Le Moment de la Rage

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Le Moment de la Rage

  Ce qui m'intéresse vraiment c'est de savoir si Dieu avait un quelconque choix en créant le monde.

Albert Einstein

  - Malgré ces heures sombres qui se profilent, continuait la voix du Premier Ministre d'Hoenn David Gandhi, nous devons garder la tête haute. Si la peur et la colère sont grandes dans nos cœurs, nous ne devons pas nous laisser guider par celles-ci. Restons sereins et unis, et c'est ainsi que nous vaincrons cette menace qui pèse sur notre mo...
- Et gnagnagna, et ne soyez pas des brutes, et blablabla...
pesta le Premier Ministre Descartes en coupant sa radio tout en faisant des grimaces. Ce n'est pas avec ton attitude de trouillard qu'on va gagner cette putain de guerre, tocard...

Il poussa un profond soupir et laissa sa tête retomber, soutenue par sa main droite, et renifla bruyamment. Le politicien était extrêmement fatigué par ces dernières heures. Le voyage à dos de Dracolosse sous une pluie battante de la veille lui avait sûrement fait attraper un rhume par-dessus le marché. Et à peine était-il retourné à son bureau d'Illumis qu'il avait dû faire face à de nouveaux problèmes. Avec les Généraux à écouter, les ordres à donner et les nombreuses décisions à prendre, il était d'une humeur encore plus massacrante que d'habitude, malgré le grand soleil de cette après-midi. Il avait aussi besoin de sommeil, n'ayant quasiment pas eu le temps pour dormir. Mais, surtout, il craignait pour sa propre vie.

Il avait fait l'erreur d'allumer sa radio afin de prendre des nouvelles d'autres régions, cherchant des pistes à suivre pour tirer son Etat, et aussi sa peau, du pétrin dans lequel ils s'étaient tous vus contraints de s'empêtrer. Au lieu de ça, il était d'abord tombé sur un discours de sa collègue de Sinnoh, Meredith Robespierre, puis sur celui de David Gandhi. Ce dernier l'avait particulièrement énervé, jugeant la manœuvre inutile alors qu'il attendait de leur part des idées plus brillantes. Au lieu de ça, simplement des mots adressés au peuple pour ne pas perdre courage et ne pas sombrer dans la violence. Une vraie perte de temps !

Son bureau se trouvait au dernier étage de la Tour Prismatique. Un lieu fort de sens, qui lui donnait une vue sur l'ensemble de la Ville Lumière. Un peu interdits devant ses réactions moroses, quatre officiers attendaient sans oser rompre le silence. Le plus haut gradé d'entre eux, le Général Baudouin Nobel, qui avait accompagné le Premier depuis l'Ile Union, paraissait lui aussi d'humeur bougonne sous sa barbe touffue et adressait à Descartes un regard rude auquel ce dernier ne prêtait aucune attention, trop occupé à se morfondre tout seul.

- Si je puis me permettre, Monsieur, lança-t-il finalement d'une voix forte, vous devriez peut-être envisager de faire un discours, vous aussi.
- Un discours ?
répéta le Premier avec dégoût. Pour ressembler à une tafiole à la Gandhi ? Non merci, j'ai des trucs plus urgents à foutre.
- Ce n'est pas pour vous, mais pour le peuple
, renchérit Nobel, furieux. La population a besoin de se sentir soutenue par les autorités. Ils ont besoin d'un courage que seul un haut responsable peut leur fournir dans des moments pareils !
- Et du courage, qui va m'en donner, à moi ?
répliqua Descartes, furieux, en se relevant presque. Le peuple va me sauver, peut-être ? Non, Nobel, ça, c'est votre job et ...

Le Général avait à peine fait un pas en direction du Ministre, les poings crispés par la colère, qu'on frappa à la porte. Nobel et Descartes arrêtèrent immédiatement leur dispute, au grand soulagement des autres militaires, qui étaient sur le point d'intervenir pour empêcher leur Supérieur de fracasser la tête du Ministre sur le mur. Un silence pesant s'installa pendant quelques secondes au bout desquelles Descartes donna l'ordre d'ouvrir la porte, l'air maussade. Aussitôt le Colonel Von Stradonitz entra, suivi d'un homme d'une soixantaine d'année qui avait revêtu une étrange combinaison noir et portait un casque dans les mains. Ce dernier déglutit en apercevant les militaires et le Ministre, qui poussa un grand soupir en se cachant le visage de la main droite.

- Je savais que ce connard de Darwin se fichait de moi, pesta-t-il à voix basse mais suffisamment haute pour que tout le monde l'entende.
- Ha, voilà donc le fameux expert dont parlait le Colonel Cornell ! lança Baudouin Nobel, ouvrant les bras avec enthousiasme. Mr Holley, c'est bien ça ?
- Isaac Holley
, confirma ce dernier en ignorant le Premier Ministre. Alors comme ça, Kalos est attaquée par des dresseurs en combinaison ?
- C'est ça, comme la vôtre
, répondit le Général en hochant la tête. Le Colonel Von Stradonitz vous a déjà fait un briefing sur le chemin, je crois ?
- Grosso modo, Général
, répondit le Chef de la Brigade Aérienne en s'étirant les bras derrière la tête, l'air décontracté.
- Vous pensez que vous pourrez nous aider à faire face à cette menace d'un genre inconnu pour nos services, Mr Holley ? demanda Nobel d'un ton plus grave.
- Je devrais pouvoir, répondit l'informaticien. A quelle distance sont-ils d'Illumis ?
- On les attend pour dans une bonne heure
, intervint un officier en retrait, le Major Byron, en croisant les bras, comme pour se mettre sur la défensive. Ils sont suivis par quelques dirigeables qui bombardent les villes après leur passage, et nos forces déployées pour les arrêter à Neuvartault ont été rapidement décimées. On estime le nombre d'effectifs ennemis sous combinaison à une bonne centaine d'hommes. S'ils ne sont pas invincibles, ils sont vraiment très dangereux. Mais on en a quand même capturés quelques-uns.
- Je vois ... est-ce que l'Armée a de quoi abattre les Dirigeables ?
- Oui, mais le souci, c'est que ces hommes ou ces femmes en combinaisons avancent en première ligne pour désarmer nos dispositifs et leur permettre d'avancer tranquillement
, répondit Nobel en se grattant la barbe. Et dans une ville comme celle-ci, les manœuvres ne sont pas très simples à effectuer...
- Bien... Dans ce cas, j'ai peut-être un plan à vous proposer
, lança Isaac après quelques secondes de réflexion.

Le Ministre, derrière son bureau, eut un petit rire nerveux en relevant les sourcils d'un air condescendant. Le Général, par contre, semblait bien plus ouvert à l'écoute et le Colonel Von Stradonitz, quand il entendit son nom dans la discussion qui suivit se sentit d'un seul coup stimulé. Le plan était osé, mais cela valait le coup d'essayer. Ils n'avaient pas non plus beaucoup d'autres choix.   

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