses mots à l'allure légère pesaient lourd sur mon cœur, ils revenaient en boucle, jusqu'à ce que ma mâchoire crispée ne se relâche en un gémissement de douleur. Cri infirme, déformé par mes sanglots hachant mes respirations sifflantes.
   Cherchant à étouffer ma voix dans mon oreiller, je me courbais, respirant haut et fort, sentant ma poitrine se soulever avec lourdeur et douleur. Paradoxalement, je voulais me rappeler et oublier. Me souvenir pour que la souffrance puisse partir plus vite. Refouler parce que j'avais mal. En réalité, c'était un même et unique but : faire en sorte que la douleur ne stagne pas constamment dans mon cœur qui se trouvait percé par d'innombrables piques.
   Le temps passait plus ou moins lentement : j'étais perdue dans le passé, je n'avais pas l'esprit à compter le présent. Je finis par jeter un œil à mon téléphone : de nombreux messages de Lukas qui s'excusait, me demandait comment j'allais, et m'expliquait qu'actuellement il ne cherchait personne. D'innombrables idées de réponses me passaient par la tête, visant toutes à le faire culpabiliser, parfois de manière exagérée, mais à chaque fois j'effaçais pour ne pas écrire sous le coup d'émotions non mesurées.
   Je posai l'appareil à mes côtés et me repliai une fois de plus sur moi-même, finissant par seulement en sortir pour dîner. La nuit, les souvenirs revinrent avec plus de violence. Ainsi, les larmes avaient lessivé mes joues, se mêlant à ma salive et tâchant mes draps ; ce ne fut que vers une heure du matin que je tombais de fatigue, le cœur douloureux, mais moins lourd à porter.
   Le lendemain, j'étais venue avec la boule au ventre : c'était, en plus, nos heures de TPE. Nos sourires étaient crispés, nos paroles d'une banalité incroyable, et nos regards fuyaient. Plus jamais nous n'avions abordé ce sujet, c'était comme un interdit, et celui-ci se répercutait sur notre relation, désormais.
   Pourtant, deux semaines après à peine, alors que mon premier chagrin d'amour commençait à s'estomper, je crus recevoir un poignard dans le dos, ou plutôt le cœur en sortant du lycée : Lukas en compagnie de Lynn, notre amie pour les TPE. Il était évident qu'il y avait plus entre eux étant donné la dérangeante proximité de leurs lèvres. Dire qu'il m'avait affirmé le contraire il y avait si peu de temps... C'était mon monde qui s'effondrait. Je voyais et sentais la destruction lente et pénible de mon être et esprit, et je regardais les morceaux se morceler sur le sol. Pourquoi elle, et pas moi ? Qu'est-ce qui nous différenciait ? Le poids, encore ? Mon évidente laideur ? Pourquoi étais-je ainsi, et pas elle ?
   Yeux sombres, je finis par me remettre en mouvement pour détourner les yeux et partir en vitesse lorsqu'on me rattrapa.
— Qu'est-ce que tu veux ? murmurai-je en croisant ses yeux noisette.
   Il en vint à des triples excuses par rapport à ce que je venais de voir, et me demanda encore si j'allais bien. Je répondis de manière enjouée :
— Mais oui, je suis très heureuse pour toi !
   Un faux sourire de plus.

12 (faux) Sourires | TERMINÉE |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant